Le risque de l’indifférence au mal

La lecture des journaux nous apporte chaque jour son lot d’horreurs et de crimes:
« Le viol, arme de destruction massive en Syrie » (Le Monde, 4 Mars 2014)
Plus de 150000 syriens , victimes de la guerre et plusieurs millions de réfugiés en Turquie, Jordanie, Liban, qui vivent dans des conditions parfois inhumaines.
Massacres de musulmans en RCA.
Massacres au Darfour
Meurtres (involontaires) de jeunes Coréens sur un ferry. L’incompétence ou le je m’enfoutisme peuvent aussi avoir des conséquences dramatiques
Enlèvements de jeunes lycéennes au Nigéria
Attentats meurtriers en Irak
Combats meurtriers entre tribus en Lybie
Débuts d’une guerre civile en Ukraine
etc, etc…

Il est impossible de fermer les yeux sur le mal qui ronge l’espèce humaine. Certains parviennent cependant à se mettre à l’abri. Leur secret réside sûrement dans un égoïsme sacré ou dans une profonde sagesse!

Guy Dhoquois (harmatheque.com/auteurs/guy-dhoquois) dans son blog intitule l’un de ses derniers articles: « Hobbes avait raison ». Il précise son approche de la pensée de Hobbes : »Les hommes qui ont décidé d’être méchants s’entretuent après s’être fait les dents sur les faibles. ils comprennent à temps qu’il faut arrêter la boucherie parce qu’ils sont un minimum intelligents. Ils créent des lois et des règles qui laissent à chacun un petit gain appelé à grossir grâce à la paix civile. C’est le triomphe de la logique mafieuse. la paix dedans, la guerre dehors. »
Longtemps, j’ai voulu croire que Hobbes avait peut-être tort (Homo Homini Lupus ou L’Homme est un loup pour l’homme). Je refusais aussi, intuitivement, la vision marxiste d’un monde rendu mauvais par la lutte des classes et l’appropriation privée des moyens de production.
Il y a quelques années, j’ai élaboré une théorie sur le fil ténu qui relierait nos comportements quotidiens parfois cruels, méprisants excluants aux crimes collectifs les plus terrifiants. Audacieusement, j’ai été jusqu’à écrire que si les êtres humains s’obligeaient formellement à être accueillants à l’Autre ( formes qui se matérialisent dans deux directions, le droit et la politesse), ils pourraient peut-être vivre en meilleure intelligence en négociant avec le mal qui est en eux (l’envie, la jalousie, la haine, le désir de posséder…)
Je pêchais sans doute par optimisme ou naïveté.
Il faut sans doute se résoudre à considérer que Hobbes n’avait pas tort. Hobbes parle des groupes d’hommes et non des individus. Dans les groupes, des plus petits aux plus grands, le mal est multiplié par la pression du groupe , par la lâcheté collective, par le désir de plaire à ceux que l’on considère comme puissants. Les formes peuvent parfois éviter le pire (le droit international). Elles ne sont bien sûr pas suffisantes quand la haine déferle.

Ces questions ne peuvent pas être résolues. Mais je refuse de renoncer. Il doit être possible de combattre la malédiction de Hobbes.
Il est certain que la diminution des injustices sociales, la réduction du machisme, l’apaisement des passions religieuses pourraient contribuer à la modération du mal dans les êtres humains. Mais il subsistera, même sans enjeux.

Cela ne doit pas nous conduire à l’indifférence ou à l’acceptation.
Ne cours pas camarade, le vieux monde est devant toi !