L’un n’exclut pas l’autre

Déja entre 1986 et 1989, je m'interessais aux processus d'exclusion et de categorisation.

Dans l’article précédent, je me demandais si avant de mourir, je comprendrai le racisme et l’antisémitisme, et donc les phénomènes de rejet et d’exclusion dans toutes les sociétés humaines.
Cela fait plus de 40 ans que ces phénomènes m’obsèdent (comme des millions d’autres gens) au point d’avoir il y a trente ans soutenu ma thèse de doctorat sur ce thème.
j’y donnais la définition suivante de l’exclusion : « Exclure, c’est clôturer un espace social déclaré « normal » et en chasser un certain nombre d’individus atypiques, ou incompatibles avec certaines valeurs prédéfinies comme conditions d’appartenance à cet espace. »
Nous portons tous en nous les prodromes de l’exclusion, du refus de l’Autre.
Mon pessimisme est fondamental sur les possibilités de rapports harmonieux entre les êtres humains. Pour survivre, je fais appel à la nécessité absolue du respect de la forme dans nos rapports avec les autres. -dont le droit est l’une des manifestations-.
Et pour faire plus que survivre j’emprunte à Kant son concept de « bonne volonté » d’où peut naître le DIALOGUE entre le « je » et le « tu » (Martin Buber). Cette passion pour le dialogue (même s’il est difficile)) motive mon parcours militant. C’est le dialogue avec l’autre, le différent, mais aussi le dialogue avec nos propres contradictions qui peut permettre d’avancer vers une cohabitation plus ou moins harmonieuse.
J’ai voulu faire cette petite introduction, (d’abord pour rappeler l’existence de ce livre…) pour dire mon malaise face à ce débat qui grandit chez les féministes et chez les intellectuels à propos des migrants et des graves agressions perpétrées par certains d’entre eux contre des femmes.
Ces agressions sont impardonnables et j’ai déjà dit plus haut que si les dénoncer c’est être assimilé par quelques gauchistes attardés dans le tiers-mondisme ou la sacralisation de l’immigré, à des islamophobes, alors oui sur ce point je suis islamophobe
Mais ce débat devient vite manichéen. Il y aurait d’un côté les gentils occidentaux et de l’autre les méchants musulmans.
Malheureusement les violences contre les femmes concernent toutes les sociétés humaines (ou presque)
Dénoncer en bloc les migrants arabo-musulmans qui fuient la guerre, la faim, l’oppression, comme des gens haïssant la liberté des femmes est stupide. Même s’ils se revendiquent d’une religion qui exige la pudeur pour les femmes, cela ne fait pas nécessairement de tous ces hommes des criminels et des violeurs en puissance
Les juifs orthodoxes refusent de serrer la main aux femmes. Ces absurdités existent dans toutes les religions monothéistes. Personne ne les accuse d’être par essence des violeurs en série !Pour eux, il y a d’autres chefs d’accusation! En la matière l’imagination humaine est sans limites.
C’est oublier aussi que parmi ces migrants il y a des femmes, obligées de quitter leur pays à cause des violences guerrières, des mariages forcés, d’une absence totale d’avenir. Battues, humiliées, sacrifiées dans leur pays d’origine, elles se heurtent dans nos pays à une bureaucratie qui les rejette alors même que ce sont les premières à subir ces violences.
Continuer à défendre le droit d’asile pour les damnés de la terre n’est pas incompatible avec la condamnation des actes contraires à l’éthique et à la loi. La difficulté vient du fait que l’on ne peut pas renvoyer une personne fuyant un pays en guerre dans son pays. Il faut alors se poser la question du « COMMENT? » Condamner en bloc les politiques dès qu’ils agissent dans un sens ou dans un autre ne fait pas avancer le problème. Brandir de vieux slogans gauchistes ne fait pas avancer le schmilblik
Nous nous sommes battues en France au sein du Mouvement de libération des femmes contre les inégalités, les violences, les images dégradantes et nous avons fait passer dans la loi des textes qui permettent aux femmes de se défendre sur le terrain du droit.
Il ne fait aucun doute que ce combat qui commence dans les pays arabo-musulmans sera long et difficile. A nous de le soutenir.
Il va de soi que tout migrant qui veut vivre dans un pays où les femmes sont libres a le devoir de respecter cette liberté fondamentale au risque de se voir privé de sa liberté.
Penser en termes d’exclusion, n’est ce pas vouloir ordonner le réel, le figer en deux termes, nier le désordre inhérent à toute société humaine, qui plus est en voie de mondialisation capitaliste donc forcément inégalitaire.
Le dialogue passe par l’éducation, et prioritairement par les femmes. Notre système éducatif casté doit certes continuer à enseigner les classiques mais aussi n’en déplaise à Alain Finkelkrault inventer de nouvelles méthodes d’apprentissage du dialogue des cultures.
Réfléchis camarade, le vieux monde est devant toi