Le danger des lois symboliques

On parle d’une nouvelle loi sur le harcèlement de rue.
Cela fait des dizaines d’années que les femmes le dénoncent. Ce sont les féministes du MLF qui ont demandé la criminalisation du viol dans les années 70/80. A l’époque , elles se sont fait insulter par les  » camarades gauchistes » notamment dans les colonnes de Libération qui estimaient , en gros, que les hommes- notamment les immigrés- avaient des « besoins », (comme disait ma mère).
Quand les femmes arrivent au bout de procédures longues et souvent humiliantes, les tribunaux correctionnalisent la plupart du temps le crime de viol en le punissant comme un délit.
Pourquoi ne pas faire une loi contre le harcèlement de rue ? Parce que l’on sait que cette loi ne sera pas appliquée, parce qu’elle n’est pas applicable sans effectifs policiers considérables, parce qu’il y aura des problèmes de preuve etc…
Une loi non appliquée, symbolique, comme l’a plus ou moins reconnu sur France Inter ce matin la Ministre de la Justice, est dangereuse.
Nombre de lois notamment quand elles protègent les personnes dans une situation de subordination (Droit de travail, Droit des étrangers, droit des femmes, droits des enfants…) ne sont pas ou mal appliquées.La raison en est évidente.
Cette ineffectivité de certains textes pourtant fondamentaux relativise l’impact de la loi en général.
« Le législateur exerce moins une autorité qu’un sacerdoce. il ne doit point perdre de vue que les lois sont faites pour les hommes et non les hommes pour les lois (…)Il ne faut point de lois inutiles. elles affaibliraient les lois nécessaires (…), disait Portalis le rédacteur du Code Civil au début du 19° siècle.
Que faire ? : Utiliser les textes existants,porter plainte quand c’est possible, dénoncer, crier, frapper (comme vous pouvez) les harceleurs, les ridiculiser. C’est parfois impossible notamment quand il s’agit de mots blessants parce que, dans notre société encore machiste, protester contre des insultes risque de vous mettre du côté de ceux qui « manquent d’humour ».
Il faut parvenir à une situation ou ce sont ceux qui insultent (même sous forme de soi-disant compliments) qui sont pitoyables.
Avis à ceux qui regardent leurs pieds quand une incivilité ou un crime se produisent devant eux
« Le monde est dangereux non pas tant à cause de ceux qui font le mal, mais à cause de ceux qui regardent et laissent faire. ».
Albert Einstein