Je me souviens des attentes interminables dans des salles enfumées, avant qu’Antoinette et ses troupes n’arrivent aux réunions …organisées par elles.
Je me souviens des discours d’Antoinette. Elle appartenait à cette catégorie d’oratrices dont on ne savait pas ce qu’elle avait voulu dire après ses interventions.
Je me souviens de ses condamnations péremptoires, alors que nous parlions d’égalité en droit, du Droit considéré par elle comme Patriarcal par essence.
Je me souviens de la difficulté que j’éprouvais à choisir entre son groupe, Psychanalyse et Politique, et le groupe des féministes pour l’égalité.
Je me souviens du Groupe du jeudi créé justement par des femmes qui voulaient parler à la fois d’elles et de politique, d’égalité en droit et de l’importance de la psychanalyse, pour illustrer notre slogan :Le privé est politique ou encore : »Une ne se divise pas qu’en deux ».
La difficulté pour les groupes d’êtres humains de parvenir au dialogue socratique, d’assumer nos contradictions et d’avancer avec elles n’a pas permis à ce groupe de durer.
Je me souviens du week-end à La Tranche sur mer organisé par Psychanalyse et politique, où un certain nombre de femmes du MLF venues pour vivre la sorrorité, sont reparties blessées par le mépris des « Antoinettistes »à leur égard.
Je me souviens de l’attirance des médias pour Antoinette, fêtée lors des journées du 8 Mars ou d’autres évènements, au détriment de mes copines qui agissaient pour l’IVG, pour la création de Centres pour Femmes battues, pour la criminalisation du viol, pour la parité…Anne Zelensky, entre autres, fut exemplaire dans toutes ces luttes. Dommage que son féminisme exclusif l’ait conduit depuis quelques années sur les chemins dangereux de l’islamophobie.
Je me souviens d’avoir été horrifiée par le dépôt du sigle MLF, à la Préfecture, par Antoinette Fouque. Par ce geste « juridique » (et profondément patriarcal pour le coup), elle remettait en cause les aspects anarchistes du MLF que j’aimais.Elle affirmait qu’il ne pouvait exister qu’un seul MLF, le sien. C’est précisément contre ce type de comportements que nous avions créé le MLF.
Paix à ton âme Antoinette. Tu étais intelligente et inventive, mais tu aimais trop le pouvoir et tu n’avais pas compris (ou pas voulu comprendre) que notre Mouvement des femmes des années 70 voulait inventer une autre manière de faire de la politique.
Dommage. Avec toutes nos sensibilités différentes, nous aurions pu ne pas avoir ces absurdes querelles de clans. Nous aurions pu discuter de nos différends, sans haine et sans volonté d’avoir raison à tout prix. Mais sans doute était-ce une utopie. Les femmes sont des hommes comme les autres.