Elles sont arrivées un jour à notre permanence de la CIMADE.
Elles avaient entre 20 et 30 ans
Elles sont venues seules du Maghreb ou d’Afrique de l’Ouest, le plus souvent avec un visa de tourisme
Elles ont toutes trouvé du travail dans l’aide à domicile, la restauration…
Elles avaient refusé des mariages forcés, des vies de femmes uniquement vouées aux hommes ou à la maternité, à la famille.
Elles voulaient vivre libres, écrire, exercer un métier choisi par elles, ne pas se trouver enfermées dans un mariage sans amour…même avec un Français.
Elles portent leur fierté sur leurs beaux visages fatigués.
Elles travaillent dur, multipliant les petits boulots, attendant de gagner assez pour avoir droit à une carte de séjour mention « salarié »
Elles ne connaissent de Paris que certaines lignes de métro ou de RER, se depêchent de regagner leur petit studio, au fin fond de la banlieue, après leur travail.
Elles vivent dans une grande solitude en France : pas de bistrots, pas de squats, pas de famille, mais une vie entre quatre murs, entrecoupée de coups de téléphone « rassurants » à leur famille restée au pays.
Sortir, visiter Paris, faire les boutiques… c’est risquer des contrôles, des mauvaises rencontres et puis il faut avoir de l’argent et elles parviennent juste à survivre dans la dignité.
Elles viennent parfois de familles de la classe moyenne. Elles parlent parfaitement le français. Leur sort est moins douloureux que celui des Soudanais, Syriens, Erythreens… violentés dans leur pays, pendant leur long voyage et encore poursuivis par des gouvernements dits de gauche qui se cachent derrière les Accords de Dublin 2 ( L’asile doit être demandé dans le premier pays où l’on arrive) pour traiter ces gens comme des chiens galeux
Ces jeunes femmes sont des figures non médiatiques de ces immigré(e)s anonymes.
Leur seul tort est de vouloir choisir leur vie.
Les préfectures pondent des arrêtés de refus de séjour où l’argument majeur est qu’elles n’ont pas de famille en France !
Faudrait-il qu’elles fassent des enfants français avec n’importe qui ? Elles refusent et attendent leur carte de séjour comme un sésame libérateur.