« Ce que je trouve troublant en vieillissant, dit-elle à son fils, c’est que j’entends sortir de ma bouche des mots que, jadis, j’entendais chez les personnes âgées et que je m’étais promis de ne jamais employer. Du style Où-va-le-monde-ma-bonne-dame ? …Les gens se promènent dans la rue en mangeant des pizzas tout en parlant dans leur portable – où va le monde ? »…
» Ce qui m’importe, c’est que me voici en train de faire ce que je m’étais juré d’éviter. Pourquoi ai-je succombé ? Je déplore où va le monde. Je déplore le cours de l’Histoire. De tout mon coeur, je le déplore. Cependant quand je m’écoute, j’entends ma mère déplorant la mini-jupe, la guitare électrique. Je me souviens de mon exaspération. « Oui, mère », disais-je, mais je grinçais des dents en priant pour qu’elle se taise…
« Tout ce que je fais, c’est de m’insurger et déplorer…Je me suis enfermée dans un cliché, et je ne crois plus que l’Histoire modifiera ce cliché…Le mot qui me revient de tout côté est MORNE….Je suis celle qui aimait rire et ne rit plus. je suis celle qui pleure. »
C’est un tout petit extrait d’un beau roman qui parle magnifiquement bien de la vieillesse.