Lettre au Rabbin Haim Korsia :
Je vous écoutais pérorer à la télévision, dans l’émission » C’est à vous » sur la fin de vie.
Vous vous déclariez horrifié par une éventuelle nouvelle loi qui irait à l’encontre de l’interdiction de donner la mort. Depuis plusieurs mois vous vous répandez sur les médias ou auprès du Président… en propos contre cette loi. « Celui qui me soigne pourrait me tuer », vous exclamez vous avec horreur. Pauvre Haïm!
Vous avez parfaitement le droit d’exprimer votre opinion en tant que représentant d’une religion . Mais de quel droit et au nom de quelle délégation de pouvoir, osez-vous parler en mon nom ? Depuis longtemps déjà, quand on parle des juifs, on dit : « Les citoyens de confession juive » ou encore : » Les membres de la communauté juive. » Moi, Régine Cohen née le 21 Aout 1940, faite juive par la haine et la peur, je ne me reconnais dans aucune de ces dénominations.
Et le plus intolérable est que cette prise de position pédante arrive alors que la guerre tue en Ukraine, au Soudan, en RDC, en Israel pour ne citer que quelques exemples. Dans tous ces pays, on ne soigne pas, on tue, celui ou celle qui appartient à une autre ethnie, à un autre peuple, à une autre religion. Au moment même de votre déclaration, Israël bombardait un camp de réfugiés faisant des dizaines de morts et de blessés.
La vie est sacrée dites vous mais vous a-t-on entendu condamner Israël ? On ne peut pas aider à mourir une personne qui le demande en suppliant au nom du droit de disposer de son corps mais on peut impunément massacrer des milliers d’hommes, de femmes, d’enfants, en arguant de la vengeance !
Je suis née il y a 84 ans, dans un monde habité par la violence, la mort, la terreur. J’en ai assez vu. Je refuse de continuer à vivre si je souffre ou devient dépendante. La liberté est ma passion. Il s’agit juste de me donner les moyens de mourir le plus sereinement possible. C’est simple. Personne n’y est obligé. Pourquoi cette timidité autour de la MORT volontaire alors que la mort involontaire’ est partout autour de nous, sans que beaucoup d’entre nous s’en préoccupent plus que… du prix des yaourts.
Je ne renierai jamais ma judéité mais je refuse d’appartenir à une communauté qui admettrait les massacres à Gaza ou les meurtres en Cisjordanie. Je comprends les Israéliens qui ne se remettent pas du pogrom du 7 octobre. Comment ne pas avoir l’impression que nous ne sortirons jamais de la haine des juifs ? Mais rien ne justifie les massacres à Gaza.
Au milieu de toute cette bêtise, de cette violence, comment espérer encore ?
« Moman, pourquoi les imbéciles sont stupides ? » ( « Moman, Pourquoi les méchants sont méchants » de Jean Claude Grumberg)