« Mon mari vient d’avoir 50 ans et il est déprimé. Il se trouve vieux. Il ne veut plus sortir. Moi, je m’en fous je suis venue seule ici avec mon fils et je suis ravie; »
« Mais vous êtes jeunes… qu’est ce que je devrais dire moi qui vient d’avoir 70 ans. »
» Quand ma mère a eu 70 ans, je l’ai mal vécu. Je me suis sentie vieille et je ne la regardais plus comme avant. Tout d’un coup, elle avait franchi un cap. »
« Je viens d’avoir 78 ans (regards un peu condescendants sur elle) et parfois je me dis que je ne me suis jamais sentie aussi bien dans ma peau. Plus d’obligation de séduire, la possibilité d’être soi-même…Bien sûr, il faudrait s’arrêter là ! »
« Vous ne trouvez pas bizarre que nous soyons entre femmes. Où sont nos hommes ? Le mien il est sur son canapé devant la télé. »
« Le mien il est devant son ordinateur et pour qu’il sorte, il faut vraiment le forcer ! »
» De toutes manières, mon mari ne prête guère attention à moi depuis de nombreuses années (rires). Mais bon, c’est ce que je dis à mes enfants, dans un couple, il faut faire des concessions, non ? » Divorcer pour un oui, pour un non, est ce que c’est mieux ? »
» La dame là bas, elle a gardé ses cheveux blancs; çà, je ne peux pas. C’est montrer son âge. D’ailleurs mes petits-enfants me l’ont interdit. »
» Bon, mesdames, je vous laisse, je vais rejoindre Monsieur devant la télé, enfin quand j’aurai fini la lessive. »
Témoignage nippon sur la vieillesse
Le journal Le Monde a publié le 25 Aout 2017 , dans sa série :’l’Eté des débats », un article sur les oeuvres littéraires d’ auteur(e)s » seniors » japonais, pour la plupart non traduits en français.
Il me parait intéressant de relayer ces informations dans le cadre de mes articles sur la vieillesse.
« Quatre vingt dix ans, pas de quoi pavoiser » est le dernier ouvrage paru de Aiko Sato (2016, non traduit)
Le Monde en publie quelques extraits traduits par Philippe Pons :« Même calculer mon âge est fatigant…
Le cauchemar des vieux…La télé ne marche plus. un technicien vient, tripote la télécommande. en dix secondes, ça remarche…Facture :4500 yens (40 euros). Je m’insurge, c’est le coût du déplacement. Je vais aux toilettes dans le grand magasin Mitsukoshi. Quand j’ai voulu tirer la chasse d’eau, je me trouve devant une batterie de boutons mystérieux. je vois un fil avec une boule rouge. Je tire et retentit alors la sonnerie de l’alarme…Je ne vais plus aux toilettes que chez moi.(…)
Vivre longtemps est pénible. Je pleure sans être triste, mon cerveau marche au ralenti, mes genoux fléchissent et j’ai envie de dire : »Laissez-moi tranquille! » mais à qui ? Aux dieux ? A moi-même ?(…)Les jeunes marchent vers leurs rêves. Nous, les vieux , vers la mort (…) Nos rêves à nous les vieux ? Mourir d’un coup. C’est triste comme rêve. »
La place des vieux dans la société nippone (en 2030, un tiers des Japonais auront plus de 65 ans) est un problème majeur mais il ne fait que montrer avec un peu d’avance l’importance de cette question dans toutes les sociétés développées.
Pour éviter l’amertume ou le pessimisme, pour vieillir le moins mal possible, j’ai eu envie de consacrer dans ce blog beaucoup de place à cet évènement notable de nos vies : le vieillissement, la place des vieux dans la société, le regard ou le non regard des jeunes et des adultes sur la vieillesse, et puis enfin , le choix que certains (dont je suis) font de décider de la date et des modalités de sa mort.
Notre génération a aussi le devoir de parler des problèmes spécifiques que posent la vieillesse au féminin.
J’espère être rejointe dans cette réflexion par d’autres copines et peut-être aboutirons-nous à la conclusion que la vieillesse…n’est pas un problème, juste une phase de la vie qui peut être parfois merveilleuse…à condition d’être acceptée comme telle par la société et ceux qui la composent
On se définit par ceux que l’on exclue : une réflexion intéressante de Virginie Despentes (Vernon Subutex 3)
« Sur le fond, tout le monde est d’accord : exclure les impurs, les impropres, les empêcher de s’exprimer. créer une catégorie de massacrables. les frontières varient, mais le jeu des gardes-douanes reste le même. C’est :toi, dehors. Je ne veux pas de çà chez moi. Le seul critère véritable, c’est qui on met dans les camps. Qui est torturable, charnièrable. Qui mérite d’être exclu. Il y en a qui ne veulent pas vivre avec les patrons, et d’autres c’est les Camerounais. il y en a qui ne veulent plus supporter les machos, et d’autres c’est les Gitans….On est tous du côté du pur. la seule chose qui nous intéresse c’est de légitimer la violence. Il faut que ce soit pour la bonne cause. parce qu’on veut bien avoir du sang sur les mains, mais en gardant bonne conscience. C’est la seule différence entre le sociopathe et le militant politique- le sociopathe se contrefout d’être dans le camp des justes. il tue sans préliminaires, c’est à dire sans perdre de temps à construire sa victime comme un monstre. Les Militants, eux font ça correctement : d’abord la propagande, et ensuite seulement le massacre. » (page 139 dans la bouche de Xavier, scénariste sans succès, aime les chiens)
C’est excessif mais ça donne à réfléchir sur ce thème qui m’est cher : l’exclusion
Comment aider aux changement sociaux … sans faire partie d’un groupe ?????
( Installation de Jane Alexander , sud-africaine (La meute) à la Fondation Vuitton, Juillet 2017)
Je me souviens de ma déclaration péremptoire, il y a environ 50 ans : »Le groupe c’est la mort »
Dans l’article qui précède, je cite Annie Le Brun qui représente pour moi la subversion sympathique, parce que- tout en partageant les mêmes idéaux que les membres de certains groupes (féministe, anti-capitaliste..)- , elle refuse l’idéalisme collectif.
Au PSU, au PC, à la CGT, à la CFDT, à la LDH etc, après m’être sentie très mal à l’aise, j’ai fini par démissionner parce que je ne supportais pas le mode de désignation des chefs, parce que prendre la parole et être écoutée paraissait de l’ordre de l’impossible, parce que la majorité est souvent lâche pour se faire bien voir des chefs ou pour d’autres raisons qui me sont inconnues.
A LA question qui figure dans le titre…je n’ai pas de réponse.
Ou alors une réponse pour rire : Fonder un groupe ….dont je serai la chef…
Gender studies, LGBTQI, Génération féministe, Girl power… Au secours ! « Lâchez tout »
Je suis féministe depuis près de 60 ans.
J’ai manifesté, fréquenté les réunions, les colloques, les AG.. dans les années 70 et jusqu’à récemment.
J’ai connu les années 80/90 où il était ringard de se dire féministe, autrement dit « mal baisée »
Alors je devrais être ravie de voir fleurir cette mode du féminisme qui s’affiche même dans les défilés de mode sur des mannequins anorexiques!
Mais curieusement, cette avalanche m’ennuie.
Ecrire des milliers de pages pour arriver à cette découverte si nouvelle (sic) : » Le genre est l’identité construite par l’environnement social des individus. La masculinité et la féminité ne sont pas des données naturelles mais le résultat de mécanismes de construction et de reproduction sociale… » Et s’il manquait le mot « seulement » avant « des données naturelles » ?
« On ne nait pas femme, on le devient » disait Simone de Beauvoir en 1949 et même…Durkheim en 1897 : « La division entre hommes et femmes n’est pas réductible à une différence biologique…. »
Tout en dénonçant cette construction sociale de la femme, cette catégorisation entre hommes et femmes, nos théoriciennes universitaires ajoutent des catégories aux « non catégories » que semblent être les hommes et les femmes : lesbiennes, gays, Bi, trans, queer, intersexes….
J’ai parfois envie de murmurer, imitant Galilée : et pourtant il y a aussi des hommes et des femmes, biologiquement différents et c’est pas désagréable !
Et Il me revient en mémoire ce livre d’Annie le Brun, « Lâchez tout »,critique acérée de l’idéologie féministe, paru en 1977 qui m’avait déjà fasciné à l’époque par son acuité, sa liberté, sa volonté de ne pas se laisser enfermer dans une nouvelle identité
Extraits ( entretiens, ouvrages) : « Il s’agit toujours du discours du même où l’identité est affirmée au détriment de l’individualité de sorte que le groupe doit prévaloir sur toute autre forme d’existence. » ou encore : » A un moment le refus d’obligation d’être se transforme en une nouvelle identité qui devient une autre obligation d’être. Là est le danger de toute revendication identitaire toujours en voie d’être relayée par un désir d’insertion sinon de pouvoir. Quant à la liberté des femmes, elle n’a aucun sens si elle n’est pas posée dans la perspective de la liberté de tous. »
Je ne renie pas le féminisme des années 70, nos révoltes, nos « meutes hurlantes » ( terme utilisé par Annie le Brun) mais le féminisme universitaire m’assomme. J’observe avec passion les mouvements de femmes dans les pays où elles sont victimes de discriminations intolérables ou de violences parfois impunies. Je sais aussi qu’il y a des combats à mener dans les pays occidentaux
Toutes les idéologies sont dangereuses, par leur prétention à asséner une vérité. Ce qui n’était qu’une révolte évidente contre les inégalités, les violences, les rôles imposés tend à devenir une idéologie, c’est à dire une interprétation du monde qui prétend représenter la vérité, une philosophie qui spécule sur des idées vagues et tend à rejeter violemment toutes celles et ceux qui émettent une critique.
* Certaines réactions de lectrices m’amènent à préciser ma pensée : Je pense que les luttes des femmes contre les discriminations, les inégalités, les violences etc…sont indispensables. Le développement de luttes sur tous les fronts ( poids,vêtements, obligation au mariage et aux enfants, accès à tous les métiers, égalité des salaires, parité, lutte contre le harcèlement…) en ce moment est remarquable. De même la reconnaissance d’identités sexuelles diverses est un progrès évident.
Ce que je vise dans cet article c’est La Théorie du genre développée notamment dans la recherche féministe universitaire.
« Etes-vous narcisso-phobique ? » (L’Express, Fevrier 2017)
Voici deux illustrations du narcissisme à près de cinq siècles de distance : Du Caravage au selfie.
A cette question (Etes-vous narcisso-phobique?) posée par la journaliste de l’Express à propos de l’ouvrage de Kristin Dombek : « The selfishness of others An essay on the fear of narcissism. », il est difficile de donner une réponse simpliste. Il faut sans doute être un peu narcissique pour prendre confiance en soi. Il est vrai aussi que nous sommes tous prêts à dénoncer le narcissisme d’autrui en oubliant le nôtre.
je ne pense pas non plus que les jeunes soient plus narcissiques que les vieux ou les moins jeunes.
Mais s’il faut toujours faire attention aux contradictions et à la complexité des choses humaines, il faut parfois être candide : Le narcissisme est une plaie qui nuit gravement à une forme d’harmonie sociale.
Le narcissisme, ce n’est pas seulement Instagram, snapshat, Facebook etc…c’est la non reconnaissance de l’existence de l’autre, l’idée que l’espace vous appartient , que votre désir ne peut être que celui de l’autre, que votre vision du monde est forcément la bonne. Cela peut aboutir à la négation pure et simple de l’Autre, du différent.
Ne pas dénoncer les dangers d’une extension du narcissisme, du repliement sur soi, de l’amour de soi, comme un danger, c’est le début du compromis, du « Après tout, c’est pas si grave »
Le narcissisme, le vrai, c’est la bêtise qui conduit à toutes les dérives.
Mes amies, mes galères…
La vieillesse, c’est aussi les amies qui disparaissent, celles qui perdent la tête, celles qui ne cessent de se plaindre, celles qui sont sourdes et enfermées dans leur monde.
Les amis mâles ont disparu depuis longtemps, peu intéressés par les vieilles dames , réfugiés sur leurs canapés devant la télé, auprès d’une épouse qui prend soin d’eux.
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Mais il reste des amies fidèles même s’il faut parfois prendre sur nous pour les supporter : Il y a celle qui se passionne pour son travail et vous considère avec un chouia de commisération, Il y a celle qui parle tant qu’il faut calculer à la seconde près le moment où l’on pourra en placer une. Il y a celle proche de vous quand elle va mal qui disparait quand elle va bien, il y a celle qui vous montre ses photos de voyage pendant une heure mais déclare qu’elle doit partir de toute urgence au moment où vous sortez ce maudit Iphone pour lui montrer les vôtres, il y a celle qui ne s’intéresse pas du tout à vos activités militantes, Il y a celles que l’on adore mais qui vivent à l’autre bout du monde, il y a celle qui aime le pouvoir et continue ses activités comme si la vieillesse n’était pas son problème, il y a celle que vous draguez avec constance mais qui est trop occupée pour vous voir …
Mais peu importe, toutes ces femmes sont vos amies, celles dont vous savez qu’elles seront là quand vous aurez besoin d’elles (sauf peut-être la dernière)
La vieillesse apprend à faire le tri pour ne pas être blessée inutilement. Elle nous apprend à mieux nous connaître, à savoir que nous avons les mêmes défauts ou d’autres encore pires, à taire nos susceptibilités pour profiter encore un peu de la chaleur de l’amitié, même un peu mal fichue!
Comme dit l’une de ces amies : « En pays de vieillesse, il se passe toujours quelque chose. »
Gerard Collomb ignore-t-il qu’il existe un Droit des étrangers ?
Gerard Collomb a déclaré au JDD le 6 août 2017 : » Les réfugiés doivent être accueillis plus rapidement et les migrants économiques effectivement reconduits pour empêcher qu’à terme le « Droit d’asile » soit remis en cause. »
Notre Ministre de l’intérieur, à priori macro-compatible, semble ignorer qu’il existe un CESEDA (Code sur l’entrée et le séjour des étrangers et le droit d’asile dont la dernière version date du 7 mars 2016). Dans sa première partie ce code prévoit l’accueil des étudiants, des malades, des travailleurs sous contrat, des conjoints de français, des parents d’enfants français, des immigrés résidant en France depuis plus de dix ans, des mineurs isolés, des femmes (ou petites filles) victimes de violences ou menacées d’excision…
S’agit-il pour Mr Collomb de supprimer cette loi ? (en supposant qu’en tant que ministre de l’intérieur, il en connaisse l’existence)
Là encore, il serait souhaitable que le gouvernement nous explique son Plan (l’ardente obligation selon le Général De Gaulle) en matière d’accueil de ces êtres humains que sont les migrants en France ou plus généralement en Europe.
« Il n’existe pas d’étrangers sur cette terre » (slogan de la CIMADE)
» Tout se défait », A propos de la vieillesse
Je me balade. Il parait qu’il faut faire 5000 pas par jour pour rester en forme. J’ai essayé de mettre l’application dite « Podomètre » sur mon téléphone mais je n’ai pas compris comment il fallait faire.
J’essaye de compter mes pas. J’ai mal dans le genou, à la hanche mais dans l’ensemble à 77 ans bientôt, je ne me sens pas trop mal.
Je croise des vieillards courbés en deux, des vieilles dames trop maigres ou trop grosses, les cheveux mal teints.
Je les trouve très moches, un peu ridicules.
Je pense : « quand je serai comme elles, je me suiciderai.
Puis dans le non-regard des gens que je croise, je me rends compte que je suis exactement comme ces vieux qui m’entourent :Mes cheveux sont blancs, j’ai des rides, Je boitille, je transpire, mes pieds me font souffrir., parfois je perds un peu l’équilibre… ça y est, je suis vieille. (hommage à Annie Saumont)
Tout se défait : le corps bien sûr, la mémoire, le désir, la coquetterie, l’envie d’agir…
Que faire avec ce constat : vivre comme si de rien n’était, se teindre les cheveux, s’habiller jeune…ou sombrer dans l’amertume, l’invisibilité (c’est le plus facile), l’abandon. l’immobilité, le retrait.
Il y a toujours une troisième voie, celle que je trace dans le précédent texte par exemple.
Des articles de ce blog sont et seront consacrés à cette recherche qu’une amie a appelé : Comment vieillir le moins mal possible ?
« Le Tao ne pose aucune question et ne donne aucune réponse »
Guy (Dhoquois) se passionne depuis plusieurs mois pour le Tao en écrivant des poèmes adaptés d’auteurs taoistes dans son blog ( localhost/auteurs2/guy.dhoquois. )
Moi, la pragmatique, la matérialiste un peu simpliste, la révoltée qui pousse son caillou depuis plus de 70 ans, sans arriver à grand chose, s’est sentie obligée de s’intéresser à cette philosophie chinoise dont l’un des textes principaux est le Tao te Ching attribué à Lao tseu et qui aurait été écrit vers le IV° siècle avant JC.
Je ne le regrette pas. Cette plongée dans une vision du monde totalement différente de la mienne, et que j’ai illustré par ce magnifique coquillage trouvé sur la plage, m’a permis de sortir (dans la mesure du possible) de ma petite philosophie de combattante contre les injustices.
On lit dans Wikipedia : » La recherche de la sagesse en Chine se fonde principalement sur l’harmonie. L’harmonie se trouve en plaçant son coeur et son esprit dans le Tao (la voie), c’est à dire dans la même voie que la nature. En retournant à l’authenticité primordiale et naturelle, en imitant la passivité féconde de la nature, l’homme peut se libérer des contraintes et son esprit peut « chevaucher les nuages ».
Voici l’un des poèmes de Guy publié le 29 juillet 2017 :
Le maître est un disciple
Qui ne cherche pas le succès
Et n’évite pas l’échec
Il n’essaie surtout pas de suivre le Tao
Silencieux il parle
S’il parle il ne dit rien
Il reste pur
Dans la poussière du monde
Le maître pense avoir raison
Au-delà du soleil
Il glisse l’univers sous son bras
Il laisse les confus rester confus
Dans la profusion chaotique des opinions
Il se satisfait de l’ignorance
Ne prend pas au sérieux les diverses distinctions
Il voit le monde constamment se disloquer
Il reste centré dans le tout
Il voit le monde changer sans fin
Il ne veut pas le voir différent
Je ne renoncerai ni à ma colère, ni à ma révolte, ni à mes combats, ni à mon matérialisme un peu étroit.
Mais cette rencontre avec le Tao m’a apporté une respiration, une ouverture, que je refusais jusqu’à présent.
Le privilège de l’âge ?