La piscine de la co-propriété

Je coule des jours tranquilles à Cabourg
Marcel P. écrivait que la situation du Grand Hôtel de Balbec sur la digue lui permettait enfin de sortir de chez lui sans craindre de tomber malade.
La mer nous entoure. Elle passe du bleu ciel, au vert puis au noir. Elle se confond parfois avec le ciel. Le soleil s’y couche en couleur
Cela ressemble au bonheur.

Heureusement, il y a les habitants estivaux de la résidence qui nous empêchent de prétendre à une béatitude stupide et ennuyeuse.Le coeur du conflit se focalise autour de la petite piscine chauffée.Elle aiguise les inimitiés entre les co-propriétaires et les locataires, voire les amis de ces derniers.
Untel habite-t-il notre résidence ? A-t-il le droit de pénétrer dans nos eaux territoriales et de s’y ébattre sans retenue ?
Les baigneurs s’observent. Ce môme qui trône sur une bouée géante et s’avance dangereusement vers mes brasses laborieuses, sans même me prêter attention, doit être un co-propriétaire en puissance. Cet autre perché sur un dauphin bleu de belle dimension n’est que locataire. En effet, sa mère le morigène et s’excuse auprès des vieilles dames qui font « leurs longueurs’ car c’est interdit par le règlement lui dit-elle.
Dans la résidence d’en face, quelques prolétaires à qui il ne reste que la mer regardent avec envie nos 40m2 d’eau chaude. « Il y en a en face qui viennent de temps en temps » me murmure en colère l’une des gardiennes co-propriétaire du temple.

Et puis chacun trouve ses marques, ses heures. La guerre de la piscine n’aura pas lieu, pas encore.

La propriété c’est le vol, la co-propriété c’est le vol en bande organisée.

« Pour triompher, le mal n’a besoin que de l’inaction des gens de bien » E. Burke

Rien de plus vrai.
Reste que « les gens de bien » (auxquels je me sens appartenir en toute absence de modestie) se demandent comment faire entendre leur voix(e) au milieu de la cacophonie ambiante dès que se présente une situation plus dramatique que d’habitude entre Israéliens et Palestiniens, en l’occurrence le Hamas.
Prendre position pour la paix entre deux Etats vivant côte à côte sur le même territoire vous enferme dans des groupes comme J.Call ou La Paix Maintenant qui ont le mérite d’exister mais représentent une sensibilité sioniste dans laquelle l’auteure de ces lignes et bien d’autres ne se reconnaissent pas.
S’enflammer pour la cause palestinienne vous entraîne sur des pentes dangereuses comme, entre autres, un accord de fait avec le Hamas qui a pour conséquence une marginalisation de Mahmoud Abbas, une forme d’obsession antisioniste qui confine à l’antisémitisme et un mépris affiché pour la sécurité d’Israêl.
Il arrive alors que « les gens de bien » se lassent et soient tentés par l’inaction ou plus vulgairement : »Après tout, ce n’est pas mon problème ! »
Comment se sortir de cette contradiction : se considérer comme un citoyen du monde forcément concerné par toutes les horreurs (et les bonheurs) qui s’y déroulent OU faire partie de cette immense confrérie des « je n’ai rien vu, je n’étais pas là ! »
« Les gens de bien  » peuvent aussi se prendre à rêver de manifestations non ethniques qui dénonceraient aussi bien la colonisation israélienne que les 170000 morts syriens, les milliers de morts pris dans des conflits entre musulmans, les milliers de femmes violées lors de conflits armés comme au Nord Kivu etc…
C’est beaucoup demander à l’honnête homme/femme qui, inaudible, laisse le champ libre aux unilatéraux de tout poil .

De Staël : le peintre qui n’aimait pas les catégories

Le MUMA du Havre organise pour le centenaire de la naissance de Nicolas de Staël une exposition sur le thème : Lumières du Nord, Lumières du Sud.
Les 130 tableaux exposés dans ce musée qui fait face à la mer et au port du Havre racontent les plages du nord aux couleurs bleues, grises et blanches et les paysages du sud aux couleurs orange et rouge.
Ce qui m’a passionné quand j’ai commencé à aimer De Staël, notamment lors d’une rétrospective en 2003 au Centre Pompidou, c’est son art de se maintenir entre l’abstraction et le figuratif. Critiqué de manière virulente par les idéologues de l’abstraction, il avait parlé avec humour du « gang de l’abstraction avant »
Interrogé sur cette séparation entre les deux écoles, il répondit : »Je n’oppose pas la peinture abstraite à la peinture figurative. Une peinture devrait être à la fois abstraite et figurative. Abstraite, en tant que mur, figurative en tant que représentation d’un espace. »(1952)

Les Américains, sauveurs suprêmes de la paix au moyen-Orient ?

J’ecoutais ce matin, Ilan Greilsammer, un politologue du Camp de la paix israélien et notre infatigable Leîla Shahid parler du conflit israélo-palestinien sur France-Inter.
Enième dialogue de sourds entre spécialistes qui n’ignorent rien des processus de Madrid, de Genève et autres échecs patentés des tentatives de médiations internationales.

Le discours de notre pacifiste peut se résumer ainsi : Israêl est un pays démocratique et a élu lors d’élections libres Netanyahu. Celui-ci s’est entouré de gens de droite et d’extrême droite pour parfaire une politique de colonisation de la Cisjordanie et résister à toutes les tentatives de médiation dont celle de John Kerry, qui n’a pas ménagé sa peine. Ilan Greilsammer l’accuse cependant d’être venu « se promener au Moyen Orient »
Le camp de la paix attend-il des Etats Unis qu’ils coupent les vivres à l’Etat d’Israêl ? Probablement pas.
On ne peut rien contre un vote démocratique continue notre pacifiste, donc on ne peut pas faire la paix tout seuls. Il faut donc qu’Américains et Européens la fassent à notre place !
Discours sidérant qui s’accompagne d’ailleurs de critiques systématiques de la politique américaine qu’elle soit interventionniste ou non.

Ou bien les Israéliens veulent la paix et acceptent la coexistence de deux Etats dans les frontières de 1967 et une indemnisation des réfugiés palestiniens, alors ils votent pour un gouvernement courageux qui arrêtera la colonisation et nouera des relations pacifiques avec ses voisins arabes qui le souhaitent. Les autres, dont le Hamas, s’ils persistent à vouloir la destruction d’Israël seront combattus avec fermeté avec toutes les horribles bavures que cela suppose. Là encore, aux Gazaouites de prendre leurs responsabilités.

Cette déclaration d’irresponsabilité qui peut se résumer ainsi : « on voudrait faire la paix, mais les Arabes sont méchants avec nous et on a peur », n’est pas digne de gens qui se disent démocrates et pétris d’idéal.

Carlo Strenger, Professeur de psychologie à l’Université de Tel-Aviv, dans un article intitulé : »Israël, les obstacles psychologiques à la paix », publié dans Ha’aretz et traduit par La Paix Maintenant, accuse le camp de la paix en Israël ( auquel il appartient) de n’avoir pas assez tenu compte de trois mécanismes universels qui structurent la psychologie des peuples : la peur de la perte, le besoin de forger le récit d’une identité positive et le besoin d’une idéologie (sioniste ?) qui les aide à affronter les dangers (réels) qui les menacent.

Cette analyse est juste pour tous les peuples et en particulier pour le peuple israélien. Mais elle ne doit pas servir de prétexte à l’immobilisme. La plupart des êtres humains connaissent la peur de la perte. Ca ne doit pas les empêcher de préférer la paix à la guerre, la justice à l’injustice.

Comme aimait à le répéter Pierre Mendès-France à la suite de Nahum Goldman : On fait la paix avec ses ennemis.

Vacances à Balbec

« Le soir il remonte dans la campagne, et de ses jardins il ne distingue plus la mer et le ciel qui se confondent. Il lui semble pourtant que cette ligne brillante les sépare: au dessus, c’est bien le ciel. C’est bien le ciel, cette légère ceinture d’azur pâle, et la mer mouille seulement ses franges d’or. »
(Marcel Proust, Choses normandes, Septembre 1891

Merci Renaud

J’ai regardé hier sur W9 un documentaire passionnant sur le chanteur Renaud, « Le rouge et le noir »
Ses chansons ont enchanté nos voyages familiaux en voiture : « Société, tu m’auras pas », « Hexagone », « Germaine » etc
Grâce à lui, nous retrouvions et transmettions à notre fille cette révolte anarchisante certes un peu basique mais tonique.
Puis Renaud a grandi, est devenu plus humaniste, mais a gardé intacte sa révolte
Il parle bien de cette fêlure en lui qui n’est pas une peur de la mort mais une peur de la vie et de ses blessures.

Merci Renaud, bon courage et faites nous de belles chansons

Et si nos politiques étaient des saints ?

Quand toute tentative de réforme se heurte à des grèves aussi incompréhensibles que couteuses
Quand la négociation sociale échoue à cause de stratégies de pouvoir dans les syndicats
Quand l’opposition ne fait que s’opposer
Quand une partie de la majorité pinaille
Quand les partis se vident de militants
Quand le pays le plus puissant du monde ne peut pas interdire la possession d’armes létales
…etc

Je me dis qu’il faut être une sorte de saint pour vouloir assumer des responsabilités politiques