J’ai commencé à m’intéresser à la vie politique et sociale en 1956. J’avais 16 ans. Cela fait 20805 jours que je me pose des questions. Certaines ont été en partie résolues, comme une forme d’égalité entre hommes et femmes (encore insuffisante), la possibilité pour les femmes d’avoir accès à la contraception et à l’IVG, la fin du colonialisme.
La plupart des autres n’ont pas trouvé de réponse. En voici une liste non exhaustive :
– Pourquoi est-il si dur de construire une société socialiste et humaine ou au minimum moins mal foutue ?
– Le monothéisme ou pourquoi croire en quelqu’un que l’on n’a jamais vu ?
– Pourquoi Dieu n’aime-t-il pas les cheveux des femmes ?
– Pourquoi faudrait-il mourir dans la souffrance morale ou physique ?
– Pourquoi détester celui qui n’est pas comme vous ? et éventuellement le massacrer ?
– Pourquoi est-on contents après une rencontre où l’on n’a pas écouté l’autre ?
– Pourquoi certains hommes disent-ils qu’ils ne comprennent rien aux femmes ? Ont-ils saisi la complexité des hommes ?
-Pourquoi la monogamie ?
-Pourquoi les batailles d’Ego y compris dans des groupes où il n’y a pas d’enjeux ?
– Pourquoi vouloir le pouvoir si l’on n’en fait rien de bien ?
– Pourquoi les amitiés se terminent-elles ?
– Pourquoi depuis 60 ans n’arrive-t-on pas à élaborer un plan cohérent de construction d’habitat social ?
– Pourquoi les enfants français parlent-ils toujours aussi mal les langues étrangères ?
– Pourquoi les cartables sont-ils toujours aussi lourds ?
– Pourquoi les fonctionnaires de la DDE ne prennent-ils jamais leur voiture pour vérifier les panneaux de signalisation ?
– Pourquoi tant de médecins sont-ils désagréables et manquent-ils si souvent de psychologie ?
– Pourquoi fait-on tant de lois en France ?
– Pourquoi le syndicalisme français n’est-il pas unifié, plus de vingt ans après la chute du mur de Berlin ?
– Pourquoi y-a-t-il toujours des imbéciles qui gênent les coureurs du Tour de France ?
– Pourquoi ne pas aller au fond de l’autobus quand il est bondé ?
– Et puis quelques questions de détail : Pourquoi la guerre économique, pourquoi les guerres ?
J’en ai marre des « LES »

Catégoriser les gens selon l’une de leurs caractéristiques et en déduire des conséquences soit laudatives soit insultantes pour lesdites gens est une manie très répandue qui évite de penser.
Certaines personnes utilisent ce « LES » à tort et à travers.
Comment imaginer qu’un être humain se réduise à l’une de ses « identités » : Je me sens femme et homme, juive née dans un pays majoritairement chrétien, laïque,française, parisienne, new-yorkaise, athée, de gauche, parfois de droite, vieille mais jeune, ou jeune mais vieille, …
A part quelques imbéciles (assez nombreux), qui peut dire qu’il n’a qu’une seule identité ? Comment peut-on se réclamer d’une telle étroitesse dans un monde ouvert, grâce à Internet, au cinéma, à la télévision, aux livres, au tourisme, à la musique, au sport…
Comment peut-on s’apitoyer sur sa petite identité malheureuse et chétive ? Une identité plurielle est le seul remède à cette maladie de l’Ego.
Cours camarade, le vieux monde est derrière toi.
Accueil des réfugiés syriens
Ils ont la cinquantaine.
Ils sont épuisés
Ils sont arrivés à Paris de Syrie en Juillet avec leur trois enfants adolescents
Ils espéraient pouvoir revenir chez eux mais la guerre continue et leur appartement est situé dans une zone souvent bombardée.
Ils étaient enseignants en Syrie
Ils ont fait plusieurs fois la queue à la préfecture pour déposer leur demande d’asile, mais ont été refoulés au guichet. Trop tard « on ferme »
Elle demande timidement s’ils peuvent recevoir une aide
Je réponds qu’ils doivent déposer d’abord leur demande d’asile et pour cela revenir à notre permanence asile la semaine prochaine
Elle éclate en sanglots
J’ai envie de pleurer mais je me contrôle. J’ai honte.
Après les grandes déclarations guerrières du Président Hollande au début de cette année non suivies d’actes, la France pourrait appliquer de manière plus humaine la Protection subsidiaire qui a remplacé l’asile territorial pour les personnes vivant dans des pays en guerre notamment. Certes la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde mais elle pourrait alléger le poids que constitue l’afflux des réfugiés syriens au Liban, en Turquie et en Jordanie.
Youpi, l’Europe sociale avance
Mme Merkel vient d’être obligée d’accepter à l’issue des négociations avec les socio-démocrates allemands, l’instauration d’un SMIC autour de 8 euros de l’heure.
C’est un petit pas pour les travailleurs mais un grand pas dans la construction européenne …C’est à force de petits pas que l’on avance.
Bonnet d’âne pour l’Europe sociale
En 1997 le Traité de Nice instaurait le vote à la majorité qualifiée dans certains domaines. Restaient votés à l’unanimité les mesures d’harmonisation dans le domaine de la sécurité sociale et de la protection sociale. Le Traité d’Amsterdam et le Traité de Lisbonne ont étendu la majorité qualifiée à d’autres questions mais ont laissé l’unanimité comme règle pour les questions sociales.
Comment s’étonner ensuite du dumping social quand on voit par exemple que le SMIC n’existe pas dans la plupart des pays européens et que la protection sociale y est le plus souvent moins développée qu’en France ? (ceci serait bien sûr à nuancer)
Rappelons qu’un million de travailleurs sont détachés en Europe dont la majorité dans le BTP , l’Agriculture et les transports.
En 1996, une Directive « Détachement » a vu le jour: elle établissait un ensemble de règles obligatoires relatives aux conditions de travail d’un travailleur détaché dans un autre Etat membre. Ainsi, si un Etat membre prévoit des conditions d’emploi minimales, ces dernières doivent s’appliquer aux travailleurs détachés. Cela concerne la durée du travail, le repos hebdomadaire, la rémunération minimale, les congés payés.
Cette Directive ne concerne pas les prestations sociales
Par ailleurs, les contrôles effectués sur son application sont rares voire inexistants.
C’est pourquoi les ministres européens voulaient réformer en cette fin d’année cette Directive pour éviter les abus. Aucun accord n’étant intervenu, la négociation a été remise.
La France, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Belgique sont pour une réforme qui permette de donner à l’UE des outils juridiques qui l’autorisent à lutter efficacement contre les abus frauduleux des détachements.
Par contre la plupart des anciens pays de l’Est ainsi que le Royaume Uni sont opposés à un surcroit de règlementation;
L’Allemagne a une position ambigue (en cours de négociation entre Angela Merkel et les socio-démocrates). En effet l’absence de SMIC en Allemagne lui permet de rémunérer très peu des travailleurs venus de l’Est notamment dans l’agro-alimentaire. Qui plus est, si la durée de leur contrat est inférieure à 24 mois, les charges à payer sont celles du pays d’origine.
Cette absence d’Europe sociale qui établit une concurrence entre les travailleurs des 28 pays européens est un serpent de mer qui montre l’une des failles de la construction européenne. Elle ne peut que favoriser l’europhobie .
Pour les gens de ma génération, après les deux guerres mondiales fondées, entre autres causes, sur un nationalisme étroit , la construction européenne était un rêve. Celui-ci risque de s’écrouler du fait même de l’incapacité des pays membres à sortir de leurs égoïsmes nationaux et de l’absence d’instances politiques en mesure de les y obliger.
Montebourg connait-il l’existence de l’Inspection du travail?

Interrogé sur France Inter la semaine dernière, notre pétillant ministre du redressement productif répondait aux questions des auditeurs. L’un d’entre eux, artisan ou petit entrepreneur se plaignait des contrôles administratifs multiples et citait l’inspection du travail comme exemple.
Notre ministre « de gauche » ne s’émut guère de cette remarque. Il se déclara d’accord avec son interlocuteur sur l’excès des procédures administratives, ne fit aucune allusion au rôle éventuellement positif de l’Inspection du travail pour faire respecter la législation du travail et partit dans une tirade contre la multiplicité des règles environnementales.
Les 20% de personnes qui en France tentent encore de défendre ce gouvernement commencent à se lasser.
Même si l’on estime que le trop plein d’avantages sociaux nuit à la compétitivité de la France (encore faudrait-il oser le dire et le prouver), comment accepter que soit remise en cause l’une des seules institutions qui tente de faire respecter le droit des travailleurs dans un pays où 8% de travailleurs sont syndiqués !
Il faut rappeler quelques chiffres à propos de ce corps de l’Inspection du travail créé à la fin du XIX ° siècle : 800 inspecteurs et 1500 contrôleurs sont censés contrôler plus de 18 millions de salariés du secteur privé.
Ils sont souvent l’objet d’insultes, d’agressions lors de leurs visites. Il y a même eu deux morts il y a quelques années( le 2 septembre 2004 à Saussignac en Dordogne). Les suicides n’y sont pas rares.
Une réforme est en cours qui permettrait aux inspecteurs d’infliger directement des amendes aux employeurs au lieu de faire des PV jugés au pénal dont plus de la moitié sont classés sans suite et dont 2% seulement aboutissent à une condamnation à l’issue de procédures très longues). On ne peut semble-t-il que se féliciter de cette réforme.
Par contre des inspecteurs du travail sont en grève contre une partie de ce projet de loi qui prévoit le regroupement de 8 à 12 agents dans des « Unités de contrôle » qui devront rendre compte à un responsable
Ils estiment que l’indépendance de l’inspection du travail est remise en cause.(Voir le Blog d’un inspecteur du travail déjà cité- thotmania)
Un autre aspect de la réforme me parait grave, c’est la limitation du nombre des priorités assignées aux agents. L’une de ces priorités est la lutte contre le travail illégal. Haro sur les sans-papiers, dont il faut rappeler qu’ils sont nombreux dans des secteurs délaissés par les franco-européens, notamment les Hôtels cafés restaurants.
Il faut peut-être revenir sur le droit du travail acquis, acquérir plus de flexibilité. Mais alors, Messieurs qui nous gouvernez ayez le courage de le dire et de l’organiser.
Quant aux bonnets de toutes les couleurs, ont-ils oublié que les impôts financent aussi une protection sociale remarquable.
Il semble que nous ne puissions pas sortir actuellement du capitalisme. Or le capitalisme veut dire association du capital et du travail.
Mais qu’est-ce qu’elles veulent ?
« Le féminisme, c’est dépassé. Vous avez tout maintenant, que voulez-vous encore ? »
Toutes les femmes qui affirment leur féminisme ont entendu cette remarque plus ou moins agacée de la part d’hommes (et de femmes) dont certains sont des « camarades de combat » pour telle ou telle cause.
Alors au fait que voulons-nous ?
Que les femmes ne soient plus harcelées ou battues parfois à mort.
Que les femmes ne soient plus violées.
Que les femmes ne soient pas victimes d’une image stéréotypée : belles, minces, élégantes ou au moins pulpeuses etc …qui les fait trop souvent souffrir
Que les femmes puissent être séduisantes, sans être l’objet de remarques sexistes et méprisantes.
Que l’on ne parle plus de CONCILIATION entre le travail professionnel et le travail domestique mais de partage
Que le plafond de verre disparaisse
Que les femmes puissent s’exprimer sans être interrompues, même si leur longue habitude de silence leur rend la parole publique difficile.
Que les portraits de femmes politiques ou célèbres ne débutent plus systématiquement par un descriptif anatomique ou vestimentaire.
Que la parité soit vraiment appliquée
Que l’IVG soit facile d’accès.
Que la prostitution ne soit plus considérée comme normale, même si aucune solution n’est parfaite.
Que les experts soient aussi des expertes aussi compétentes ou incompétentes que leurs collègues masculins
Que quand il n’y a que des hommes à une tribune, ces messieurs s’en étonnent au minimum et s’en exaspèrent et y remédient au maximum. (Bravo au Collectif féministe « La Barbe »)
Que les femmes qui rentrent seules chez elles le soir n’aient plus peur
Que les femmes puissent dire NON sans avoir peur
On me rétorquera que tout cela est acquis : Comme toujours c’est à la fois vrai et faux. Les chiffres parlent.
Chacune peut continuer cette liste qui concerne nos pays « démocratiques »
Dans le monde, la liste des violences contre les femmes serait trop longue, à commencer par le viol comme arme de guerre dans certains pays africains notamment.
Mais que l’on ne s’y trompe pas : ces violences, ces exclusions, ces humiliations ont la même racine : la virilité qui s’attaque aux plus faibles, le système patriarcal intouchable dans certains pays, le mâle dominant.
Tout cela paraitra ridicule je l’espère… dans quelques siècles.
! Au secours Olympe de Gouges, le machisme est toujours là
Encore Camus : A propos des nuances et de la politesse

Quand j’ai écrit sur l’exclusion, sur les petits abus de pouvoir quotidiens, sur la Politesse, c’est le fil ténu entre les plus petits comportements humains négateurs de l’existence même de l’Autre (Par ex :ce grand jeune homme qui l’autre jour dans le métro voulait ignorer la foule et restait assis sur un strapontin, étendant ses grandes jambes tout en lisant un article sur « la santé par les plantes ») et les petits ou grands meurtres que des êtres humains sont capables de commettre.
Ces petits meurtres peuvent commencer par l’ignorance et le mépris d’un(e) autre et continuer par le refus de catégories entières d’êtres humains.
La politesse pour moi n’a rien à voir avec les moeurs de l’Ancien Régime, même si elle y trouve son origine historique. Elle montre juste (et c’est déjà beaucoup) que j’ai VU l’autre , que j’ai conscience de son existence et de la fraternité ou de la sorrorité qui m’unit à elle ou à lui, parce qu’il/elle est un être humain.
Bien sûr, je ne dis pas que mon grand jeune homme affalé sur son strapontin va trucider ses voisins dès qu’il sera rentré chez lui !
Il s’agit juste par ce thème de la politesse de souligner des nuances qui peuvent profondément modifier notre quotidien et notre rapport à la violence, la différence que fait Camus entre l’énergie et la violence.
Camus : l’homme qui aimait la vie
J’ai découvert Albert Camus à l’âge de 16 ans.
Je l’ai lu avec passion. Il m’a aidé à vivre, à assumer mon éclectisme, mes angoisses et mes espoirs, mon désespoir sur la condition humaine et mon envie de ne pas laisser tomber.
Depuis quelques années, on l’encense.
Pendant les années « gauchistes », il a été traîné au ban des philosophes, qualifié de « petit bourgeois », de « colonialiste », de « belle âme ».
Camus ne prétendait pas refaire le monde : » Chaque génération sans doute se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde se défasse. »
Il ne croyait pas aux lendemains qui chantent mais il aimait passionnément la vie, l’amour, les femmes, la mer.
Il a voulu tout essayer, la réflexion philosophique, le roman, le théatre et la politique.
Camus m’a accompagné tout au long de ma vie militante. J’ai toujours refusé les idéologies qui reposaient sur l’idée que seule l’injustice de l’organisation sociale conduisait parfois les êtres humains vers le mal.
C’est peut être Camus qui m’a donné envie de
faire des études de droit après que j’ai lu cette phrase : » Nous sommes obligés de respecter en vous ce que vous ne respectez pas chez les autres. »

