De la cancel culture à la guerre

Anselm Kiefer-Chute d'étoiles

La guerre ignoble que vient de lancer Poutine contre l’Ukraine, vient rappeler à notre génération, une autre guerre, une autre dictature, une autre folie, dont il est difficile de guérir.

« Le vent violent de l’Histoire allait disperser à vau-l’eau notre jeunesse dérisoire, changer nos rires en sanglots. » (Jean Ferrat- Nul ne guérit de son enfance)

C’est une guerre surréaliste qui dégringole sur les Ukrainiens, comme elle s’est abattue sur la Syrie, sur l’Irak, sur le Yemen, la Lybie…

La liste est longue si l’on y ajoute les guerres civiles, les guerres entre ethnies.

Et pourtant, au lieu de réfléchir sur l’Histoire de notre planète, afin de tenter de la rendre plus pacifique, plus sociale, plus égalitaire, moins barricadée, nous nous abîmons dans des débats aussi inutiles que dérisoires, comme celui sur la cancel culture. L’Histoire ne fait pas rêver mais elle EST. Et ce qu’elle nous montre c’est que les êtres humains n’ont pas changé profondément. Ils restent minés par l’envie, le désir de possession, la domination, l’obsession du pouvoir.

Bien sûr, ils peuvent aussi être généreux, solidaires, affectueux , altruistes, bienveillants.

Dans quelques années, allons nous ostraciser, annuler Poutine, pour ses propos et ses actes inadmissibles et mortifères ? Certes, mais nous ne devons pas l’oublier, l’occulter. Il nous renvoie à notre misérable condition humaine. Il fait partie de l’Histoire.

.De même que nous ne devons oublier ni Hitler, ni Saddam Hussein, ni le général Massu, ni Bachar el Assad, ni Pinochet, ni Pétain…

il nous faut les conserver soigneusement dans notre mémoire historique, parce qu’ils ont écrit les pages les plus sombres de notre histoire et que ce qui se passe en Ukraine nous rappelle que la folie humaine peut exploser à tout moment.

Nous portons tous cette folie en nous : elle se manifeste à notre niveau : petites humiliations, harcèlements, jalousies, incivilités, oublis, isolement..

C’est le combat intellectuel de toute ma vie commencé en 1989 avec « Appartenance et exclusion. »L’Hypothèse est celle d’un lien ténu entre l’exclusion banale et quotidienne et les massacres les plus odieux. Elle rejoint une autre maladie humaine : celle qui consiste à faire semblant de ne pas voir les saloperies qui se passent autour de nous.

« Maison de retraite », un film sur la vieillesse.

Maison de retraite, 2021

Thomas Gilou (auteur de « La vérité si je mens »)

Un film pour grand public, avec de gros effets et de bons sentiments, sur un thème de plus en plus présent, la vieillesse.

Cela commence dans un orphelinat, le matin, avec 2 frères, (ou amis?). L’un peine à se lever, il se sent malade, l’autre est parfait, et secoue son cadet.

20 ans plus tard : l’aîné est devenu avocat, il est bien intégré dans la société, l’autre peine toujours à trouver sa voie dans la vie. Il fricote avec de mauvais garçons à qui il doit de l’argent et qui le menacent.

Caissier dans un supermarché, il se querelle avec une cliente vieille, lente, buttée – elle exige les articles promis dans des bons périmés – et perverse : elle fait doigt d’honneur sur doigt d’honneur en cachette du flic qu’elle a fait intervenir. Résultat : Milann s’énerve, casse la caisse, et est condamné à 200 jours de travail dans un EHPAD.

On nous montre les horreurs d’un EHPAD, et on ne lésine pas sur le dégoût de ces corps qui ont perdu la correction de l’éducation, et qu’il faut laver comme des bébés. On est mal à l’aise, tout comme Milann, affolé par ce qu’il doit faire. C’est une gageure pour le cinéma à venir : comment traiter de ces thèmes tabous et dérangeants ?

Heureusement pour nous, une histoire relationnelle s’engrange, lénifiante,rassurante : quand les choses vont au plus mal pour Milann – il est mis à la porte par son frère (ou ami?) – il est recueilli par une vieille de l’EHPAD qui a pitié de lui – il a été un enfant orphelin – et planqué dans une cave. Les membres les plus valides de l’EHPAD décident de le prendre en charge.

L’ancien champion de boxe (Gérard Depardieu) lui enseigne d’abord la civilité – savoir dire bonjour, savoir prendre en compte les autres – puis le combat, quand il est nécessaire – ne pas avoir peur, rester présent et attentif pour cogner. L’ancienne prof lui apporte des livres – il finira par se passionner pour « Le malade imaginaire » de Molière. Tous et toutes lui apprennent la vie.

C’est un itinéraire de rédemption, grâce à ces amitiés. Milann s’aperçoit que le directeur de l’EHPAD est un salopard qui profite de la vulnérabilité des pensionnaires pour hériter de leurs biens – ils ont tous été choisis sans familles. Milann sait déverrouiller une armoire avec un tourne-vis – sans doute un apprentissage de sa vie d’avant, et trouver les contrats compromettants. Pour qu’ils soient caduques, il faut que les pensionnaires quittent la Maison. Juste avant qu’il ne soit mis à la porte, Milann organise leur fuite, dans un autocar loué.

Suspense policier, poursuite du car par le méchant directeur, qui le coince, mais intervention surprise des mauvais garçons à qui Milann doit de l’argent, et dont le chef se révèle être le petit ami de la jolie aide-soignante noire qui s’est mise du côté du Bien.

La dette a été payée par l’ancien champion de boxe, absent de l’échappée, il était mort la veille d’une crise cardiaque.

Mais que faire de ce car de vieillards dépendants ?

La solution : les amener à l’orphelinat où Milann a été élevé. Vieillards sans familles, enfants sans parents, ils ont besoin les uns des autres.

Tout est bien qui finit bien.

Le directeur sera condamné, et on a trouvé la solution à la vieillesse dépendante.

Les mauvais garçons (plutôt basanés) ne sont pas si méchants qu’il y paraît, « mon frère ».

Le vieil homosexuel inconsolable témoigne de l’amour dans le couple homosexuel ; la crainte du kiné de révéler sa propre homosexualité se révèle dépassée, la société a changé.

Après les avoir exposés crûment, il n’est plus question des désagréments de la vieillesse. La seule mort présente est une « bonne mort », d’un seul coup, comme la plupart des gens la souhaitent.

Et même le monsieur Alzheimer – qui nous a bien faire rire avec Marthe Villalonga s’offrant à lui chaque soir sous l’identité d’une star prestigieuse, de Marylin à Madonna, puisqu’il n’a aucune mémoire – nous apprend finalement qu’il n’est pas Alzheimer, mais a trouvé pratique de le feindre.

Ajoutons pour finir que la spectatrice âgée que je suis est heureuse de retrouver les vedettes d’antan participer ainsi à la mise en société, à travers le cinéma, de ce problème difficile, toujours plus envahissant.

J. Feldman

Ou est passé le Haut Commissariat au Plan ?

Un Commissariat général du Plan avait été créé en 1946. Il était chargé de définir à titre indicatif la planification économique du pays notamment au travers de plans quinquennaux.

« Ardente obligation« , selon le Général de Gaulle, « intérêt stratégique des Plans qui donnent à l’Etat une vision claire des capacités de son économie » selon François Mitterand, il disparait cependant en 2006 et est remplacé, à l’initiative de Dominique de Villepin par le Centre d’analyse stratégique (CAS)

Pierre Massé,qui fut un brillant commissaire au Plan,estime en 1986 que «  supprimer le Plan au nom d’un libéralisme impulsif serait priver le pouvoir d’une de ses armes contre la dictature de l’instant. »

En 2020, le HAUT Commissariat au Plan est recréé. Le poste revient à François Bayrou, ainsi remercié pour son soutien au Président Macron.

Depuis, mystère ? Que fait-il ? Existe-t-il encore ? Selon Wikipedia, il produit des notes sur le COVID en particulier, mais aucune vision prospective sur l’industrialisation, le climat, la justice sociale, la représentation des travailleurs …etc

Cette « disparition » est à l’image de cette campagne électorale affligeante que nous vivons depuis quelques semaines : Un amoncellement de petites mesures, chiffrées au pif, sans parler du caractère ouvertement raciste de la campagne de certains candidat(e)s.

Le libéralisme a gagné et avec lui la dictature de l’argent, comme l’illustre avec brio le dernier film de Stéphane Brizé, « Un autre monde »

La responsabilité du Parti socialiste est immense dans cette catastrophe politico-économique. La réflexion sur le socialisme après 1989 n’a semble-t-il pas été menée par le Parti social-démocrate qui était le seul à pouvoir la penser. Il a ainsi laissé la place au populisme le plus répugnant .

Les couples m’énervent

Il porte les sacs, les valises. Elle marche à côté de lui, détendue, vaguement indifférente au monde qui l’entoure. Il va vers les merveilleuses nouvelles machines à enregistrer dont s’enorgueillissent tous les aéroports, pose ses bagages et s’apprête à affronter cette machine qui me terrorise, sans aucune appréhension. Elle s’accoude à une barrière, un peu plus loin, ne lui jette pas un regard, observe les voyageurs et baille avec grâce.

Tiens les revoilà, les mêmes ou presque au musée, pendant qu’énervée, j’essaye de retrouver mon billet sur mon téléphone. Elle regarde l’affiche de l’exposition. Il fait la queue au guichet. Elle arbore aussi cette légère fatigue, qui laisse penser à l’horrible envieuse que je suis, qu’elle sort d’une sieste amoureuse.

« Et moi je marche seule… » comme dit la chanson.

Et dire que pendant des années, j’ai dû leur ressembler, ronronnante dans mon couple, indifférente, mais répétant qu’il « était vital de se mettre à la place des autres! » …en oubliant juste de donner le coup de téléphone qui sauve parfois une journée de solitude.

Je dois avouer qu’il m’arrive de haïr les couples, leurs certitudes, leur complicité apparente, leur imperméabilité à tout ce qui n’est pas eux.

Et pourtant je connais les disputes, les égoïsmes, la haine parfois, qui pourrissent la vie de tant de couples.

Toute société génère ses modèles : ne pas y correspondre peut signifier une petite mort sociale.

Au fond il y a une analogie entre le bouc-émissaire et le modèle : tous les deux produisent de l’exclusion.

 » Nos aînés » sont à la mode

Pietro Bellotti

Scandales Orpea, Koryan,… Coucou , les vieux et vieilles  envahissent l’espace social. Ils vivent de plus en plus vieux et entre nous, ils n’ont plus cette merveilleuse fraicheur de la jeunesse !ils peuvent être répugnants mais ces vieillard(e)s tiennent à la vie. Je ne comprends pas très bien pourquoi mais après tout, ça occupe.

D’autres, dont je suis, ne vous demandent qu’une toute petite chose : quand vous vous lamentez sur le sort de « nos ainés », n’oubliez pas ceux qui ne vous demandent qu’une chose : mourir quand ils l’auront décidé, sereinement, sans peser sur personne, sans souffrir.

Osez sortir de votre lâcheté, ou de vos soi-disant convictions religieuses ou serments et reconnaissez aux vieillards malades et dépendants QUI LE SOUHAITENT le DROIT AU SUICIDE ASSISTE car la grande vieillesse est une maladie incurable.

Pardonnez-moi si la perspective d’avoir de belles couches, un fauteuil roulant en état de marche, une charmante dame qui me lave les pieds…, des animations débiles, ne correspond pas vraiment à ma conception de la vie.

Evoquer la mort n’a rien de choquant. Eviter d’en parler est tout simplement débile

« Philosopher c’est apprendre à mourir » disait Montaigne

Il y a des moyens moins risqués pour « tuer » une femme

Elle est digne. Elle raconte son quotidien, les querelles fréquentes avec son mari. Puis arrive le confinement, la promiscuité, les quatre enfants. Monsieur devient de plus en plus violent. il dit qu’il n’a jamais voulu les deux derniers enfants, qu’ils ne sont pas les siens.

Elle éclate en sanglots. Elle dit qu’elle a un travail qu’elle aime, un CDI qu’elle ne peut pas reprendre puisqu’elle doit s’occuper des enfants et notamment du dernier venu.

Elle raconte qu’elle n’a pas d’argent, qu’elle n’en peut plus, qu’il n’a jamais rien fait à la maison mais que là avec les enfants, elle craque. Elle pleure. Elle hurle qu’elle est encore jeune, qu’elle voudrait avoir le temps de vivre, sans ces cris, ces violences verbales.

Elle supplie : je veux simplement vivre une vie normale, aller au cinéma, lire, voyager, et surtout écouter de la musique même si ce n’est pas « haram », bref profiter de la vie.

Cet homme que j’ai cru aimer me confisque ma vie. Aidez-moi à la récupérer

Le racisme est universel

Alain Mabanckou est un monsieur tout à fait respectable, coauteur d’un remarquable documentaire sur le thème :Être noir en France, entre autres.
Mais en ces temps de dénonciation permanente entre intellos racisés, décoloniaux et intersectionnels et intellos « universalistes », son article dans le Nouvel Obs du 13/01/2022 pose problème : Il y parle du génocide au Rwanda, des génocidaires habillés en rose employés au nettoyage de Kigali (en 2008). Et il a cette phrase : « Les passants ont le visage de ceux à qui ils ont retiré la vie pour des mobiles qui remontaient à la colonisation du pays. »  » « Nous autres Africains nous sommes laissé berner par ces théories nées de la pensée occidentale dont le dessein subreptice était de semer la division afin de mieux asseoir les colonies. »
Il y a du vrai dans cette remarque mais il y a aussi un simplisme navrant.
Ainsi si l’on en croit cette analyse, les Africains ne sont pas racistes, les vietnamiens non plus, les Indiens encore moins…. C’est le méchant colonisateur blanc qui les a contraint à s’entretuer.
Il y aurait eu une sorte de pureté naturelle, d’amour universel avant la colonisation.
Et c’est justement parce que je ne crois pas en la bonté naturelle des êtres humains, hommes ou femmes, que je me revendique de l’Universalisme. Pour moi, il s’agit de tendre, par un effort sur nos préjugés, vers (non pas l’amour) mais l’acceptation de l’Autre.
Avant de désigner des bouc-émissaires (dont je reconnais bien sûr la responsabilité), il faudrait peut-être tenter d’agir sur nous mêmes, nos refus, notre bêtise, notre ignorance. Et ceci ne concerne pas que le mâle blanc dominant.

Cela fait deux ans et sept mois que Guy Dhoquois est mort

guy Dhoquois

« Je suis une mutilée qui continue à avoir mal à sa jambe amputée » (Roland Barthes)
La tristesse ne s’atténue pas. Simplement on vit avec.
Et on vit mal sans amour.
Avant, cette obsession de l’amour m’exaspérait. Maintenant, je la comprends.
Je pensais qu’aimer l’humanité, travailler pour qu’advienne la justice dans ce monde, était une raison de vivre.
C’était une illusion.
L’humanité n’est pas aimable.
Alors, Man lebt (on vit) et on se demande avec Roland Barthes (Le journal de deuil) : « Quelle barbarie de ne pas croire aux âmes, à l’immortalité des âmes! Quelle imbécile vérité que le matérialisme. »

A bientôt

Est-ce que ça vaut bien le coup de vivre pour s’énerver sur un ordinateur ?

On a beau être vieille, on a encore envie de voyager, d’aller au théatre, au musée ou plutôt il faut tout faire pour ne pas sentir l’ennui et l’amertume nous envahir. Il faut s’occuper. L’essentiel est de remplir son agenda.
Jusque là, tout va bien. Mais les choses se gâtent quand il faut par exemple réserver un voyage sur internet.Je me suis aperçue que pour dix jours au soleil, j’avais passé grosso modo deux jours à m’énerver sur mon ordinateur : je réserve un AR pour Toulon sans trop réfléchir. La nuit je me réveille, persuadée que mon code de carte visa a été récupéré par des bandits et que en plus il va me falloir me lever à 4h du matin si je veux prendre l’avion à 7h30 pour rejoindre Toulon.
Dès le lendemain matin, je joue la vieille dame éplorée auprès des agences de voyage de mon quartier : les unes m’envoient me faire voir ailleurs, les autres me disent d’aller sur leur merveilleux site internet.
Je passe environ deux heures à tenter de changer l’horaire : impossible, mes identifiants sont inconnus et je n’ai pas repéré un passage clouté.
Je suis au bord de la crise de nerf quand j’essaye un numéro de téléphone qui se balade sur l’écran.
Ouf, c’était le bon : la dame charmante me change la réservation mais il me faudra payer 20 euros de plus.
Jusque là tout va bien.
Je reçois le mel en question et m’apprête à payer.
Que nenni : j’ai beau essayer toutes sortes d’écritures pour la date de mon départ, ce foutu algorithme ne me connait pas ! et ma connaissance parfaite des passages piétons ne le rassure pas.
Au bout de deux heures de cette passionnante aventure, je prends ma voix de petite vieille apeurée et rappelle le numéro miraculeux;
J’énerve profondément ma nouvelle interlocutrice qui après plusieurs silences me dit d’un ton énervé qu’exceptionnellement , elle va faire le changement et le paiement à ma place.
Après, bien sûr, mon imprimante tombe en panne etc etc

La question est alors : A 81 ans, ayant eu une vie plutôt heureuse malgré des débuts déprimants dans les années 40, est-il nécessaire de s’ennuyer autant avec des objets sans âme que je ne maitriserai jamais.
Est-il nécessaire également de passer autant de temps à penser qu’il faut faire de la gymnastique et éventuellement de la faire ou de se trainer chez un rhumatologue ou un kiné qui font plus ou moins semblant de vous soigner ?
Nous n’attendons pas tous la même chose de la vie : Pour moi la vie c’était l’amour de mon compagnon, la lutte sociale et associative, la joie de découvrir des paysages nouveaux, des pays inconnus, la passion de la mer, le plaisir de découvrir de nouveaux livres…
Mon compagnon s’en est allé, la mémoire qui s’envole et la numérisation m’empêchent de faire un bon travail associatif, les voyages fatiguent avant (cf plus haut) et pendant et les violences empêchent d’aller dans certains lieux, la mer est de plus en plus froide et les vagues de plus en plus fortes (!) et les nouveaux livres ont parfois un gout de déjà lu…

Je pourrais choisir de quitter ce monde, comme tant de gens l’ont fait sans mendier une pilule magique à un Etat hypocrite et je ne le fais pas.
Je continue à survivre. Je ne suis ni triste ni déprimée. Je ne déteste pas la solitude. Les êtres humains m’ennuient et c’est parfois réciproque.
Je n’ai pas peur de la mort et pourtant j’attends. J’attends la maladie, la dépendance, qui ne manqueront pas d’arriver.
Pourquoi ?

Mea Culpa : à propos de « La question qui tue » de Sophia Aram

Tous ces chauffeurs de taxis à qui j’ai demandé :  » d’où êtes-vous originaires ? » et avec qui j’ai appris tant de choses sur Haiti, la Tunisie… etc
Bien sûr, il y a eu celui qui m’a répondu froidement : « La Courneuve » , Ok, j’ai compris Monsieur.
J’aime beaucoup Sophia Aram. Elle est l’une des humoristes les plus fines que je connaisse.
Mais sa « question qui tue » m’a fait à la fois culpabiliser ( suis-je raciste ?) et me révolter.
La France est un pays d’immigration. En tant que juive à moitié roumaine, à moitié algérienne, blanche (désolée), en tant qu’ancienne bénévole à la CIMADE, la mixité m’a toujours intéressée.
J’ai envie de connaitre ces parcours improbables, ces pays traversés en touriste émerveillée que d’autres quittent la peur au ventre .
Je sais que la plupart de ces gens sont français et alors ?

Mais si vous, Sophia Aram, le ressentez comme une insulte, alors je ne poserai plus cette question et le voyage sera silencieux ou banal.
Sommes-nous arrivés à un niveau de racisme tel que toute intrusion dans l’histoire de gens rencontrés par hasard apparait comme une négation de son identité de Français ?
En Mai 68, nous étions tous « des juifs allemands ». En Mai 2021, l’Universalisme a perdu la bataille.
Il est temps pour la vieille dame que je suis de se retirer sur la pointe des pieds.