C., 95 ans me téléphone, elle a vu son cardiologue, qui n’est pas d’accord avec son généraliste, gériatre. Elle a une tension trop basse, elle ne doit pas prendre de diurétiques à midi, elle ne doit pas boire plus d’un litre d’eau par jour.
Il lui a demandé :
– Qui voulez-vous suivre ? votre cardiologue ou votre généraliste ?
Elle a répondu, bien sûr, mon cardiologue.
Mais elle est très embêtée.
Il a écrit une lettre au généraliste-le très sympathique Dr M. aux cheveux longs et à la moto qui se déplace à domicile et sait écouter ses patients, et que j’aimerais bien avoir comme médecin traitant, mais il ne prend plus de patients.- Une lettre dans une enveloppe fermée.
J’essaie d’imaginer ce que pourrait être une discussion entre les deux médecins :
– Cher collègue, décidons ensemble de quoi cette vieille dame fort sympathique et courageuse devrait mourir : mort subite, IVC épouvantable, continuation de la détérioration générale lente, avec chaque fois un nouveau problème à traiter…
Je ne suis pas médecin. Mais voila le type de discussion que j’aimerais voir devenir publique. Il en va de la philosophie de la vie, de la maladie , de la mort, qui nous concerne tous. Ces problèmes sont à discuter ensemble, médecins et patients.
(Jacqueline Feldman est co-autrice avec moi du livre : Ma vie en vieille et le droit d’en choisir la fin – Paris 2022, Les Impliqués)