Maison de retraite, 2021
Thomas Gilou (auteur de « La vérité si je mens »)
Un film pour grand public, avec de gros effets et de bons sentiments, sur un thème de plus en plus présent, la vieillesse.
Cela commence dans un orphelinat, le matin, avec 2 frères, (ou amis?). L’un peine à se lever, il se sent malade, l’autre est parfait, et secoue son cadet.
20 ans plus tard : l’aîné est devenu avocat, il est bien intégré dans la société, l’autre peine toujours à trouver sa voie dans la vie. Il fricote avec de mauvais garçons à qui il doit de l’argent et qui le menacent.
Caissier dans un supermarché, il se querelle avec une cliente vieille, lente, buttée – elle exige les articles promis dans des bons périmés – et perverse : elle fait doigt d’honneur sur doigt d’honneur en cachette du flic qu’elle a fait intervenir. Résultat : Milann s’énerve, casse la caisse, et est condamné à 200 jours de travail dans un EHPAD.
On nous montre les horreurs d’un EHPAD, et on ne lésine pas sur le dégoût de ces corps qui ont perdu la correction de l’éducation, et qu’il faut laver comme des bébés. On est mal à l’aise, tout comme Milann, affolé par ce qu’il doit faire. C’est une gageure pour le cinéma à venir : comment traiter de ces thèmes tabous et dérangeants ?
Heureusement pour nous, une histoire relationnelle s’engrange, lénifiante,rassurante : quand les choses vont au plus mal pour Milann – il est mis à la porte par son frère (ou ami?) – il est recueilli par une vieille de l’EHPAD qui a pitié de lui – il a été un enfant orphelin – et planqué dans une cave. Les membres les plus valides de l’EHPAD décident de le prendre en charge.
L’ancien champion de boxe (Gérard Depardieu) lui enseigne d’abord la civilité – savoir dire bonjour, savoir prendre en compte les autres – puis le combat, quand il est nécessaire – ne pas avoir peur, rester présent et attentif pour cogner. L’ancienne prof lui apporte des livres – il finira par se passionner pour « Le malade imaginaire » de Molière. Tous et toutes lui apprennent la vie.
C’est un itinéraire de rédemption, grâce à ces amitiés. Milann s’aperçoit que le directeur de l’EHPAD est un salopard qui profite de la vulnérabilité des pensionnaires pour hériter de leurs biens – ils ont tous été choisis sans familles. Milann sait déverrouiller une armoire avec un tourne-vis – sans doute un apprentissage de sa vie d’avant, et trouver les contrats compromettants. Pour qu’ils soient caduques, il faut que les pensionnaires quittent la Maison. Juste avant qu’il ne soit mis à la porte, Milann organise leur fuite, dans un autocar loué.
Suspense policier, poursuite du car par le méchant directeur, qui le coince, mais intervention surprise des mauvais garçons à qui Milann doit de l’argent, et dont le chef se révèle être le petit ami de la jolie aide-soignante noire qui s’est mise du côté du Bien.
La dette a été payée par l’ancien champion de boxe, absent de l’échappée, il était mort la veille d’une crise cardiaque.
Mais que faire de ce car de vieillards dépendants ?
La solution : les amener à l’orphelinat où Milann a été élevé. Vieillards sans familles, enfants sans parents, ils ont besoin les uns des autres.
Tout est bien qui finit bien.
Le directeur sera condamné, et on a trouvé la solution à la vieillesse dépendante.
Les mauvais garçons (plutôt basanés) ne sont pas si méchants qu’il y paraît, « mon frère ».
Le vieil homosexuel inconsolable témoigne de l’amour dans le couple homosexuel ; la crainte du kiné de révéler sa propre homosexualité se révèle dépassée, la société a changé.
Après les avoir exposés crûment, il n’est plus question des désagréments de la vieillesse. La seule mort présente est une « bonne mort », d’un seul coup, comme la plupart des gens la souhaitent.
Et même le monsieur Alzheimer – qui nous a bien faire rire avec Marthe Villalonga s’offrant à lui chaque soir sous l’identité d’une star prestigieuse, de Marylin à Madonna, puisqu’il n’a aucune mémoire – nous apprend finalement qu’il n’est pas Alzheimer, mais a trouvé pratique de le feindre.
Ajoutons pour finir que la spectatrice âgée que je suis est heureuse de retrouver les vedettes d’antan participer ainsi à la mise en société, à travers le cinéma, de ce problème difficile, toujours plus envahissant.
J. Feldman