Poésie

Nous l’avons dit, la poésie est le plus difficile des genres parce qu’il combine la musique et le sens, la musique des mots et leur sens. Il est mille fois plus délicat que la prose. Verlaine a le mieux exprimé cette vérité dans son « art poétique » : « De la musique avant toute chose… « . « Prends l’éloquence et tords lui son cou ».
Dès le XV° siècle Charles d’Orléans montrait des qualités analogues :  » Le temps a laissé son manteau / De vent, de froidure et de pluie ».
Même Jean de la Fontaine s’éloigne apparemment de son éloquence pédagogique, non sans malice, par exemple dans « La jeune veuve » :  » La perte d’un époux ne va point sans soupirs, / On fait beaucoup de bruit ; et puis on se console ».
Pendant ce temps la chanson populaire développait ses trésors : « Oh, j’ai vu, j’ai vu ! Compèr’, qu’as-tu vu ? ».
La poésie romantique française du début du XIX° siècle parait inférieure à ses modèles allemand et anglais. Citons cependant Musset : « J’ai perdu ma force et ma vie, / Et mes amis et ma gaîté; / J’ai perdu jusqu’à la fierté / Qui faisait croire à mon génie ». Nous n’oublierons jamais le Hugo de la deuxième partie du siècle.
Un miracle s’est produit avec Baudelaire. La poésie française est devenue la meilleure du monde. Nous ne citerons pas Rimbaud 🙁 « mon paletot aussi devenait idéal » ), mais Mallarmé :  » Au seul souci de voyager / Outre une Inde splendide et trouble » et, pourquoi pas ?, Laforgue : « Un couchant des Cosmogonies ! / Ah ! que la vie est quotidienne… ».
Outre le délicat Toulet ( … Quand l’ombre est rouge sous les roses,…  » ) et bien d’autres, Apollinaire s’impose : « Les souvenirs sont cors de chasse / Dont meurt le bruit parmi le vent ».
Le mouvement a continué avec le surréalisme et d’autres, dont René Char ( « Le marteau sans maître » ), mais, depuis quelque temps, comme en philosophie et en musique dite sérieuse, il s’épuise.