E.P.O.15

Par un minuit morne je m’endormais
Sur un vieux livre ouvert
Porteur d’un savoir oublié
J’entendis un tapotement à la fenêtre
Nous étions prisonniers d’un décembre glacial
Les derniers tisons façonnaient leur image
J’avais demandé en vain à mes livres
L’oubli de mes chagrins
Surtout celui d’avoir perdu l’âne
Ce rare animal qu’on appelle l’âne
Et qu’ici personne ne nomme plus
Le triste incertain soyeux froissement des rideaux
Ne m’empêcha d’entendre à nouveau le tapotement
Joyeux à la fenêtre
Je l’ouvris toute grande
Je sentis le froid glacial
Je vis la nuit noire
Rien de plus
Je retournai vers ma place
Titubant de sommeil
Quand j’entendis un nouveau tapotement
Léger et doux comme le message d’un oiseau
Je me secouai : « Ce n’est que le vent ! »
« Ayons-en le coeur net ! »
J’ouvris grand la fenêtre
Prêt au froid et au noir
Un écureuil entra sans me saluer
Et grimpa jusqu’en haut de la bibliothèque
Où il se tint immobile sans dire un mot
Je le saluai pour deux
Et décidai de regagner ma couche
Bien allongé j’oubliai l’écureuil
Je rêvais de l’âne
Le lendemain matin l’écureuil avait disparu
L’âne n’avait pas réapparu
Je me dis que les animaux avaient de la chance
Que je les aime bien
Il se pourrait bien qu’un jour je ne les aime plus