Le terme « civilisation » désignait benoitement le plus haut niveau des sociétés humaines après la « sauvagerie » des chasseurs-cueilleurs », puis la « barbarie » des premiers agriculteurs-éleveurs. Cette vision historiciste culminait dans la culture lettrée des élites urbaines de l’ époque.
Puis on s’est rendu compte de la diversité des « civilisations », vastes ensembles socio-culturels, plus ou moins pérennes, à large base géographique. Comment les définir précisément ? Ici s’ouvre une petite boite de Pandore. Tout le monde est d’accord pour constater une civilisation chinoise dès le III° millénaire, avec le mythique « empereur jaune », mais réduite à l’actuelle Chine du nord, presque sans métaux et sans riz, sans taoïsme, confucianisme, ni même Yi-king, sans parler du bouddhisme introduit au début de notre ère… Nous postulons une continuité qui de fait est en pointillés.
L’Iran ancien est mort. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Toujours est-il que l’Iran garde une grande originalité, seul pays indo-européen à s’être converti massivement à l’islam chïte …
Le passé le plus ancien influe en profondeur. Jusqu’à quel point ? Que reste-t-il des érigeurs de dolmens à part quelques reliques monumentales ? Une mémoire profonde, devenue invisible, insensible, est nécessairement oubliée par les historiens.
« Civilisation » est plus une notion qu’un concept. Les historiens ne sont même pas d’accord sur le nombre des civilisations. Certains en voient huit, d’autres vingt deux, etc… Quelques-uns, isolés, ont même parlé de « civilisation juive », oubliant que, si la tradition millénaire du judaïsme est admirable, les diverses communautés juives se sont adaptées en profondeur aux sociétés globales qui les acceptaient.
Je répète que le « choc des civilisations » n’a aucun sens. Par contre le choc des cultures est quotidien à cause de leur concret. Mais il y a aussi emprunts réciproques. Il suffit de ne pas être sectaire. De toutes façons les progrès techniques ne cessent de s’insinuer.