Il convient de distinguer triade et trinité.
Dans une trinité, singulièrement dans la Trinité chrétienne, les trois éléments sont égaux et semblables au point d’être identiques. Dieu le père et Dieu le fils sont très absents depuis longtemps. Leur intérim est assuré par la troisième personne, le Saint Esprit, qui lui-aussi est tout-puissant. La trinité, c’est le Un en Trois.
L’exemple d’une triade me parait donné par Platon : le Vrai, le Juste, le Beau. Les trois sont à niveau égal, mais ils sont très différents sans être opposés. Nous cherchons le Vrai parce que l’erreur nous cerne dans le même temps qu’elle vient de nous. La vérité a ses lois que notre raison découvre. Nous cherchons le Juste parce que le crime nous menace et que nous sommes potentiellement des criminels. La raison nous fait découvrir la justice par l’intermédiaire des Lois ( et du droit ).
Mais le Beau ? Que vient-il faire dans cette galère ? Une triade, c’est trois fois un, l’Unité est ailleurs. Le troisième terme remplit les missions qu’oublient les deux premiers. Que peuvent négliger le Vrai et le Juste ? Ils oublient le sensitif, la sensibilité, le fantasme, l’irrationnel ou ce qui parait tel. Ils oublient donc la sexualité, la sensualité, l’émotion, la passion. La catégorie du Beau réunit ces éléments dans un seul élan qui, chez Platon, devrait se soumettre à la raison sous la forme d’un ordre esthétique. Les trois facteurs se réunissent dans l’idéal métaphysique de l’Idée transcendante qui mène à Dieu, au Dieu des philosophes.
La plupart des philosophes, à l’instar de Kant, ont cherché le vrai et le juste. Ils ont quasiment ignoré le beau. Sous le nom d’esthétique Kant ne désigne que les normes de la connaissance sensible. La beauté sous toutes ses formes nous accompagne pourtant dans la vie la plus quotidienne. Elle a un rapport fort avec la sexualité comme l’a deviné et simplement deviné Freud.
Il est plus simple empiriquement de juger que nous avons affaire à des ordres différents de la réalité humaine, ceci sans exclusive.
N.B. : Kant a cependant dit un mot des catégories du beau et du sublime, spécifiques du XVIII° siècle; le beau est petit et féminin, le sublime grand et masculin.