Prophéties de Cassandre *
……..
Je vois courir une torche ailée
Elle a été couvée par le vautour
Qui habite dans l’eau
C’est un oeuf à la coquille ronde qui est éclos
Il reprendra la même route en sens inverse
Pour affamer les guêpes coléreuses
L’aigle noir voit de loin le lion qui traîne
Le deuxième aigle est aveugle
Il laisse l’empreinte de ses ailes sur la terre
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Au bois de l’ancêtre ont été mélangées les exécutions
La génisse prostituée n’a pas pu
Présenter le sein à son fils
Et le laver dans l’eau lustrale de sa couche
Et toi l’autre tu seras entraînée par le farouche lion d’Iphigénie
A des noces sanglantes et un hyménée funèbre
Qui imiteront les sacrifices qu’a accomplis sa mère de ténèbres
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Vieille captive tu mourras sous les coups lapidée
Car les insultes que tu leur as lancées les ont irrités
Et tu disparaîtras sous l’amoncellement de pierres qu’ils feront pleuvoir sur toi
Quand tu seras transformée en une noire bête qui aboie
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Et tout sera dévoré par l’armée qui s’avance en force
Tous les arbres à fruits…
Toutes les baies sauvages que la montagne nourricière et toute l’eau sera épuisée dans les rivières
Où s’abreuve la sombre soif de ceux qui boivent à longs traits
Et on suscitera de loin un nuage de flèches comme une voute
Au dessus de la tête des soldats et un brouillard
Comme une ombre cachera l’astre et son feu sera éteint
Mais il fleurira le temps d’une rose
Puis après avoir tout brûlé comme on brûle les chaumes
A son tour lui aussi il goûtera la fuite
Sous l’égide de la Parque toujours menaçante il cherchera l’asile d’une barque comme une jeune fille invoque les ombres de la nuit
Le misérable est épouvanté par une épée nue
* Non seulement Cassandre, fille de Priam, captive troyenne, annonçait l’avenir sans être crue, mais, selon le poète, en profitait pour être crûe. Il convient de lire ce texte comme une mélopée.