Quelque chose de frappant, c’est l’éloge réitéré par de vieux Chinois d’avant notre ère du Non-Agir. On peut penser d’abord qu’il s’agit assez banalement du refus de la témérité, de la précipitation, de l’agressivité, de l’exagération, du manque de sang-froid. En quelque sorte il s’agirait de savoir le cas échéant botter en touche.
Qui dans sa vie ne s’est pas félicité d’avoir su attendre avant que le problème ne se décante, ou pas ?
Mais l’insistance chinoise sur le Non-Agir va plus loin, beaucoup plus loin. Un peu d’histoire s’impose : la Chine est un pays qui est en même temps une civilisation, de plus autochtone. Elle a créé un immense empire, elle-même. Mais les divisions se sont multipliées jusque’ à ce qu’on appelle la période des « Royaumes combattants » .
Lao-Tseu se trouvait au coeur de cette évolution, sans espoir d’y remédier. Toute action politique prenait facilement des aspects militaires, donc sanglants.
La Chine authentique s’était créée d’elle-même, de façon paysanne, rurale, sans excès bien visible. On pouvait poursuivre sur ces bases un rêve de paix sans action, se réclamant des rites paysans. La paysannerie était le principal personnage de cette tragédie historique, rarement cité par les lettrés.
Face à cette immense force paysanne et foncièrement pacifique, on peut comprendre la nécessité d’une inaction supérieure.
J’ai peut-être eu tort de combiner « Tao-Te-King » et « Récits hassidiques ». J’ai sans doute agi par paresse. J’ai couru le risque de mêler dans l’esprit du lecteur des éléments inconciliables. J’aurais peut-être mieux fait de ne pas agir. Tout cela par paresse, cette paresse qui est la principale de mes « qualités ».
Il reste que la finesse des récits hassidiques annonce l’humour juif. Un comble pour celui-ci : ignorer les « goyim » , les « non-juifs » alentour en Pologne, en Lithuanie… Le Non-Agir chinois se métamorphose paradoxalement en Non-Agir juif.
Je n’épuise jamais aucun problème. Si ce n’est pas du Non-Agir !….
PS : Sans tomber dans une exagération nuisible, on peut mettre en valeur la méfiance chinoise vis-à-vis d’un peuple qui a peur des réformes, ce qui peut-être caractérise actuellement certaines réactions à la soif de réformes du président Macron.