PCA 111

Les cigales transies stridulent devant l’embarcadère
La pluie s’est arrêtée
Nous vidons les coupes des adieux
Déjà le bateau de santal annonce le départ
Mains enlacées les yeux et la gorge pleins de larmes
Nous restons muets
Je pense aux distances qui m’attendent
Sur les vagues embrumées
Aux masses menaçantes des nuages
Dans le ciel immense

Ceux qui s’aiment souffrent depuis toujours de la séparation
Elle est pire dans la froidure
Que serai-je après l’ivresse de cette nuit
Quand la lune pâlit sur la rive bordée de saules
Dans la brise de l’aube ?
Je suis parti pour des années
Les beaux moments les beaux paysages paraissent vains
Si je débordais de tendres sentiments
A qui pourrais-je les confier ?

La pluie du soir marie le ciel et la rivière
Rafraîchit l’automne
La bise froide est chaque jour plus mordante
Les passes montagneuses plus désertes
Les derniers rayons solaires embrasent la terrasse
Partout le rouge fane le vert pâlit
La nature perd son éclat
Les eaux du fleuve coulent immuables

Je ne supporte pas de monter sur les hauteurs
Regarder au loin me fait souvenir du pays natal
Ma nostalgie ne se referme plus
Je soupire en pensant à mes voyages
Pourquoi devrais-je continuer à souffrir ?
Je pense à toi, amour, penchée à ta fenêtre
Scrutant le fleuve
Tant de fois tu as cru voir mon bateau au loin
Comment pourrais-tu savoir
Que je suis appuyé à cette balustrade
Glacé de chagrin