Le chemin dans la montagne

Je suis resté fidèle à moi-même. Je poursuis mon chemin dans une montagne parfois escarpée. Je ne suis pas un sage retiré à la chinoise même si ce modèle m’inspire. Je suis le vieux de la montagne. Je suis devenu vieux très tôt quand on y pense. Il y a beaucoup de vieillards dans mon genre. Par définition nous ne nous rencontrons pas. Le risque est que chacun de nous se prenne pour le vieux de la montagne, le seul, l’unique…
Au cours de mes promenades il m’arrive de regarder vers la vallée. J’y vois surtout une autoroute, remplie de véhicules automobiles qui foncent vers on ne sait quel but. Je les envie parfois. Ils ont l’air de savoir où ils vont. Ils font pleinement partie du monde moderne.
Je suis le vieux de la montagne. Cette image définit un projet, un projet de vie intellectuelle au sens le plus fort du terme. Mais je suis aussi un petit vieux, retraité de l’enseignement, un époux et un père, un ami et un copain. C’est peut-être là que réside ma véritable identité sans solitude et surtout sans isolement. Le vieux de la montagne est seul au secret de son monde, mais il ne s’isole pas de ses camarades en société.