Les fables de Fabre 44

Un berger avait du temps
Il méditait :
« L’amour et l’ambition
Se disputent le monde
L’ambition souvent
Se glisse dans l’amour… »
Le berger fut élevé à la cour
Pour s’occuper du troupeau de la reine
De nature discret
Il se confondit fort bien dans le décor
Il rencontra un ermite de cour
Qui lui raconta un apologue :
« Un berger un jour
Ramassa un serpent endormi
Qu’il prit pour un fouet
Il le montrait à tous
Une jeune fille bientôt
L’avertit en pure perte
Le serpent dégourdi
Le mordit à mort »
« En quoi cet apologue peut-il me servir ? »
Demanda le berger à l’ermite :
« Tout apologue un jour ou l’autre
Se révèle utile »
Le berger bientôt fut victime
D’une cabale animée
Par des pestes de cour
Le roi le fit arrêter par sa garde
On ouvrit son coffre fermé de six serrures
On y découvrit veste trouée,
Petit chapeau, panetière, houlette,
Et même musette
Délivré le berger fut libre de rentrer dans sa campagne :
« Je suis sorti du palais comme d’un songe
J’avais prévu ma chute en désirant le faîte
La faveur des rois ressemble à un serpent
Qu’on prend pour un fouet »