M.P.A.

J’ai découvert le concept de mode de production asiatique ( M.P.A. ) dans la revue marxiste, proche du parti communiste, « La Pensée », en 1965. La controverse datait de 1963-1964. J’ai rapidement réagi par un article, publié en 1966 dans la revue dirigée par Gurvitch, « les cahiers internationaux de sociologie ». Je vivais alors à Alger, mais je n’ai jamais pensé que le concept corresponde à l’Algérie historique, trop diverse. J’imaginais plutôt la Chine impériale.
Le M.P.A. représente une société traditionnelle, pré-capitaliste, fortement dominée par l’Etat, non seulement par l’impôt, mais dans l’organisation de la production. Le modèle classique est hydraulique, l’Etat contrôle l’irrigation.
Les divers modes de production, au sens marxiste du terme, n’ont de sens qu’au niveau de l’histoire universelle. Il suffit que l’historien se rapproche quelque peu du concret pour que leur concept perde presque toute son importance. Mais il permet l’histoire comparative des sociétés historiques.
Le M.P. asiatique est mal nommé puisque l’Egypte pharaonique et le Pérou inca entrent dans cette catégorie. Dès la fin des années 60 j’espérais un colloque international pour unifier le vocabulaire. Je l’attends toujours. On a même parlé de « despotisme oriental ».
Une autre raison de mon intérêt pour le M.P.A., encore aujourd’hui, est qu’il montre que l’humanité ne suit pas les mêmes étapes historiques. Tout le monde ne fait pas la même chose au même moment. L’Occident a bel et bien choisi une voie originale.
Une troisième raison de mon intérêt pour le M.P.A. est qu’il montre que l’économie, toujours déterminante, peut être dominée par l’Etat, dans un système despotique. Le Politique reprend ses droits. Le M.P.A. m’aidait dans ma critique du capitalisme d’Etat, du despotisme contemporain représenté par l’U.R.S.S., par l’Union Soviétique, contrairement à ses promesses initiales puisque Soviet signifie Conseil.