Albert Camus aurait cent ans. Il ne cesse de nous accompagner. Certaines de ses formules continuent à nous hanter, par exemple : « Nous luttons pour des nuances » ou : « Antigone a raison, Créon n’a pas tort ». Dès les années cinquante on associait volontiers pour mieux les opposer Sartre et Camus. Régine, déjà pep-timiste, mélange de pessimisme et d’optimisme, préférait le réformiste et angoissé Camus. Moi, qui me voulais révolutionnaire, je préférais l’engagement de Sartre. A notre époque que je juge droitière, je privilégie Camus.
Un problème douloureux est que Camus était pied-noir. On comprend que l’indépendance de l’Algérie l’ait divisé. D’où sa phrase : « Pour une femme on ne trahit pas sa mère ». Il me semble venu le temps de l’apaisement. L’indépendance de l’Algérie a signifié la mort d’un peuple, le peuple pied-noir. Certes, mis à part l’héroïsme de quelques militants communistes aux débuts de l’insurrection, les pIeds-noirs ont largement été les fossoyeurs de leur propre tombe. Il n’empêche, ce peuple a disparu.