Hommage à Florian ( 7 )

Une carpe de Seine
Dans l’heureux temps où il y avait encore des carpes en Seine*
Faisait la leçon à ses carpillons qui l’écoutaient à peine
« Suivez le fond de la rivière
Craignez la ligne du pécheur
L’attaque surprise de l’épervier »
C’était au mois d’avril
La fonte des neiges enfle le fleuve
Qui inonde la campagne
Les carpillons s’exclament :
« Qu’en dis-tu, carpe radoteuse ?
Nous voilà citoyens de la mer orageuse »
« Ne croyez pas cela », dit la carpe mère
« Ce qui se fait en un instant
Se détruit en un instant
Suivez toujours le fond de la rivière »
« Bah ! » crient les carpillons
« Tu répètes toujours les mêmes discours
Tu ne vois même pas le déluge universel »
Nos étourdis se répandent dans la campagne inondée
Le flot se retire les poissons furent bientôt pris
Et frits
On se croit toujours plus sage que sa mère

*La Seine, près de sa source, abrite des poissons bien vivants