« Que mon sort est affreux ! » s’écriait un vieil hibou
Infirme souffrant misérable
« Je suis seul
Isolé sur la terre
Jamais un oiseau n’est venu dans mon trou
Consoler un instant ma douleur solitaire »
Un pigeon entend ces mots
Vole auprès du malade
« Mon pauvre camarade
Je plains vos maux
N’avez-vous donc pas de famille ? »
« Me marier ? Pourquoi faire ?
J’en connaissais trop le danger
Epouser une jeune chouette
Bien étourdie et bien coquette
Qui me trompe ou me fait enrager
Avoir des enfants d’un mauvais caractère
Ingrats menteurs mauvais sujets
Désirant en secret le trépas de leur père ?
Pour des parents je n’en ai guère
Je ne les vis jamais
Ils sont durs exigeants
S’irritent pour le moindre sujet
Ils n’aiment que ceux dont ils héritent
Encor ne faut-il pas qu’ils attendent longtemps ! »
Le pigeon reprit : »Parlons des amis
Pour les orphelins c’est une famille »
« Les amis ! Ils sont trompeurs
J’ai connu deux hiboux
Qui tendrement s’aimèrent
Pendant quinze ans
Un jour pour une souris ils s’égorgèrent
Je crois à l’amitié encore moins qu’à l’amour »
« Vous n’avez donc aimé personne ? »
« Non, soit dit entre nous »
« En ce cas mon cher de quoi vous plaignez-vous ? »