Clovis Hesteau de Nuysement peu connu fut l’un des poètes royaux du XVI° siècle :
Pour charger mon inhumaine d’un blâme éternel
Je veux me faire esclave d’une peine perpétuelle
Pour vaincre sa colère et la fatalité
Je veux éprouver le bien et le mal
Je veux honorer les dieux de sacrifices
Je veux recourir aux enfers
Si ce n’est assez je me transformerai
En loup en panthère en lion
Et de griffes et de dents tout bouillant de colère
J’épouvanterai l’inhumaine imprimant la peur
Sur son superbe front et le regret en son coeur
Mais si cela ne sert qu’à la rendre plus fière
Je veux retourner à ma forme première
Pour m’ôter le joug de son injuste loi
Je veux redevenir ermite des bois
Tellement qu’à la fin mes misères quotidiennes
Induiront en pitié les âmes infernales
Puis si l’ardeur du destin s’obstine contre moi
Comme un vieux pèlerin qu’une loi outrageante
D’un tyran cruel fait errer par le monde
Je courrai çà et là sur la terre et sur l’onde
Compagnon des soupirs des pleurs des sanglots
Portant la glace sur mon sein et le feu dans mes os
Sans cesse adorant ses yeux et sa face divine
Car plus elle me hait me méprise et me fuit
Plus mon coeur pour elle s’enflamme et se détruit
Comme un charlatan autour de son théâtre
Amasse tout un peuple je dirai la rigueur
D’une belle rebelle en qui seule mon âme
Se nourrit se détruit se glace s’enflamme
Sans jamais m’approcher de ma fière ennemie
Si jamais elle écoute mes cris lit mes tristes écrits
J’espère encore fléchir sa folle outrecuidance
Ou bien mes desseins n’auront aucune puissance
Je vais me baigner nu dans les vives fontaines
Puis les cheveux horriblement dressés
La pâleur sombre au front la voix effroyable
Le chef et les bras ornés de fleurs funèbres
J’allume un cierge puis de la cire pure et vierge
Je fais l’image de celle qui m’a volé mon coeur
J’en fais une qui me ressemble je les joins ensemble
De mille aiguillons je les transperce toutes deux
Loin des demeures où l’on entend l’heure sonner
Coi avec mon chien à côté d’un grand feu
J’en appelle aux esprits qui m’aident dans cette guerre
Je pique la double image jusqu’au fond de la terre