APC 107

En haut de la pente je regarde
La sévère saison de l’ancienne capitale
L’immense ruban soyeux du fleuve
Les sommets verts des collines
Les barques à voiles les bannières des estaminets
Le navire chamarré
Le fleuve lacté
Ce tableau n’est pas facile à faire Il reste incomplet
J’évoque les temps antiques
Combien de générations ont déploré les revers de fortune !
Les filles de marchands chantent parfois encore les refrains du gynécée

*

Ses os étaient de jade sa chair un pur cristal
Le vent emplissait d’un parfum secret le palais au bord de l’eau
La belle appuyait sur l’oreiller ses cheveux en désordre
Mon désir prendre sa main de soie
Aucun son une étoile filante dans le fleuve lacté
Nous ne parlions pas des années qui secrètement s’échappent

Sous la lune échancrée par les branches
Les humains se reposent
Mais un solitaire fait une ronde discrète
Telle l’ombre confuse et floue d’une oie sauvage
Dans un sursaut d’effroi il tourne la tête
Personne ne comprend le triste secret de son coeur
Il fait le tour des ramures glacées
L’îlot de sable gèle dans un morne abandon

*

Où est parti le printemps ?
Sans bruit sans chemin
Vous qui savez où il s’abrite
Appelez-le qu’il nous tienne compagnie !
Où sont les traces de son passage ?
Petit oiseau le sais-tu ?
Nul ne comprend cent ramages
La brise t’emporte au delà des rosiers

*

Dans le silence et la fraîcheur je monte au petit pavillon
L’aube est grise et morne
Le paravent s’orne de brume pâle et de flots jaillissants
Les fleurs volent légères comme un rêve
La pluie s’effiloche subtile comme l’ennui
Je suspends nonchalante le rideau

Les nuages subtils rivalisent
Les étoiles d’amour sont filantes
On traverse furtivement le fleuve d’argent
Sous le vent et la rosée cette rencontre
Surpasse l’expérience des humains
On dirait une eau caressante
Ces rendez-vous sont un rêve
Il est dur de penser au retour
Si l’amour doit durer à jamais
Faut-il rester ensemble le matin et le soir ?