PCA 36

La vue des environs émerveille
Les rares passants tels que nous
A l’aube nuages et brumes
Montent de la surface de la mer
Au delà du fleuve fleurissent à l’unisson
Pruniers et saules
L’air tiède accélère le vol des oiseaux
Le soleil illumine et miroite
On entonne un air ancien
Mon jardin brouille mes yeux

PCA 35

A minuit le silence règne
Je n’ai plus de voisin ni d’ami
Ma vieille hutte est loin dans la bruyère
Les feuilles jaunes frémissent sous la pluie
La lampe brille sur mon crâne chauve
Perdu dans ma solitude pendant de longues années
J’avais honte de te demander
De venir plus souvent
Nous nous sommes enfin retrouvés
Soyons les bienvenus

PCA 34

Les chevaliers sont errants par définition
Il arrive cependant qu’ils chevauchent flanc contre flanc
Leurs selles d’or sont ornées de saule
Une poussière fine les soulève
Eblouies comme par un rêve
Les fleurs tournent la tête
Les humains masculins sont égayés par le vin
Pour raccourcir leur retour vers le pont
Ils coupent à travers le lit de la rivière

PCA 33

Je me suis aperçue la nuit dernière
Que les peignes ne retiennent plus
Ma chevelure
Sa soie noire et fine
Se répand en vagues sur mes genoux
Dis-moi vite : Quelle partie de mon corps
N’est pas faite pour l’amour ?

Du sommet de la montagne
Monte une écharpe de fumée
Les derniers rayons du soleil
Percent au travers des bambous
Les oiseaux s’envolent
Vers les combles des greniers
Les nuages semblent sortir
Des fenêtres de ma chaumière

PCA 32

Le crépuscule descend
Sur le toit du palais
Je baisse le rideau de perles
Les lucioles errent
Puis se posent
Tout au long de la nuit
Je couds cet habit de soie pure
Mon amour pour toi
Ne peut que grandir

PCA 31

La salle est animée
Par des humains charmants
Et de jolies dames
Parées de bijoux rares
Les barrettes d’or brillent
Sur le haut des chapeaux
Aux brides dénouées
Les pendentifs de jade
Se balancent au rythme
De la musique infernale
Les sourires de convenance
S’épanouissent sous les sourcils
En ailes de papillon
Des robes plissées
Montent des parfums raffinés
Plus la nuit s’avance
Plus s’évanouit le bruit du festin
Dans les chambres discrètes
Les rideaux de plumes se ferment

PCA 30

Ma maison dispose de poutres croisées
Loin du monde
Les falaises et les vallées
S’étalent jusqu’à l’horizon
Ma fenêtre est comme un tableau
De monts lointains
Et de cimes brumeuses
Dans mon jardin les arbres
Penchent leur couronne verdoyante
Devant le soleil levant
Au couchant les oiseaux se dispersent
Un singe solitaire crie son amertume
J’ai savouré du vin près du petit étang
La brise me rafraîchit
Je pince les cordes de mon luth

PCA 29

Ma soeur est petite encore
Elle s’inquiète
Combien de temps encore
Avant de se marier ?
Elle a vu le vent
Arracher des fleurs
Elle ne l’a jamais vu
Les reposer

PCA 28

Souvenez-vous d’une fière tour
Dite « de la poutre de cyprès »
N’en subsistent que des ruines
Envahies par les ronces
Le sublime palais d’à côté
Est maintenant un pré bourbeux
Un nichoir à perdreaux
Des rangées de stèles
Couvrent ces pentes où jadis
Le corps des jeunes beautés valait de l’or
Notre but est clair et honorable :
Le vin et le plaisir !
Ne faire que ce que le coeur et le corps désirent !
Quand nous serons enterrés
Nous n’aurons rien à regretter !

PCA 27

Je contemple mon bol plein
Je ne peux avaler une bouchée
Je tire mon épée du fourreau
Et la plante dans la poutre
Combien d’années peut durer
La vie d’un humain ?
Je me traîne les ailes repliées
J’ai renoncé à ma charge
Je compte me reposer chez moi
Mes parents m’entourent
Je joue avec les enfants se dandinant
Ma femme s’applique au métier à tisser
Elle est bien jolie
Les sages et les saints vivent
Misérables et inconnus
Depuis la nuit des temps
Quel sort peut espérer
Un honnête humain ?