FCA 14

Les livres sont serrés sur l’étagère
Supports d’une pensée incertaine

Nos gestes manquent de grâce
Nos mots manquent de mélodie

J’aimerais voler à tire d’aile
Comme un oiseau, mieux qu’un oiseau

Mon rêve s’ouvre-t-il enfin
A la mer et au ciel ?

La paix réveille mes rimes
Rares et fantasques

Pourquoi portes-tu un masque
D’orage et de pluie diluvienne ?

Nous sommes blottis dans ta chaumière
Il n’y a plus de distance entre nous deux

La poêle et la bouilloire se languissent
Du cuivre primitif

Nous nous serrons comme si nos corps nous échappaient
La tornade disperse la pluie ramène

Seule la lampe rougeoyante
Atteste notre présence ici-bas

L’eau descend avec tumulte
Entre les rocs de la montagne

Pourquoi mener une vie mesquine et déformée
Au milieu des possibilités illimitées ?

Sans cesse nous avons affaire
A un autre toi, à un autre moi

Terribles sont les ténèbres accumulées
Qui déchirent le possible et l’impossible

Les doux mots de l’amour
Meurent avant de naître

Les fantômes de quoi de qui ?
Nous entraînent dans leur errance

Nos fantasmes sont nos fantômes
Gracieux et misérables

Nos amours sont un désordre né
Dans l’air splendide et libre

L’aire des champs est libre
Vieille comme le temps

Le travail des champs est un esclavage à domicile
Mais sans lui c’est la mort assurée

L’aire dans l’espace est libre et forcée
Elle n’existe pas sans le travail

L’origine est la force
Qui donne forme au paysage

FCA 13

Mon sourire s’efface
Avant que les mots se forment

Le ruisseau devient rivière
Je préfère rester près de la source

Les mots d’adieu
Suscitent des échos

L’inespéré fait des merveilles
Pas besoin d’espoir

Passe la comète
Tout moment est une première étreinte

Peines et joies se fondent
Dans un moment unique

Rien n’est si familier
L’inattendu est attendu

J’adore le sentier
Qui me mène chez moi

A l’heure de la mort le doute m’assaille
A qui appartient ce corps ?

Je suis né Il pleuvait
Je vis encore Il pleut toujours

FCA 12

Dans les reflets pâles
La nuit poursuit sa vérité

Botté et capé je fuis le village
Des maisons obscures

Les arbres ont des branches noires
Qui pensent pour toi

Les signes de ta pensée
Sont des branches enchevêtrées

Gouttes de rubis gouttes de cristal
Dans le musée l’épée est belle

Le coursier galope
La poussière se soulève

A perte de vue la plaine
La nostalgie est énorme

Le rêve du poète
Ne sera jamais un rêve de héros

Le peintre à pas comptés
Entre dans son paysage

Il est vain de poursuivre
Le mystère sans fin

FCA 11

Il fait grand jour Un papillon
Se cache dans le bouquet

Je n’ose toucher le papillon
J’ouvre la fenêtre

L’âme c’est ce qui reste
Quand tout s’est passé

L’âme flamboie dans le silence
Au coeur des villes elle s’efface

Tu n’es plus qu’une ombre
Ton avenir est sombre

Sur le lac tombe la pluie
Je l’écoute dans le silence

Les gouttes troublent le lac
Il n’en reste rien

J’ai besoin de penser immobile
Au fond du lac

C’est moi la stèle de marbre
L’arbre au fond de l’eau

Ce crépuscule est le premier
je l’ai déjà vécu

FCA 10

La libellule vole insouciante
Elle se pose où elle veut

Les tiges de lotus tremblent
Leurs fleurs blanches voltigent

La neige est une fleur
Le printemps est souterrain

Sa douceur imprègne le monde
Même si elle mêle vent et pluie

Les fleurs pèsent sur le coeur
Jusqu’à l’ennui jusqu’à l’écoeurement

Des fleurs poussent dans les cailloux
Entre les pavés les pierres

Toute rencontre est fortuite
Dans l’immensité de l’existence

Orgueilleuse fleur coincée dans un mur
Ton bonheur d’être toi-même te suffit

Un bonheur simple suffit
Pour être le centre de l’univers

Les herbes tendres
Sont la parure de notre terre

FCA 9

Trop longtemps assise
Tu te livres à ta nostalgie

Les confins du ciel
Te tournent en dérision

L’univers de ma vie
Est perdu dans la nuit

J’ai oublié les premiers mots
Je ne connais pas les derniers

Les premiers cris de la vie
Sont drôles et mystérieux

Peut-être est-ce un mystère
Issu de l’âme originelle ?

Comme le bruit dans l’univers
Nous ne maîtrisons par les sons

Le vécu du jeune humain
N’est pas un rêve

L’hirondelle s’envole
Pour arriver, pour nous quitter

Certaines fleurs sont blanches
De saule, de roseau

FCA 8

Tu es loin quand tu me regardes
Tu es toute proche quand tu regardes un nuage

Je pleure pour croître tel une plante verte
Le raisin reste improbable

Les injures du soleil
En appellent au déluge

Les étoiles scintillent dans le ciel profond
Qu’est-ce qu’elles se disent ?

Au profond du silence
Chacun a sa voie

Le masque des étoiles
Cache ton visage, firmament

Les ombres cachent la lumière
Sauf dans la voute céleste

La mer est ta fenêtre
Les vagues s’étendent jusqu’à l’oubli

Que fais-tu seule sur une cime ?
Crois-tu sérieusement que l’univers t’appartienne ?

J’accompagne les arbres dans la montagne
Déjà les nuages s’épaississent

FCA 7

Je ris de mon vrai rire
Je bois tout mon saoul

Les barques se touchent
S’invitant à trinquer

Le lac est tranquille
Sauf un cygne ou deux

Très chère je reviendrai
Tempêtueux

Peu m’importe mon nom
Pourvu qu’il soit inscrit quelque part

Le sol me porte l’air se respire
La lumière m’éblouit Je suis bien debout

Je choisis la dernière terre cultivable
La première en friche

J’ai installé ma vie sur une terre
Qui maintenant est à moi

Les branches des arbres déchirent le ciel
Je les peins de mémoire

Lune étoiles terre
Ce sont de simples noms communs

FCA 5

Le réverbère ordonne la lumière
A l’intérieur de l’ombre

Le soleil est là où il n’y a personne
Nous posons notre repos

Le réverbère ordonne à la lumière
De se plaire en dehors de l’ombre

Je me réveille en sursaut
Tu n’es pas là

Tu dis chérir ta solitude
Personne ne t’aime donc pas

Tout est prêt pour toi
Peines et joies

Le vase se brise
Les tessons parlent de massacre

Le pigeon s’envole
Laissant une plume blanche

Je dois tout à ma mère
Son sang son lait et peut-être son âme

Mes larmes ont goût de sel
Où est l’océan ?

L’océan de la vie
N’est pas pour les vivants

FCA 4

Mon réservoir de richesses concrètes
Nous réserve de l’eau et du vin

Les haricots et les sorghos n’en peuvent mais
Les nuages blancs ne s’en soucient guère

Les nuages gris ont arrosé de rosée
Nos champs nos prairies nos forêts

Nous buvons la rosée
En échange de notre sang

La terre cent fois brûlée
Nous sait gré de rester en vie

L’automne sec me monte à la face
Je vieillis

Tout se passe comme si j’attirais
Le soleil dans les champs

J’ai envie de bavarder
Nous restons à côté

Tu es trop fatigué pour te baigner
Tu ne me tends même pas ta main pâle

Tu te souviens des jours passés futurs
Le présent te manque un peu

Je te n’ai rien laissé
Même pas moi même

Le soleil avec fierté
Se dirige vers nous

Couchés face à face
Nous reniflons la terre