Rab 73

Le printemps est fait de feuilles et de fleurs
C’est ainsi qu’il est entré en moi
Les abeilles y bourdonnent
Les brises paresseuses jouent avec les ombres

Une fontaine jaillit du coeur de mon coeur
Son eau est délicieuse
Mes yeux se complaisent à la voir
Surtout le matin dans la rosée
La vie frémit de tous ses membres
Comme chantent les cordes du luth

Tu erres solitaire sur le rivage de ma vie
Là où la marée arrive à son terme
Es-tu amoureuse de l’éternité de mes rêves ?
Je ne suis plus que phalènes
Aux ailes de lumière
J’entends les échos de ton chant
Aux noirs abîmes de mon être

Tu es seule à te saisir du bourdonnement des heures trop pressées
Des pas joyeux qui dansent dans mon coeur
Des vies tumultueuses et ailées
Qui frissonnent dans tout mon être

Rab 72

De tous les coins du monde
La joie est accourue
Pour fabriquer mon corps
La lumière du ciel
L’a embrassé et embrasé
Les fleurs fugaces
Ont palpité dans sa poitrine
Ses mouvements désormais évoquent
Les eaux et les vents
Les ardeurs des nuages et des forêts
Ont envahi son existence même
Les harmonies des choses
Caressent sa beauté
Mon corps est celui de mon épouse
Elle a allumé la lampe dans la maison

Rab 71

Selon mon regard les vagues dévorent le ciel
Bondissantes de vie
De lumière dansante
La marée est à la joie
Les étoiles se bercent les unes les autres
Les pensées les plus profondes
Sont aspirées du fond de l’abîme
Et répandues sur tous les rivages de la vie
La vie la mort selon leur rythme
Montent et descendent
Un superbe oiseau de mer
Hante mon coeur et peut-être mon âme
Pour proclamer son éblouissemnt

Rab 70

Tu élèves la lampe
Non pas pour voir le ciel
Mais pour que la lumière descende sur mon visage
Honoré des sages s’il en est
Ton ombre descend sur toi

Quand j’élève la lampe
Elle éclaire mon coeur
Sa lumière descend sur toi
Je reste dans l’ombre
Mais tu es bien sombre
Abandonné

Rab 69

Tu es au centre de tout
En tout cas de mon tout à moi
Tu es donc au centre de mon âme présumée
Depuis que tu as décidé d’errer
Tu t’es détournée de nos amours
Tu restes au centre de nos espoirs
Tu es partout pour toujours
Tu étais la joie intime des jeux de ma jeunesse
Trop souvent, pris par le jeu,
Je passais à côté des joies suprêmes
Tu as eu la gentillesse de chanter pour moi
Toute ma vie extasiée ou sceptique
J’ai oublié de chanter pour toi

Rab 68

Soudain s’est ouverte la fenêtre
C’est en vain qu’elle regarde ton coeur
Les nouvelles feuilles me saluent
J’attends silencieux les fleurs

Entre les chants le rideau fut levé
Je découvris alors que ta matinée
Etait remplie de mes propres chansons
Tu restais muette jolie comme un coeur
J’ai découvert alors que je chantais pour toi

Rab 67

Tu te tiens solitaire
Par-delà nos chants
Nos vagues d’harmonie
Baignent tes pieds
Sans les atteindre

Nos rares harmonies
Jouent uniquement pour toi
Une musique trop lointaine
La douleur de la séparation
Se fait mélodie

J’attends paisiblement
L’heure où la barque traverse l’eau
Jusqu’au rivage
Tu prends la flute
Et tu chantes

Rab 66

Ecoute écoute bien
La musique chante aussi
Les fleurs sauvages
Les feuilles étincelant le printemps
L’eau brillante de source
Les ombres sonores
D’un bruit d’abeilles
La musique ravit le sourire
De l’ami pour le répandre sur ma vie

Rab 65

Il existe une maison dans le doute
Sa porte s’entrouvre au soleil levant
Le message de la lumière est accompli
Les fleurs sont ouvertes partout où s’ouvrent les fleurs
Dans les jardins les haies les champs
Les devants de fenêtres
Partout où existe un coeur
Qui leur a révélé le don des siècles

Rab 64

Le soleil s’était couché dans la forêt
Les troupeaux ruminaient déjà à l’étable
Un jeune étranger fit cadeau de son sourire
Il dit : « Sans vous mentir
Je suis le témoin de l’incorruptible vérité »

Un vieillard osa demander :
« De quelle caste es-tu mon petit ? »
« Je ne sais pas je vais demander à ma mère »
La hutte maternelle s’élevait au bout d’un désert de sable
Au bord du village endormi
Une vieille femme était assise à son seuil
Attendant son fils
Cette mère ingénieuse répondit :
« Dans ma jeunesse j’ai servi plusieurs maîtres
Tu es venu seul dans les bras de ta mère
Mon petit amour ta mère
Qui n’a pas eu de mari  »

L’adolescent répondit devant le groupe assemblé :
« Je ne sais toujours pas
De quelle caste je suis »
Jeunes et vieillards grommelaient déjà
Devant l’insolence du jeune paria
Une grosse matriarche se leva :
 » Le mérite du jeune
Est qu’il a une maman »