Le fabuliste inconnu ( 116 )

Un papillon étourdi
Se piqua aux dards
De la rose qui l’avait ébloui
« Cruelle ! Je te préfère désormais
Cette magnifique indolente »
Vers un pavot il vole à tire d’aile
Il boit s’enivre s’endort
D’un sommeil de mort
A tous les petits papillons j’adresse ce message :
« Soyez sages pour vivre ! »

Le fabuliste inconnu ( 114 )

Un singe et un éléphant
Se promenaient côte à côte
Quand il furent assaillis par la grêle
Le singe se mit à geindre
L’éléphant lui conseilla la patience
Le singe répartit : « Je voudrais vous y voir
Je n’ai pas votre peau
Qui brave la mitraille »
Se mettre à la place des autres
N’est pas inutile

Le fabuliste inconnu ( 112 )

Un gland tomba sur un champignon
Qui se plaignit amèrement
Le gland répondit : « L’héritier d’une antique et noble lignée
N’a rien à faire d’un avorton
Poussant on ne sait comment sur le fumier »
Le champignon avec flamme rétorqua :
« Nos aïeux importent peu
Quand tu régales les pourceaux
On me donne à manger aux rois
Peu importent nos anciens
Si nous ne sommes pas nous-mêmes des ancêtres »

Le fabuliste inconnu ( 109 )

Un promeneur qui marchait au hasard
Fut tout heureux d’apercevoir
Un cadran solaire
Enfin il avait l’heure
Mais un nuage malencontreux
Fit disparaitre l’image
Il se dit en lui-même :
« Quand pèse sur nous le doute ténébreux
Notre âme qui se languit dans son sombre esclavage
N’a plus qu’à attendre que le vent de l’espoir
Chasse le nuage »
Par bonheur il existe d’autres doutes
Moins monstrueux plus pertinents

Le fabuliste inconnu ( 108 )

Un enfant allait célébrant la nature
La trouvant idéale
Il aperçut un passereau
Du dernier charmant
Et le vit gober un moucheron
Les deux étaient innocents
La nature est belle et cruelle
Il faut la respecter
Telle qu’elle est
Telle qu’elle se présente