Le fabuliste inconnu ( 55 )

Un virtuose par l’ouragan
Fut abandonné sur une côte sauvage
Il avait sauvé son violon son seul ami
Les habitants le lui dérobèrent un jour
Croyant y trouver le secret de sa sorcellerie
L’un d’eux plus audacieux l’ouvrit
Le trouva creux et vide
Ne confondons pas
L’artiste et l’instrument

Le fabuliste inconnu ( 54 )

Une légende ancienne
Attribuait aux petits pélicans
L’habitude barbare de boire
Le sang de leurs parents
La nature a ses lois
Que seuls les humains transgressent
Combien de jeunes de cette espèce
Boivent le sang de leurs parents ?

Le fabuliste inconnu ( 53 )

Un âne fut libéré par son maître
Qui voulut lui enlever son bât
L’ane l’arrêta sur le champ
« Seigneur toute ma vie adulte
J’ai été bâté Mon père et mon grand-père
L’ont été avant moi
Bâté je suis bâté je veux rester »
Combien de gens sottement entêtés
Imitent cet âne bâté ?

Le fabuliste inconnu ( 53 )

Un dame vêtue des oripeaux
Les plus extravagants
les plus bariolés
S’asseyait sur un rebord de fenêtre
Parlait dans sa barbe
Parfois haussait le ton
Brandissant un sceptre de carton
Se félicitant d’être reine
Et même mieux
Les passants la laissaient en paix
Elle était une figure du quartier
Elle rêvait du bonheur
N’est-ce pas déjà une joie ?

Le fabuliste inconnu ( 52)

Dans les débuts du chemin de fer
Un fougueux cheval courut plus vite
Que la locomotive
Puis s’arrêta épuisé
La loco roulait encore
Le progrès à ses débuts
Est encore incertain
Mais déjà pointent les signes
De son destin

Le fabuliste inconnu ( 51 )

Un ormeau s’ennuyait solitaire
Une vigne lui fit la cour
Il l’accepta volontiers Elle l’enlaça
Peu à peu grimpa jusqu’à son sommet
Lui fit une couronne des ses pampres fleuris
Enfin l’arbuste fut pour l’arbre
Son bâton de vieillesse
N’avons-nous pas là
Une histoire d’amour ?

Le fabuliste inconnu ( 50 )

Un petit enfant pleurait
Parce que les hirondelles étaient parties
Son chien lui dit d’abord qu’il était là lui
Son fidèle ami
Puis il se ravisa et apprit à l’enfant
Que les hirondelles reviennent toujours
A l’endroit d’où elles sont parties
Il ne manquait pas de jugeote
Comme souvent les toutous

Le fabuliste inconnu ( 49 )

Les hirondelles s’envolent
Pour revenir au printemps
Un pauvre laboureur
Les admirait de loin
Lui qui âgé et noué
Labourait encore
Sans avoir jamais quitté sa glèbe
A la jeunesse un travail fructueux
A la vieillesse un repos mérité
Tel était son voeu pieux

Le fabuliste inconnu ( 48 )

Un paysan ne supportait plus
La stérilité de son figuier
Il pensait à l’abattre
Le pauvre figuier argua
Du rocher stérile sur lequel il est né
Des vents violents qui l’ont blessé
De l’eau qui lui a toujours manqué
Adouci le paysan le déracina
Et le transporta dans son jardin
Là le figuier de mille fruits
Le récompensa