Florian ( 63 )

Vénus sortant des mers
Enfanta l’amour
La mère la plus jolie du monde
Et son adorable bébé
Sur un dauphin voguent vers la plage
Quand ils furent proches du rivage
Ils poussa des ailes à l’enfant
Il échappe aux bras de sa mère
Il vole vers la terre
il crie : « Maman, j’ai trouvé mon domaine »

Florian ( 62 )

Un homme avait tué son père
Ce crime affreux est rare dans la nature
On le rencontre chez les hommes
Le parricide eut l’art de cacher son forfait
Il fuyait les humains et vivait dans les bois
Un passant le voit détruire à coups de pierre
Un malheureux nid de moineaux
« Pourquoi tant de colère ? »
« Ces menteurs d’oisillons me reprochent
D’avoir tué mon père »
L’homme se trouble pâlit
Sur son front son crime se lit
Conduit devant les juges
Il avoue il expie
Le remords est parfois
Notre seule conscience

Florian ( 61 )

Dans une école à l’ancienne
Vivaient grâce au portier et aux écoliers
Une chouette un chat et un oison
Libres d’aller et venir dans la maison
Ils avaient orné leur esprit
Connaissaient par coeur Hérodote et Tite-Live
Un soir en discutant
Des docteurs c’est l’usage
ils comparaient les peuples anciens
Le chat préférait les Egyptiens si religieux
La chouette les Athéniens véritables citoyens
L’oison les Romains grands guerriers
Un rat savant
Toléré dans la maison
Parce qu’il mangeait les brouillons de papier
Cria :  » Les Egyptiens vénéraient les chats
Les Athéniens les chouettes
Rome les oies
Vos opinions que vous croyez savantes
Suivent ce que vous pensez être votre intérêt
Vous faites ainsi ce que chacun fait »

Florian ( 60 )

Un paon faisait la roue
Tous les oiseaux admiraient son plumage
Sauf deux oisons nasillards
Qui au bord de leur marécage
Critiquaient ses jambes ses pieds son cri
Qui ferait fuir jusqu’à la chouette
Les oisons riaient
Une oie de leurs parents leur dit :
« Votre chant et vos pieds sont plus laids
Et vous n’aurez jamais sa queue »

Florian ( 59 )

Un vieux renard cassé goutteux apoplectique
Mais instruit éloquent disert
Se mit à prêcher au désert
Ses thèmes étaient la probité la sincérité
Et la félicité qui en découle
Notre prédicateur n’avait aucun succès
Sauf auprès de trois biches âgées dévotes
Qui vivaient loin du bruit
Il prit le bon parti de changer son style
Il prêcha contre les lions les tigres les ours
Tous les tyrans petits et grands
Tout le monde accourut à ses sermons
Cerfs gazelles chevreuils y trouvaient mille charmes
Le nom du renard devint fameux
Le lion l’invite à la cour
Le renard se surpasse il tonne il épouvante
Sa condamnation des appétits gloutons
De la soif
De la rage sanguinaire
Suscita un torrent de larmes
Même le tigre y alla de ses pleurs
Le lion invita le renard
« Vous avez très bien parlé
Vous avez su me plaire
Je vous dois un juste salaire »
« Sire » dit le renard « pour commencer
Quelques dindons suffiront »

Florian ( 58 )

Minos juge des enfers
Etait dépassé par la tâche
Il inventa une balance
Pour juger les mérites de chacun
Il réunit deux rois un grand ministre
Un héros trois savants
La balance est négative
Un peu surpris il avise
Un pauvre homme de bien
Qui dans son coin attendait en silence
Là la balance est positive
Elle entraine même les autres vers le haut
Un seul homme de bien suffit-il ?

Florian ( 57 )

Une hermine un castor un sanglier
Cadets de leur famille
Partirent sans fortune
Dans l’espoir d’en acquérir une
Ils quittèrent leur forêt leur étang leur hallier
Après un long voyage plein d’aventures
Ils virent de loin un pays merveilleux
Mais il était cerné de toutes parts
Par un marais de bourbe
Où des serpents jouaient dans la tourbe
L’hermine avance un peu la patte
La retire aussitôt
Fait un saut en arrière
« Fuyons Je suis si délicate
Une tache me fait mourir »
« Patience soeurette » dit le castor
 » Je construis une digue
Sur ce pont nous irons
Sans craindre les morsures
Sans gâter nos fourrures
J’ai besoin de quinze jours »
« Ce terme est bien long »
Répond le sanglier
Il plonge au plus fort du bourbier
A travers les serpents les crapauds
Il marche jusqu’à son but
Plein de boue il se secoue
Jette à ses amis un regard de dédain
« Chacun choisit son chemin »

Florian ( 56 )

Deux enfants d’un fermier
Gentils espiègles beaux
Trouvèrent dans leur enclos
De petits perdreaux
Qui voletaient avec leur mère
Les bambins ramassent les perdreaux
La mère tourne voltige approche
Nos jeunes étourdis
Ont déjà la couvée en poche
Ils partagent en bons amis
Chacun en a six
Reste le treizième
Ils se le disputent
L’ainé le jette à la tête de son frère
Le cadet riposte d’un des siens
L’ainé recommence d’autant
Ce jeu qui leur plait couvre la terre
De perdreaux palpitants
Le père revient des champs
« Faut-il que dans vos tristes querelles
Des innocents meurent pour vous ? »

Florian ( 55 )

Un derviche un de ces pieux solitaires
Qui se détachent des choses d’ici-bas
Qui font voeu de renoncer à des biens qu’ils n’ont pas
Pour vivre de la générosité d’autrui
S’en allait mendiant et priant
Quand il vit chose extraordinaire
Un faucon nourrir une petite corneille gémissante
La tête encore à demi-nue
Dans son nid abandonné
Le derviche s’allonge par terre
Et attend en vain que le ciel lui rende le même service
Il baye aux corneilles
Il dîne en dormant
Le lendemain pas de déjeuner
Le faucon revient nourrir sa pupille
Et lui dit : « Allah nous recommande
Les faibles et les malheureux
Mais pas les paresseux
Je ne reviendrai pas »
Le derviche ému met le petit oiseau dans sa poche
Et marche vers un village
Pour y être valet de ferme
Nous ne recevons l’existence
Qu’afin de travailler
Pour nous et pour autrui

Hétéro a bouffé du lion

La force prime le droit
Le droit est une force
Les forces mystiques ne sont pas invisibles
Elles sont matériellement très sensibles
L’adepte de la force est fou
Sa folie le dévorera
Montre-lui sa folie
Il se considérera comme sage
La force des fanatiques est qu’ils font du zèle
Le pouvoir ne leur appartient pas
Les fanatiques ne sont pas malins
La malignité, vous connaissez ?
Les fanatiques servent une cause et sont utiles à une autre
Ils sont des mercenaires malgré eux
Ils ne s’en aperçoivent même pas
Ils ne savent pas que chaque pas est un but en lui-même
Jamais un fanatique n’a atteint son but
Le fanatique ne sait pas grand-chose
Il sait qu’il est un monument à la publicité
La force du fanatique est qu’il n’a pas besoin de preuves