Hommage à Audiberti

Jacques Audiberti fut au XX° siècle poète, romancier et dramaturge :

Si je mourais un jour
Je voudrais que ma veuve
Fasse un tour à mon bistro
Fasse le tour de mon parc
Salue le lent travail des Parques
De retour chez nous
Qu’elle écoute nos musiques
Qu’elle suive les rails
Mon épouse de décembre
Le train mène au bucheron ivre
Qui cisèle des masques
Il faut bien vivre
Sous terre les jours
Sont si lents

Hommage à Lamartine

Alphonse de Lamartine est un grand poète dont les positions modérées furent âprement critiquées. Ceci dit mieux valait la Deuxième République avec Lamartine que le Second Empire :

Les bois sont couronnés d’un reste de verdure
Les feuillages jaunissant
C’est les derniers beaux jours
Le deuil de la nature convient à ma souffrance
Rêveur sur le sentier solitaire
Je revois le soleil pâlissant
La nature expire
Dans un dernier sourire
Me montrant l’horizon de ma vie
Je voudrais vider jusqu’à la lie
Ma coupe de nectar et de fiel
J’y buvais la vie
Peut-être en son fond reste-t-il
Une goutte de miel
La dernière fleur tombe
Livrant ses parfums au zéphyr
Mon âme expire
Exhalant un son
Triste et mélodieux je l’espère

Hommage à Maurice Scève ( 2 )

Nous n’arrivons pas à quitter le XVI° siècle. Un premier hommage, plus conséquent, à Maurice Scève a été publié le 25/11/2013 :

Ma dame et moi sautons dans le bateau
Le pécheur pêche un gros poisson
Qui se débat tellement
Qu’il en retourne à l’eau
Ma dame se lamente :
« Qu’allons-nous manger ? »
Je la gourmande :
« Ma dame, pensez à la joie du poisson
Qui ne sera pas mangé ».

Le laboureur de sueur tout couvert
Se retire chez lui le soir
Pour prendre son repos
Moi d’amour tout rempli
Je m’attends que ma dame
M’accueille dans son sein si doux

Le gracieux soleil au printemps
Donne naissance aux primevères
Et moi je persévère
Dans l’amour de ma dame
Elle est absente
Je la suis

Cet ange à forme humaine
M’attire dans son domaine
Le paradis terrestre
Son soleil me dore à ses rais
Quand vient la pluie
Je me refais vite fait
Dans les bras de ma dame

Afrique

N’oublions jamais que nous demandons à certains peuples, même pas constitués en peuple, encore moins en nation, de faire en quelques dizaines d’années le chemin que nos peuples d’Europe occidentale ont mis quelques centaines, voire quelques milliers d’années à parcourir.
Dans une comparaison hâtive, on pourrait dire que, du temps du général de Gaulle, l’Afrique dans son ensemble ressemblait plus à la Gaule de César qu’à la France.

Hommage à Salmon

André Salmon fut au début du XX° siècle l’ami des peintres d’avant-garde :

Ce n’est pas facile d’être poète
Et pourtant c’est très aisé
Je n’ai pas osé regarder ma mère
Comme une femme
D’affreux insectes
Me percent les oreilles
Tu t’accroupis comme une sorcière
Pour faire je ne sais quoi
Tu te fâches : « Je ne suis pas une sorcière !? »
Je t’explique qu’il y en a
De jeunes et très jolies
Qui dansent toutes nues
L’après-midi
Si j’étais espagnol
J’aurais une guitare
Si j’étais matelot
J’aurais un bateau
Si j’étais ma maîtresse
J’aurais un amant
Qui ne l’aimerait pas
Eperdument

Esprit

J’ai l’impression qu’Hétéro Clite s’améliore :

Il y a toutes sortes d’esprits
Dont l’esprit du mal
La présence d’esprit
La vérité rendue plaisante
L’esprit qui met du sel dans la conversation
L’esprit de répartie
La gravité est souvent un faux semblant
L’esprit jamais
Il arrive que des crétins soient pris
Pour des hommes d’esprit
Il ne faut pas avoir trop d’esprit
Ce n’est pas avoir de l’esprit
Que de s’en servir pour cacher sa folie
Il ne faut pas courir après l’esprit
On en a ou non
L’esprit de beaucoup consiste à se taire
L’esprit à lui seul ne mène à rien
Le meilleur de l’esprit est encore dans les livres
Je cherche un esprit
Si possible un esprit frère
Mais je préfère l’humour à l’esprit
Car l’humour se moque de soi-même
L’esprit se gausse d’autrui

Hommage à Tristan ( 2 )

Tristan L’Hermite est toujours du XVII° siècle. Son précédent poème a été translaté le 31/10/2013 :

Ebloui per l’éclat de la vie mondaine
Je me suis flatté d’une espérance vaine
J’ai joué au chien couchant
Auprès de qui était plus riche
Plus considéré plus considérable que moi
J’étais pauvre Je tâchais de paraître
J’étais dans le malheur J’amusais la galerie
Heureusement je ne suis plus ce triste sire
Je suis mort en me rendant au bal

Hommage à Marguerite de Navarre

Soeur de François Ier, Marguerite de Navarre fut une remarquable femme de lettres au XVI° siècle. Voici deux poèmes :

L’ami vivant et vif
Embrassa dans son tombeau
La dame morte
La dame soupira :
« Mon bon ami, laissez les morts
Vivre avec les morts »*

* le vers de Marguerite de Navarre est « Laissez les morts ensevelir les morts »

J’aime une amie
La hanter l’ouïr la voir
Me ravissent à loisir
Un mal pourtant la ronge
Son corps est parfait
Son visage l’est aussi
Son coeur bat
Sans amour

Hommage à Hellens

Franz Hellens fut de Bruxelles au XX° siècle :

La femme se peigne
Elle rassemble sa chevelure noire
La divise par le milieu
On voit enfin son visage
La ville ne se peigne pas
Mais ses nuages
Arrivant en cascades
Créent l’ombre de cheveux noirs sur un visage
Les toits rouges sont du sang répandu
Sur une joue à l’ovale adouçi
Les lèvres de porphyre
Sont d’un monument disparu
Il subsiste une fontaine
Qui fait comme un trou
Dans ma tête
Le couteau du soleil fait fuir
Les noirs cheveux nocturnes

Mandela

Mandela vient de mourir. Je me souviens, il y a plus de vingt ans, l’Union Soviétique disparaissait, Mandela surgissait. J’avais le souvenir du jeune homme un peu gros de visage. J’ai attendu des heures devant ma télévision. J’ai enfin vu un noble vieillard dominant une foule, le Mandela que nous allons pieusement conserver, « Madiba » pour les siens. Il est rare qu’un homme représente autant d’espoir et autant de réussite politique, incarne à ce point un peuple et une nation dans un esprit de réconciliation, de fraternité. Mandela ou la victoire de l’humanisme.
Je souhaite associer à cet hommage le président De Klerk, qui a libéré Mandela et a participé à son élection triomphale en 1994.
Nelson Mandela, en étant le père de la nation « Arc-en -ciel », est devenu le père de toutes les nations.