De l’âme

Il est d’autres visions de l’âme :

Les âmes se cachent
Ce n’est pas la peine de les raisonner
Ennemie du coeur l’âme l’est de la raison
Les âmes sont en exil
L’âme est une flamme
L’âme est l’infini dans le fini
L’âme n’a pas de pays
L’âme ressemble à un petit enfant
L’âme échappe au temps
L’âme n’aime pas l’amour
L’ame n’est ni laide ni belle
L’âme est un océan qui tient dans un verre d’eau
Il n’y a pas de progrès de l’âme
Ni bonne ni mauvaise l’âme est pure volonté

Hommage à Supervielle

Jules Supervielle fut un poète important du XX° siècle :

Mes amis connus sont peu nombreux hélas
Heureusement mes amis inconnus sont innombrables
Une étoile est née au dessus de ma tête
Elle voudrait chanter mais les étoiles sont muettes
Un oiseau se presse à mes côtés
Qu’est-ce qui le presse ?
Il se pose sur une branche
On dirait n’importe quelle branche
Il vous nait un ami et voilà qu’il vous cherche
Son coeur bat des jours qu’il n’a pas vécus
Vais-je reconnaître mes amis lointains ?
Leur ai-je fait du mal ?
Qu’ont-ils de commun, bêtes, passants, oiseaux ?
Pardon pour mes mots parfois inconsidérés
Heureusement j’ai un double
Face aux astres hostiles
Il est pire qu’un mort qui ne peut pas dormir

Hommage à Gringoire

Pierre Gringoire était bien vivant vers 1500 :

On n’est jamais que le roi des cons
La connerie se porte bien
La science est technique ce n’est pas humain
La science est une le bon sens se veut un
La puissance de la connerie
Réside dans sa diversité extraordinaire
Cons lunatiques cons étourdis cons sages
Cons niais cons subtils cons gentils
Cons exprimés cons dépassés cons patibulaires
Cons premiers cons deuxièmes cons triplés
Cons vieux cons nouveaux cons amoureux
Cons déprimés cons possédés cons titulaires
Cons barbares cons étrangers cons cultivés
Cons raisonnés cons pervers cons tête-en-l’air
Je n’aurais garde d’oublier les connes
A elles aussi tout est bon pour être con
Je ne pourrais terminer cette liste
Même Dieu s’il existait ne le pourrait
Pourtant c’est l’immensité de la connerie
Humaine trop humaine
Qui donne l’image de l’infini divin
La conclusion de ce poème
Est que nous sommes tous cons

Musiques

La musique dite sérieuse de notre époque, point terminal d’une longue évolution, relevant de la « modernité », est quasiment inaudible. On rêve de programmer un ordinateur afin qu’il produise une composition parfaite, mais, elle, parfaitement inaudible.
Il n’y a pas de muraille de Chine entre les musiques. La musique dite classique, ce qui veut dire ancienne, est dans une large mesure facile. Des groupes contemporains de musique juvénile, comme Kraftwerk ou Daftpunk, sont plus savants que bien des morceaux patinés par l’âge.
Mais il est vrai qu’au coeur de la musique dite classique on trouve le plus haut niveau intellectuel et spirituel, Bach, Beethoven, certaines pièces de Liszt, de Webern, de Stravinsky, Etc…, Etc…

Hommage à José-Maria

José-Maria de Hérédia était au XIX° siècle d’origine cubaine :

A l’avant des caravelles ils regardaient monter
En un ciel ignoré des étoiles nouvelles
Leur sommeil était enchanté par des rêves épiques
Faits de sac et de corde ils n’en rêvaient pas moins
Leur cruel appât du gain leur soif de l’or s’apaisaient
En regardant la mer phosphorescente et les poissons-volants
Sous les tropiques
Ces vagabonds nus-pieds étaient héroïques
En contemplant sans le savoir
Les premiers rivages de l’Amérique

Enthousiasme

Hétéro frappe encore. Je ne suis pas en désaccord avec lui :

Malheureux, ne perd pas ton enthousiasme
Il doit être ton bien le plus cher
Si tu l’abandonnes tout t’abandonne
Si tu tiens bon, tu renoueras peut-être avec le succès
Répète-toi que rien de bon, de grand ne s’est fait sans enthousiasme
L’enthousiasme est divin, l’enthousiasme est humain
Même dans d’humbles tâches, si tu le peux, sois enthousiaste, tu les supporteras mieux, tu les feras mieux, tu les feras plus vite, tu en sortiras content de toi.

France

Le général de Gaulle, qui mieux que personne, a témoigné d’un patriotisme français ( la France , son cher « vieux pays » ) a écrit :  » …, seules de vastes entreprises sont susceptibles de compenser les ferments de dispersion que son peuple porte en lui-même ». Où sont actuellement les vastes entreprises ? Le général a dit aussi : « Comment voulez vous gouverner un pays où il y a trois cent sortes de fromages ? ».
Joachim du Bellay a écrit ce vers magnifique, souvent cité :  » France, mère des arts, des armes et des lois ». Les arts ? New-York a supplanté Paris. Mais Paris reste une ville très active. Il suffit de voir le nombre de manifestations culturelles. Les armes ? La France est secondaire dans le concert des nations. Mais son intervention un peu tardive en Centreafrique montre qu’elle reste sur certains champs indispensable. Des lois ? La France est la championne du monde dans le domaine des lois trop nombreuses, mal fabriquées, peu appliquées. Curieux reflet de sa gloire passée ? Traduction d’un malaise profond ?

Hommage à Isaac de Benserade

Isaac de Benserade fut un poète mondain au XVII° siècle :

Chère madame je vous donne cet oiseau en cadeau
Sa valeur est inestimable
Ne l’invitez pas à votre table
Même bien cuit il n’est pas mangeable
Entendez le chanter Il vous rendra à coup sûr la santé
Il est très efficace contre les maux de ventre d’estomac
Mais aussi contre les migraines
Il lui suffit de quelques graines
Pour devenir drogue souveraine
Votre chère amie Sylvie le voyant chez moi l’autre jour
M’a assuré qu’il s’agissait là d’un oiseau d’amour
Elle m’en a offert beaucoup d’argent
Je vous cachais le meilleur pour la fin
Il n’aime rien mais rien tant que sa cage
Pour y déployer à la fois son plumage
Et son ramage
Chère amie saurez-vous être la cage dorée
Dont mon pauvre oiseau a rêvé ?
J’oubliais, son nom est Signe

Hommage à Tristan Corbière ( 2 )

Plus je lis Tristan Corbière, plus je l’aime :

Il se tua au travail pour mourir de paresse
Il ne vécut que par l’oubli
Son seul regret : ne pas être sa maîtresse

Il fut un mélange hétéroclite de tout
De « je ne sais quoi » à « je sais pourquoi »
De l’or à « sans le sou »
De la vigueur à manque de nerf
De l’âme sans esprit
Du trop de noms pour avoir un nom

Chercheur d’idéal sans une idée
Rime riche jamais rimée
Poète en dépit de ses vers
Toujours parti déjà de retour

Philosophe à tort et à travers
Drôle sérieusement pas drôle
Peintre il faisait de la musique
Bref une tête sans tête

Trop fou pour faire la bête
Oiseau rare de pacotille
Très mâle parfois très fille
Capable de tout et bon à rien

Mettant les pieds dans le plat
Incompris par lui-même
Ni quelqu’un ni quelque chose
Son naturel était la pose

Trop cynique étant naïf
Ne croyant à rien avalant tout
Trop cru étant bien cuit
Flâneur ou épave

L’esprit à sec et la tête ivre
Il vécut en s’attendant à mourir
Il mourut en attendant de vivre

Hommage à Hugues

Hugues de Saint-Maardt, vicomte de Blosseville, est de la fin du XV° siècle :

Il y a grand’ peine à vivre
Pourtant ne veut-on pas mourir
La mort de tous maux nous délivre ?
A tout prix voulons-nous vivre

La raison à la mort nous livre
Rien ne peut nous secourir
Il y a grand’ peine à vivre
Pourtant ne veut-on pas mourir