Kokto se lève tôt et chante réveillant son petit monde et tout le voisinage qui n’en peut mais
Kokto caquète et picore entouré de ses poulettes
Kokto ne prend pas les graviers pour des perles
Il les avale pour se garnir le gésier de fausses dents
Kokto se couche tôt
Il mène une vie à bien des égards exemplaire
Tout le monde devrait imiter le coq Kokto
Le coq Kokto fait bien ce qu’il fait et mal ce qu’il ne fait pas
Hasard
Notre univers s’est créé par hasard. Admettons, à titre d’hypothèse de travail. Il s’en est suivi une immense série de hasards qui ont fait l’histoire de notre monde. Admettons toujours.
Le problème est que de ces hasards nous faisons une nécessité. Opération divine qui fait de nous des dieux. Le hasard non seulement est nécessaire, il est devenu la nécessité même. Bien sûr au passage le hasard ( hasardeux ) et la série ( nécessaire ) des hasards ont été occultés.
Ces hypothèses ( de travail, toujours ) nous laissent curieusement seuls devant l’avenir. Seuls, mais libres. Libres d’une étonnante liberté d’ignorance. L’avenir n’est pas prévisible, pas prévisible du tout. Il n’appartient à personne. Grâce au hasard !
Par contre le passé résiste. Certes certains d’entre nous ne peuvent s’empêcher de faire des hypothèses farfelues sur le passé, par exemple le rôle des extra-terrestres dans la première fondation de la civilisation égyptienne. Mais le passé fait de la résistance. Lavé des insultes et des superstitions il ressurgit magnifique et misérable.
Hypothèse, hypothèse, quand tu nous tiens !
Synthèse
Nous avons rencontré plusieurs fois le rythme ternaire dans une sorte de musique qui serait celle de l’esprit, de certains esprits de façon différente ( CF. article du 19/10/2013 )
Il n’a pas de synthèse, mais nous nous proposons de parler de synthèse.
Vers 1960 on nous apprenait que Sciences Po pratiquait le plan en deux parties du genre : oui-non ou oui-mais que Giscard allait illustrer dans son opposition feutrée au général de Gaulle. Par contre la Sorbonne proposait le plan en trois parties : thèse-antithèse- synthèse.
L’origine « sorbonicole » est à chercher dans la scolastique médiévale, ses « disputationes », dans la rhétorique mise à la mode par l’humanisme classique, ses dissertations.
Hegel a dynamisé le tout en l’objectivant, en le rendant réel dans l’Histoire. Il n’est pas question ici de résumer la pensée complexe de Hegel. Je renvoie le lecteur attentif à mes ouvrages : « Histoire de la pensée historique » ( 1991 ) et « Le Béhémot. Essais sur la Duplicité de l’Histoire » ( 2000 ).
Je peux cependant formuler une hypothèse simple : après l’effacement programmé de la Trinité fondatrice commence une histoire exempte de miracles, faite de contradictions successives. La première série de faits agit comme une thèse qui suscite son antithèse. La conclusion synthétique est provisoire. Elle se transforme en thèse qui suscite à son tour une antithèse à un niveau supérieur de l’Histoire.
A l’époque de Hegel, ce niveau supérieur est représenté au niveau de la religion par le protestantisme luthérien, au niveau de l’Etat, agent principal de l’Histoire humaine, par l’Etat prussien, au niveau de la philosophie par Hegel lui-même.
Hegel ne nous dit pas comment cette synthèse va évoluer.
Crapaia
Crapaia nata une fois Crapaia nata deux fois
Crapaia et Crapaia Crapaiae Je n’ai pas fait du latin pour rien
Crapaia la deux fois née n’est ni un crapaud ni une crapaudine
On la croise le soir sur la promenade noyée de rouge par le soleil
Elle hante les braves gens que l’espoir fuit
Et qui se promènent en famille l’air complaisant
Gais et contents avec leur bonne qu’ils ne tiennent jamais par la main
Crapaia est une ondine
Elle seule est nue
De mort enivre-toi esprit malfaisant
Ne terrifie pas l’ondine
Crapaia nous lui avons donné vie pour la seconde fois
Machin
Le machin bleu t’obsède avant que la roue tourne et que ses cheveux tombent par terre Laisse le machin bleu pauvresse au beau chignon Ne vois-tu pas les mousquetaires qui galopent ventre à terre dans la boue et la poussière pour te faire un brin de cour Il n’y a que ça de vrai l’amour Laisse ton truc bleu pauvresse au beau chignon à moins qu’une lucarne ouverte par hasard dans ton esprit bébête donne sur l’espoir et que ce poison te tue fille mutilée J’ai eu tort de me moquer Laisse tomber les mousquetaires qui galopent Regarde le ciel bleu le sorcier des baleines le mont des Avaloirs ce qui reste de Seine la Casamance noire et la fée de tes veines
Irgiane
Irgiane mort de cet amant transi étends-toi sur cette vitre noire où hurlent des cierges venus de loin rabaissés par l’accumulation des fleurs gémissantes qui craignent la vérité venue de loin car morte tu es avant d’être née infâme qui le mange hors de la vie triste et simple lac pur de l’oubli où il craignait sans cesse l’aventure qui traine la torture comme un chien mais le ciel s’est ouvert et a laissé passer l’orage et dans cet écroulement tu es venue et tu l’a pris tu l’as ballotté sur ces vagues énormes qui naissent dans tes lèvres où il s’enivre de tes parfums morbides où il puise sa succulente mort parce qu’il vit trop et que craintif le coeur affaibli il ne peut que mourir et qu’il ne mérite pas ces joies que tu lui donnes car il voudrait l’étendue calme l’insouciance étale et tu jettes la pâtée à son orgueil à son angoisse absolus qui le jettent au désespoir et jamais m’entends-tu jamais il n’atteindra l’immaculé du blanc
Le vent sur le lac
Le vent hurle sur le lac
Les roseaux sont penchés
Les oiseaux sont cachés
Le ciel et l’eau se confondent
Le vent s’apaise
Le soleil chasse les nuages
Les oiseaux chantent
Les roseaux sont debout
Le ciel surplombe le lac
Toujours revient le vent
Parure éphémère le feu
Brûle la montagne
Le vent doux souffle sur le lac joyeux
Formation sociale
Je préfère le terme « formation sociale’ au classique « formation économico-sociale ». La formation sociale désigne le fait qu’une société historique comprend normalement deux ou plusieurs modes de production, plus ou moins en inter-relation, permet ainsi de remonter vers le concret.
Prenons le Brésil d’aujourd’hui. Sa formation sociale comprend :
_ Le mode de production communautaire des dernières sociétés amérindiennes.
_ Le M.3.P. ( mode de production des petits producteurs ) des innombrables fermes et échoppes.
_ Le capitalisme sous des formes diverses, y compris un secteur monopolistique d’importance mondiale.
_ Le féodalisme amoindri des grands « latifundios », des grandes propriétés foncières.
_ Le secteur d’Etat.
C’est un bon exercice de rechercher les formations sociales dans l’Histoire. Au delà l’histoire que j’ose appeler historisante prend toute se place, qui est fondamentale.
Je rappelle que le concept de mode de production est essentiel au niveau de l’histoire universelle parce qu’il permet l’histoire comparative des sociétés et des types de société.
Cocteau
Jean Cocteau a dit : « Je déteste la mode parce qu’elle meurt jeune ». Il a dit aussi : « Le terrible dans le fait de vieillir, c’est qu’on reste jeune ». Cocteau était un touche-à-tout de génie, excellant dans tout ce qu’il faisait, en poésie, dans le roman, au théâtre, au cinématographe, dans le dessin, en peinture. Il fut peut-être le dernier des grands mondains tout en gardant sa délicatesse. Arielle Dombasle nous a rappelé sa relation amoureuse avec Raymond Radiguet, nous nous souvenons de celle avec Jean Marais. Dans un miroir Cocteau voyait la mort travailler à la façon des abeilles.
Comme disait Diana Vreeland, la grande prêtresse de la mode new-yorkaise, née à Paris : « Je mourrai, mais je resterai jeune ». Elle disait aussi : « La mode annonce les révolutions ».