Nous sommes dans une période de droite. En 1974 même Giscard d’Estaing était un réformateur avisé avec la majorité à dix-huit ans et le droit à l’avortement. En 2013 Hollande patine sur une absence de croissance, commune à l’Europe occidentale toute entière. Il est emberlificoté dans des promesses de campagne qu’il ne pouvait que trahir. Sa situation évoque celle de Chirac en 1995 qui a du renoncer à son thème de la « fracture sociale ». Doit-on mentir pour se faire élire ?
La social-médiocratie , c’est à dire la social-démocratie, est au pouvoir, tient même quasiment tous les pouvoirs, y compris le Sénat et l’immense majorité des régions. Nous nous souvenons de ses trahisons, le vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain en 1940, la répression contre l’indépendance de l’Algérie en 1956. Jeune militant socialiste, j’ai vécu douloureusement cette période.
Après m’être radicalisé, je suis de nouveau social-démocrate, faute d’alternative crédible. Mais il ne s’agit en aucune façon d’abdiquer, de renoncer à son esprit critique. Je soutiens encore Hollande. Mais je dois avouer que, depuis quelques semaines, je suis frappé par un déficit de communication au plus haut niveau de l’Etat. Le plus grave a été probablement pour Hollande d’annoncer avec emphase un arrêt de la hausse des impôts en 2014 quelques jours avant que des milliers de Français, qui ne payaient pas l’impôt sur le revenu, ne reçoivent leur première feuille d’imposition.
Nous sommes condamnés à vivre encore longtemps en système capitaliste. Encore faut-il en connaitre les lois. Quitte à être des social-médiocres, soyons du moins compétents.
Rugby
Dans mon enfance autour de moi personne ne connaissait le rugby. Je lisais un petit journal pour enfants, franco-belge, « Will », qui répétait à satiété que le rugby est un sport violent, fait pour et par des brutes, qu’il ne faut surtout pas s’y intéresser. En 1958, j’avais vingt ans, j’ai découvert, grâce à la télévision, un match de rugby. J’ai été émerveillé, fasciné. Une des raisons est que le rugby offre des possibilités à toutes les carrures. Les petits et lents comme moi peuvent penser être demis, jouer à la mêlée ou à l’ouverture. L’étrange mêlée manifeste un étonnant esprit de solidarité dans le combat. Je continue à trouver merveilleux que quelqu’un, un Anglais, ait inventé le ballon ovale. Je trouve ça bien intéressant que la France soit le seul pays à rivaliser depuis un siècle avec les nations britanniques, que justement il y ait des nations en Grande-Bretagne, le pays à la rose, l’Angleterre, la pays au chardon, l’Ecosse, le pays au poireau, le Pays de Galles, le pays au trèfle, l’Irlande, le rugby étant de reste l’une des rares activités à unifier l’Irlande du Nord, l’Ulster, et l’Eire… Le rugby me parait bel et bien « un sport de voyous joué par des gentlemen »…
Indo-européens
D’après Georges Dumézil les Indo-européens anciens voyaient le monde en trois. Rappelons qu’un petit groupe d’Eurasie centrale a commencé d’essaimer au plus tard au début du II° millénaire avant le Christ. Il a atteint rapidement l’Inde du Nord. En Europe occidentale il a été fondamental à partir du début du Ier millénaire avant le Christ sous le nom de Celtes. Seuls les Basques ont pu résister. Nous sommes les héritiers de cette gigantesque « promenade des peuples ». Nos langues en témoignent.
Les triades se sont multipliées. Les triades divines, mais aussi les sociologiques. En haut les prêtres, juste dessous les guerriers, en bas les paysans et artisans. Nous avons là la structure d’un système de castes endogames et héréditaires. Il a profondément marqué l’Inde, encore aujourd’hui.
Vers l’an 1000 après le Christ, en Europe occidentale, sur la même base structurelle s’était constitué un système moins rigide d’ordres, le clergé, la noblesse, la paysannerie.
Est-ce un hasard si les populations européennes, jusqu’à l’Oural et au delà, se sont converties au christianisme, à sa Sainte Trinité, et lui sont restées fidèles jusqu’au XX° siècle ? Par contre les Sémites du sud et de l’est de la Méditerranée ont choisi majoritairement l’Islam hanté par l’Unité.
Une énigme : l’Iran. Ces indo-européens ont préféré d’abord le dualisme de Zoroastre ( Zarathoustra ) à partir du VI° siècle avant le Christ. Mais au XVI° siècle après le Christ, la Perse, héritière de l’Iran antique, sous la dynastie des Séfévides, a choisi majoritairement l’Islam chiite. Cette variante de l’Islam est plus tragique, elle porte à la condamnation violente des adversaires; prolongement du dualisme, du manichéisme ? Ce serait ainsi que les Etats-Unis seraient devenus le « grand Satan » ??
Je ne propose qu’un schéma d’explication, l’Histoire est beaucoup plus complexe.
Le penseur
L’homme est le seul penseur
Peut-être
Mais toute chose éclate d’infini
Si la liberté humaine
Ne dispose
Que de l’univers absent
Elle est néant
L’esprit ne nait
Que dans l’action
Qu’à la nature éclose
Son être tout puissant
L’homme est un dieu peut-être
Mais c’est un dieu caché
S’il ne soulève pas
L’écorce des pierres
Il reste hermétique
Un absurde mystère
Empires du Milieu
L’Humanité compte deux empires du Milieu.
La Chine est la seule à s’être appelée Empire du Milieu, créant ainsi l’expression. Il faut dire que pendant longtemps elle fut seule à être civilisée au milieu de barbares.
Le deuxième empire du Milieu, sans le savoir, est la France. Elle unit le Nord et le Sud de l’Europe, de la Mer du Nord à la Méditerranée !
Sur un territoire relativement réduit, mais important à l’échelle, au coeur de l’Europe Occidentale, la France offre une impressionnante diversité de paysages, des débuts de la grande steppe européenne à l’extrême nord aux maquis méditerranéens.
Son histoire, sur plus de mille ans, sans compter son passé gaulois et gallo-romain, montre une grande diversité d’influences dont il ne faut oublier aucune.
Cette diversité était un obstacle à l’unité qui n’a été réalisée progressivement que par l’Etat, royal, révolutionnaire, républicain. La Chine non plus n’existe pas sans Etat. Un autre point rapproche les deux empires, leur amour de la gastronomie.
A notre que l’immense Chine est beaucoup plus ancienne et beaucoup plus diverse, du froid sibérien aux chaleurs tropicales, des immenses étendues désertiques de l’Asie centrale aux influences de l’océan Pacifique. Il ne faut pas outrer la comparaison.
Raison, morale, émotion
Raison ( logique ), morale ( éthique ), émotion ( affectif ).
Schiller reprochait à Kant que sa morale manquât complètement d’émotion, de sensibilité.
A noter que nous retrouvons notre fameux troisième terme ( article du 10/10/2013 ).
Sensitif, sensible, intelligible.
La hiérarchie n’est plus la même et n’a pas la même signification.
Certains, pour toujours ou à certains moments, privilégient le témoignage de leurs sens. Ils sont sensitifs.
D’autres combinent le concret de leurs expériences vécues avec le travail du raisonnement. Ils sont sensibles.
D’autres encore privilégient l’abstraction du concept. Ils sont dans l’intelligible.
Certains voient la monde en Un, les monothéistes radicaux, juifs, musulmans.
D’autres, peu nombreux, voient le monde en Deux, grâce à l’opposition radicale du Bien et du Mal : les disciples de Zarathoustra, puis ceux de Mani, les manichéens.
D’autres encore voient le monde en Trois, les chrétiens.
Trois profils ontologiques, trois visions du monde.
Les trois sont possibles, compréhensibles.
Il est intéressant de voir qu’un grand monothéisme ait retrouvé le chiffre trois, le troisième terme.
Que l’on soit devant une triade aux termes différents en essence, une trinité aux termes identiques en essence, quelque chose d’autre encore, c’est l’importance du chiffre trois qui est intrigante.
N.B. : CF. l’article de ce blog : « Triade / Trinité » du 5/10/2013
Post-modernité
Un des plus grands regrets de ma vie est d’avoir sous-estimé pendant trente ans la post-modernité. Je n’y voyais que petites turbulences autour de la modernité. Dès 1964 je savais quelque chose de l’opposition entre baroque et classicisme, auxquels succédaient le romantisme, puis la modernité. J’ai fini dans les années quatrevingtdix par dater la modernité des années 1860, de Flaubert et Baudelaire, de Courbet et Manet pour la faire terminer dans les années 1960 qui ont vu les premiers triomphes de la post-modernité.
Telle que je la conçois, la modernité est volonté d’aller au bout des possibilités de l’art, à partir de ses codifications traditionnelles, avec d’un côté une volonté de réalisme, un fort désir de se rapprocher de la réalité, de l’autre une volonté de renouveler les symboles esthétiques.
La post-modernité conteste ou détruit le concept même d’art. Tout devient art. Tout devient question de regard : la même chose anonyme, anodine, voire vulgaire, devient artistique si on la regarde comme telle. Certains ont même parlé d’an-art, de disparition de l’art.
Je fais volontiers débuter la post-modernité avant même 1960 avec le peintre américain Jackson Pollock, dont les giclures ont évoqué pour certains les mathématiques fractales. Nos cités sont envahies par les « graff »; les « tags » du « street-art », nos maisons par des variations généralement géométriques sur le mode illustré par Keith Haring que j’ai déjà cité dans ce blog.
Le déclin de la France
La France est ma mère. C’est le pays où je suis né. C’est le pays où j’ai vécu l’essentiel de ma vie en dehors de longs séjours de travail en Algérie, au Canada et de voyages fructueux… La France est ma femme et ma fille…
J’adore la France. Il me reste un soupçon de chauvinisme. A quatorze ans je pensais que la France avait tout inventé. J’ai viré ma cuti. Je suis devenu internationaliste. J’ai laissé à la France un rôle éminent dans le choeur des nations.
Pendant à peu près cinquante ans, des environs de 1860 à ceux de 1910, la France a montré une fécondité prodigieuse, de la bicyclette à l’avion, nom que lui a donné Clément Ader, en passant par l’automobile, de Pasteur à Marie Curie, de Flaubert à Proust, de l’impressionnisme au cubisme, de la photographie au cinématographe, invention des frères Lumière illuminée par Méliés, etc…, etc… , de Jules Verne à l’invention du Tour de France… La poésie française a selon moi connu son apogée à cette époque, de Baudelaire et Hugo à Apollinaire, en passant par Verlaine, Rimbaud, Mallarmé et d’autres dont Laforgue et Toulet …
Avant 1910, date fondatrice de la république portugaise, la France était la seule république d’Europe en dehors de la Confédération Helvétique et de la minuscule San Marino en Italie… 🙂
Dans les années 2010 il n’est pas question que la France joue un tel rôle. Le progrès intellectuel et technique dépend désormais, dans une large mesure, des Etats-Unis d’Amérique. C’est eux qui ont lancé la révolution informatique, qui sont dominants dans la cinématographie mondiale, y compris les séries télévisées, qui raflent de plus en plus de prix Nobel, au profit de plus en plus d’Américains de souche, …
Non seulement la population française ne représente plus que le centième de la population mondiale, en dépit de sa bonne santé démographique, accentuée par une immigration largement positive, améliorée par le grand nombre de mariages mixtes, mais sa production industrielle, qui est encore au 5° rang mondial, va régresser…
Pas de pensée mécanique. La population française vers 1800 était au premier rang européen, à parité avec la seule Russie. En 1900 elle était dépassée par la Grande-Bretagne et l’Allemagne. La santé d’une nation ne dépend pas d’un seul facteur.
J’admire pour ma part la détermination de pays comme les Pays-bas et la Suisse à être eux-mêmes. La richesse de l’Europe, c’est d’abord sa diversité. A chacun de jouer sa partition dans l’orchestre européen.
Il est normal de laisser leur place aux BRIC, les grandes nations émergentes que sont le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine, puis à l’ensemble des pays en voie de développement.
Le véritable déclin serait de ne pas lutter pour que la France garde son rang comme le proposait le général de Gaulle, son rang de nation républicaine qui restera fondamentale du point de vue intellectuel et spirituel au nom de l’Humanité.
Sur les ruines des peuples qui se sont rués les uns contre les autres dans deux guerres mondiales, vive le nation européenne ! la grande Nation multi-nationale !
Le cheval noir
La tempête est frémissante
La fleur immense
La couronne d’air pale
Elle ose te donner
Ton parfum d’herbe
O mon doux cheval noir
Les fleurs ne font pas croire au mal
Qui les écrase
Les fleurs qui meurent l’été
Se marient à la douceur bleutée
Le bel enfer glace leur coeur ouvert
Sur le masque à eau de lilas
Les statues deviennent aveugles
Il n’y a plus de fantômes
Poésie squelettique
Pour un ciel crucifié
Le sexe solaire
Labourant la mer
La féconde de chimères
Qui te ressemblent
O mon doux cheval noir
Enterrement
Tu te délivres du ciel immense
Maîtresse mouche du cortège
Félicienne marchait à pas lents
Derrière le berceau
Du nouveau né funèbre
La vie et la mort avançaient
Vers on ne savait trop
Quelle destinée très vide
Au même pas de deux rosses
Soulevant à flots lents
Leurs flancs imbéciles
Félicienne soupira et sortit un mouchoir
Un éternuement sortit du corbillard