APC 120

Quand je suis ivre rien ne m’arrête
Qu’ai-je à attendre de ma verve ?
Mérite et gloire se noient dans la lie
L’arak inonde grandeur et déclin
La fermentation recouvre l’arc-en-ciel des ambitions
Les ratés raillent Les connaisseurs donnent raison

Un hameau solitaire s’estompe au couchant
Brume légère arbres antiques corbeaux dans la froidure
L’ombre d’une grue volante rase le sol
Montagne bleue Eaux vertes
Herbes blanchies feuilles empourprées fleurs dorées

*

Je repique après la pluie les plants de mes pastèques
Quand le temps est sec j’irrigue le chanvre
J’échange des nouvelles du village avec des paysans
Toute ma vie se résume dans une cruche de vin trouble
L’univers de l’ivresse est infini
Laissons en paix les saules et le vent

Je quitte les monts bleus
J’arrive à la chaumière enclose de bambous
Les fleurs sont sauvages autour du sentier
Le vin rustique jaillit de la gargoulette
J’ai bu je ne suis plus maître de moi
Des jeunes gens de la montagne
Parent mes cheveux blancs de chrysanthèmes

Les septuagénaires sont rares
De ces soixante-dix années
Dix vont à l’enfance ignorante
Dix à la vieillesse débile
Restent cinquante années
Une moitié de jour
Vent et pluie se succèdent
Les premiers cheveux blancs
J’ai bien réfléchi
Il vaut mieux vivre gaiement à l’aise