Rab 83

Toutes les étoiles palpitent en moi
Le monde jaillit dans ma vie
Comme de l’eau courante
Les fleurs s’épanouiront dans ma vie
Le printemps monte dans mon coeur
Le souffle des choses chante en moi

Je suis à la porte de la terre endormie
J’ai peur de chanter pour des étoiles muettes
Je veille jusqu’à ce que ton ombre
Passe sur le balcon de la nuit
je m’en retourne rempli de toi
Le matin je chante sur le bord de la route
D’un air légèrement idiot
Les fleurs me répondent l’air écoute
Les voyageurs croient que je les appelle par leur nom

Garde-moi près de la porte
Attentif à tes désirs
J’accepte ton appel
Je ne tombe pas dans un abîme de douceur
Ma vie est appauvrie par inaction
Les distractions ne m’aveuglent pas de leurs doutes
Je ne suis pas plusieurs chemins
je recueillerais trop de choses
Mon coeur ne se courbe pas devant quiconque
Seul ou à plusieurs
Je porte haut la tête
Dans le courage d’être à toi

Rab 82

Ton nom
Je prononce ton nom
Je suis le seul à prononcer ton nom
Je suis assis au milieu des ombres
De mes pensées silencieuses
Je le prononce sans paroles
Je le prononce sans raison
Je suis pareil au petit enfant
Qui répète mille fois : « maman »

Rab 81

Tu veilles le temps éternel
Tu prêtes l’oreille à mes pas qui approchent
Ton heureuse ardeur se recueille dans l’aube
Pour jaillir dans la lumière qui éclate

Plus je m’approche de toi
Plus grandit la ferveur dansante de la mer
Tu tiens le monde comme un rameau de lumière
Il remplit tes mains
Ton ciel réside dans mon coeur secret
Lentement ses fleurs en boutons
S’épanouissent en un timide amour

Rab 80

Quand tu demeurais volontiers solitaire
Tu ne te connaissais pas
Tu ne connaissais rien
Le vent des rivages n’avait pas de message
Je suis venu Tu t’es éveillée
Les cieux ont fleuri de lumières
Tu me fis éclore parmi les fleurs
Tu m’as bercé dans toutes sortes de berceaux
Je m’étais caché dans la mort
Tu m’as retrouvé dans la vie

Je suis venu ton coeur a palpité
Il bat pour la joie et la douleur
Tu m’as juste effleuré
Tu fais tressaillir l’amour

Une lueur de honte passe dans mes yeux
Un sursaut de terreur griffe mon sein
Mon visage se voile tout tendu
Je pleure quand je ne te vois plus
Je connais ta soif inextinguible pour une claire vision de moi
Ta soif qui crie à ma porte
Aux coups répétés du soleil qui se lève

Rab 79

Je te prie d’être préservé des dangers
Multiples de la vieillesse
Mais je souhaite les regarder en face
Je ne demande pas l’apaisement de ma souffrance
Mais le coeur nécessaire pour la supporter
Je n’ai pas besoin d’alliés dans la bataille de l’existence
Je compte sur mes propres forces
Je n’implore rien avec criante crainte
J’ai foi en ma patience pour reconquérir ma liberté
Accorde-moi de n’être pas ingrat
Je dois mes succès à ta gentillesse ta mansuétude
Je ne dis certes pas ta miséricorde
Il ne faut rien exagérer
Je succombe si ta main desserre son étreinte

Rab 78

Tu as donné tes chants aux oiseaux
En retour ils te donnent les leurs
A moi tu n’as donné que la parole
A ta demande je chanterai

Tu as créé les vents légers les brises apaisantes
Nos navires sont à leur service
Tu as mis le fardeau entre mes mains
Pour que je l’allège moi-même
Ma liberté est désormais déliée d’entraves

Tu as créé la terre selon tes besoins
Tu remplis ses ombres d’éclairs de lumière
Tu te reposes Tu me laisses
Seul avec mes seules mains
Dans la poussière
Tu voudrais recréer ton ciel

Tu combles de tes dons les choses terrestres
A moi tu les demandes
Après les averses
La moisson mûrit au soleil
On récolte plus que ce qui a été semé
Pour tes granges dorées

Rab 77

C’est à toi désormais
Que le monde appartient
Maintenant et à jamais
Tu n’as pas de désirs
Tu n’as pas de plaisir dans tes richesses
Elles sont mais elles n’existent pas
A travers le temps qui coule lentement
Tu me donnes ce qui t’appartient
En moi tu reconquiers ton royaume
Tu me demandes ton soleil levant
Tu trouves en moi ton amour
Sculpté dans l’image de ma vie

Rab 76

Je trouvais timidement mon refuge
Dans l’ombre protectrice
Maintenant la houle de ma joie
M’a porté sur les cimes
Mais je dois me cramponner
Au roc de la tempête

Je me tenais autrefois solitaire
Dans un recoin de ma maison
La trouvant trop exigüe
Pour un seul visiteur
Mais maintenant que la porte est grande ouverte
Pour une joie que je n’ai pas cherchée
Il y a place pour toi et le monde

Je marchais prudemment
je soignais mon corps
Paré et parfumé
Un tourbillon de joie m’a renversé dans la poussière
J’ai ri bien haut
Je me roule sur le sol pensant à toi

Rab 75

C’était hier
Je naquis sur cette misérable terre
Nu dépourvu de nom
Larve rouge gémissante

Aujourd’hui ma voix est plaisante
Tout s’écarte devant moi
Pour me laisser place
Je donne mes chants en offrande
J’espère secrètement que les humains viennent à moi
Et m’aiment pour leur propre cause
Tu découvres que j’adore le monde
Où tu m’as fait naître

Rab 74

Tous mes liens sont coupés
Mes relations sont mortes
Mes dettes sont payées
Ma porte est ouverte
Je m’en irai partout

Ils sont tous accroupis dans un coin
Araignées tissant la toile terne de leurs jours
Ils comptent leur or dans la poussière
Ils souhaiteraient que je revienne

J’ai forgé moi-même mon épée
J’ai acheté mon armure à ma taille
Mon cheval piaffe d’impatience
je m’en vais conquérir mon royaume imaginaire