Spleen

Au poète malingre
Profondes et opiacées
Les chevelures mortelles
Incantent la magie
D’un pays nonchalant
Où les voiles légères
Arrondies par le vent
Annoncent l’envol
Du nageur de l’amant
Vers l’azur reflété
Dans les yeux de l’amante

Autour de ces sources claires
La pestilence du marécage
Pourrit la chair au grand soleil
La nuit les serpents glissent
Sur les os blanchâtres qui émergent
Les serpents méprisent
L’oiseau leur frère
Ils lui brisent les ailes

Le poète ne croit pas en l’amante
Ni même à ses seins purs
Il lui crache au visage
La dérision de l’ivrognesse
Les yeux puants sanguinolents
De la charogne au corps béant
Qui la pourrit

La vie ne donne que le rêve
Le monde tourne dans un énorme maëlstrom
Plein d’effrois qui résonnent
Ils arrachent le coeur et c’est médiocre

Dans les limites d’un système
Existe déjà l’excès

Beauté

La beauté du lys candide
Est limpide
Comme une clarté

Le lys de cristal
Ne s’est éveillé
Qu’aux griffes du métal

Le symbole d’or régit le ciel
L’eau s’endort couleur de miel

Les nuages crient
La terre nait de leur agonie

La vierge sur la mousse
Pose son corps lisse

Un poète souffre
Des amours qu’elle perd

Ariel

Ariel l’ange de feu et de glace
Nous ne sommes pas Ariel
Nous avons la mort dans le sang
L’orgueil et le mépris notre tempête
L’homme bouchon
L’homme lie l’enfant
Pour le nourrir de la chair des morts
L’avenir aussi est dans les morts
Pour que l’idée règne il lui faut la violence
Rien n’est pur qui vient d’un homme
Nous ferons la révolution
Avec des doigts de feu
A nos enfants l’azur

Xen

Les choses divines et humaines se meuvent, échangent leurs places.
Tout est soi et non-soi, le même et l’autre.
Le soleil a son obscurité, l’obscurité est aussi un soleil.
Tout relève de la nécessité divine, âme du monde.
Dans leur errance, les choses se mélangent, se multiplient ou se détruisent mutuellement.
La plus petite détruit la plus grande ou la renforce. La plus grande fait de même.
Mélange de feu et d’eau, les hommes donnent et reçoivent. C’est en donnant qu’ils font grandir.
L’homogène, fait de tout, reste en place, l’hétérogène, fait de rien, laisse place.
Nous laissons de côté les autre animaux, seul l’homme nous intéresse .
Sa nourriture provient de l’eau sèche et du feu humide.
Les humains cherchent l’harmonie musicale qui détruirait leur stérilité.
Ils n’ont pas la science qui permet d’observer les choses invisibles à partir du visible.
Ils n’ont même pas conscience des modèles qu’ils imitent.
Les choses irrationnelles comportent de la raison, le contraire s’accorde avec tout.
Les lois naturelles, justes ou injustes, demeurent. Il n’en va pas de même pour les lois humaines.

N.B. : Ce texte est un hommage à Héraclite commenté par Hippocrate.

Les sangliers

Les sangliers
Yzont des os
Yzont un dos
Ysont pas beaux
Et ils boivent

Les sangliers
Yzont des yeux
Yzont des ch’veux
Ysont affreux
Et ils boivent

Les sangliers
Yzont des mains
Yzont des reins
Ysont malins
Et ils boivent

Les sangliers
Yzont des pattes
Yzont une rate
Ce qu’ils m’épatent
Et ils boivent

Les sangliers
Ysont marxistes
Façon Dhoquois
Ysont pas tristes
Et ils boivent

N.B. : Cette chanson à boire a été écrite en 1965 à El Biar, Alger ( sauf le dernier couplet ). Vivent les copains, chrétiens, juifs et musulmans !

Source

  • La source jalouse
  • J’y grave ma pensée
  • N’aime pas l’oiseau
  • Par lui au ciel je suis lié
  • La source se perd douce
  • A la lisière
  • L’oiseau pour se poser
  • N’a plus qu’un lit de mousse
  • Je rêve au coeur du bois
  • J’y trouve toute chose
  • Sauf la source
  • Froide sous le ciel rose
  • Elle revient dépitée
  • Salue l’oiseau moqueur
  • Elle me lèche les pieds
  • Je n’ai plus peur


Rivage

  • Le fleuve lent s’est déroulé hivernal
  • Comme un serpent qui boit la neige
  • Et glisse nu sur le sein nu de cette fille  Elle a chanté

    En elle est née la volonté

  • Son âme danse sur la neige
  • Créant de nouvelles fiertés
  • Des frissons de l’air si peu chanté

    Les filles  chantent et dansent
    Dans l’herbe neuve

  • Le rivage dur
  • Plonge dans l’eau
  • Qui sans relâche
  • Attaque l’abrupte  fierté
  • Du mur qui meurt
  • Il n’y a plus d’Ithaque

Sincérité

La sincérité est la plus belle des vertus. Elle est la condition de toutes les autres.  Elle rime avec honnêteté.

Régine est sincère. Elle l’est tellement qu’elle le reste alors même que cela lui nuit.

Toute qualité humaine dépend d’un subconscient un minimum glauque. Il arrive que Régine soit sincère parce qu’elle ne sait pas tenir sa langue.

Il n’empêche que Régine est la sincérité même. Cette vertu a rendu possible et durable notre couple, dans ses contraintes certes, mais surtout dans sa liberté.  Liberté qui est le contraire de l’adultère. Nous avions vingt ans quand nous nous sommes avoué la diversité de nos désirs.

La sincérité consiste à dire tout ce qui peut être dit.  De toutes manières, il reste beaucoup à dire quand on a tout dit.

La sincérité ne s’improvise pas.  Bien au contraire, elle s’apprend lentement, c’est toute une éducation qui doit commencer tôt.

Toutes les conditions humaines ne sont pas propices à la sincérité.  On comprend que certaines femmes, musulmanes et autres, vu le sort qui leur est fait, fassent du mensonge un art.

Tout ce que j’ai dit sur la sincérité exige des prolégomènes, des préalables logiques, qui relèvent de la raison et du raisonnable. Pourquoi ? Parce que la folie elle même est sincère.

Surprises historiques

La Russie Soviétique et la Chine communiste ont initié le passage pacifique au capitalisme, sans se désintégrer, même si la Russie a perdu un empire. La Yougoslavie anciennement titiste, elle, n’existe plus. Quelques années plus tôt le sentiment général était que, quelque soit le jugement porté sur ces régimes, ils étaient irréversibles. Il est difficile aujourd’hui d’imaginer que  l’on ait pu être maoïste ou naïvement communiste.  Le parti communiste chinois est toujours au pouvoir, mais il est devenu un parti de milliardaires.

Quand l’Histoire se répète, elle bégaie.  Ce qui a commencé en tragédie se transforme en comédie, parfois même en farce.  Mélenchon est un clown, un clown sinistre avec son petit costume et sa petite cravate.  Il est fondamentalement stalinien, par exemple dans son mépris affiché des média. En dépit de mes réserves, je ne pensais pas que Thorez fût un personnage ridicule même si je ne comprenais pas ce qu’il faisait à Moscou pendant la guerre.

L’Histoire est faite pour surprendre. Nous ne savons pas de quoi est fait l’avenir. Nous ne pouvons avoir que des projets apparemment raisonnables, voire des scénarios alternatifs, destinés souvent à être démentis. Toute folie n’est pas vaine, mais attention à ce que notre futur ne soit pas épouvantable. La démesure, l’hubris, terme de la Grèce ancienne, cher à Moreau de Bellaing, est à rejeter tant que c’est possible.

Pour l’instant les conspirationnistes, qui pensent que Kubrik a filmé sur terre les premiers pas de l’homme sur la lune, que les attentats du 11 septembre sont l’oeuvre de la C.I.A., sont des crétins inoffensifs. Mais gare ! Cependant pas touche à la liberté d’expression, pierre angulaire de toutes nos libertés.

N.B. : L’éloquence de Mélenchon est typique des années trente. La dernière fois que je l’ai entendue, grâce à la T.V., c’est à un meeting de collabos salle Wagram pendant la guerre.

Pétale

Le pétale tombe dans l’eau
Au souffle des lèvres douces

Secrètement divine
La  moire
Se  ravit  d’une caresse

Un nénuphar s’ouvre
Au baiser incessant
De l’étang mordoré

Transperçant les arbres,
Le soleil éblouit l’air
Apaise la mer qui se fond dans l’argent
Le ciel est une pierre unique et pâle

L’étang sera noir comme sa demeure intime
Où se traîne le monstre aux dix mille regards