A.B.I. II

La mise en valeur du M.P.A. dans mon petit article laissait dans l’ombre la voie d’évolution européenne. Elle n’était esquissée qu’en creux.
Les traits principaux du M.P.A. définissaient leur contraire. Au primat de la propriété étatique des moyens de production, et plus largement publique, devait s’opposer le primat de la propriété privée des moyens de production.
La propriété privée, petite et grande, devait entrainer beaucoup de conséquences dont l’importance du droit privé et du droit en général, garantie par un Etat limité.
En définitive ces caractéristiques « occidentales » devaient aboutir au règne de la marchandise, de l’économie de marché, au capitalisme, à l’impérialisme, à l’hégémonie mondiale sur la base de plusieurs révolutions technologiques.
Après une tentative que j’ai appelée plus tard « para-asiatique », faite d’emprunts à la Chine, le Japon a développé une puissante société féodaliste. A la fin du XIX° siècle le Japon s’adaptera victorieusement au capitalisme inventé en Europe occidentale. Il fut le seul dans son genre.
Quid de l’esclavagisme dont le Japon n’a pas eu besoin et qui caractérise pour une bonne part l’Antiquité gréco-romaine ? Dans notre histoire il était nécessaire. Il ne l »est peut-être pas en théorie.
Il faudra attendre près de vingt ans pour que j’étudie la sphère du Politique et complète ainsi grandement le début d’analyse contenu dans mon petit article de 1965. L’Etat limité, divisé, et pourtant puissant, caractéristique des grandes sociétés « occidentales », sera devenu mon principal objet d’études. Montesquieu se sera ajouté à Marx. Je dis bien « ajouté », n’en déplaise aux dogmatiques au petit pied.
Un dogmatisme encore : Il paraitra curieux à certains que j’appelle le Japon une nation « occidentale », pour des raisons de structure, de logique structurelle du langage, et beaucoup moins étrange que je nomme l’Egypte traditionnelle une nation « asiatique ».
A noter que le thème du mode de production asiatique, fondé sur la production, a été précédé, dans la tradition occidentale, par le thème du despotisme, fondé sur le Politique, dont Montesquieu est l’un des maîtres. Certains parleront de despotisme oriental. Il faut dire que dès l’Antiquité existaient de bonnes analyses du Politique tandis que les grandes analyses de l’économie débutent au XVIII° siècle.