CGU 17

Les dompteurs de la terre
Observaient les signes du ciel
Etalant leur superstition
Faute de méditation

Les flots fauves
Avalent les rames
La rumeur traine
Des ondes pleines

Je jette un grain dans le sillon
Alors qu’il en faudrait des poignées
Les moissons les plus belles
Sont immatérielles

j’apprécie les voix graves qui se taisent
Par scrupule de conscience
La colline paraît noire
Que nous reste-t-il à boire ?

CGU 16

Je crains les départs qui pleurent
Je traîne le froid intérieur
D’un adieu sans retour
Les roses pèsent sur mon front

Le coeur est âpre et sec des maudits
L’azur pénètre dans les taudis
Fais-je tant de rêves après tant d’autres ?
Les matins sont éternels

La nuit se répand sur le village
Les feuillages soupirent
Quelques groupes sont assis
Pour murmurer des racontars

Les fumées se fondent dans le ciel
Les vieillards rêvassent sur leurs bancs
Toute chose me plonge dans un mystérieux émoi
Les ombres naissent n’importe où

Ma jeunesse est implacable
Elle est mûre aussi
Je connais un lys
Qui pousse dans un puits

Les feuilles échangent des secrets
Un doigt suffit pour l’étoile des amants
La bague qui ensorcelle
Qui retient prisonnier

L’amour mêle les coeurs et les genoux
Les feuillages sont morts
J’étreins un tronc par hasard
Mon île est verte et secrète

CGU 15

Les vaines images se sont évanouies
Je n’aime pas les cimetières
On s’y promène de tombe en tombe
Tous ces noms propres !

L’oubli est souverain
Il aurait tant voulu aimer
Il aime il doute
Il ne peut pas s’empêcher de douter

Il boit obscur les vases d’agonie
Les morts se partagent les fleurs
Je ne traîne pas sur les routes
Même avec des lys dans la main

J’aime voir les voiles glisser hors du port
Pour regagner la mer
Au loin blanche d’écume
Dans son suaire de brume

CGU 14

Les formes les couleurs meurent dans l’ombre
J’imagine ta maison
J’entends tes pas
C’est bien toi

Les lampadaires étoilent la ville
Tes mains brillent par intermittence
La fenêtre se distingue vainement sur le mur noir
Pour s’approfondir comme une tombe

Les gouttes d’eau tintent à mon balcon de fer
L’espace est obscur et rauque
Mes draps trainent comme un linceul
Je suis seul Oh ! Comme je suis seul !

Ma jeunesse autrefois s’est asservie
A la volupté servile
Un vieil amour est comme un poignard
Que je me plante dans le coeur

CGU 13

Les chênes étaient noirs
L’étoile du berger brillait
Dans une échancrure de nuages
Mon coeur s’inquiétait d’aimer

L’amour doit créer les mots qui l’expriment
Nous rêvions accoudés
Le hasard est doux et triste
Ton image est invisible

Le lierre me noue
La rose s’éloigne
Quel oiseau boit ma pensée ?
Je n’ose pas regarder en arrière

Les jours se sont évanouis en traîne e
En troupe
Ma vie est mêlée à la vie à ta vie
Mon livre brûle dans la cheminée
Voici la route devient infernale

CGU 12

Ils disent : « Qu’il est bon de vivre ! »
La mélancolie est heureuse
Le lys est accablé par la pluie
Les serments se scellent sur les bouches

L’eau embrasse les cailloux mouvants
J’entends un geai crier
Le bois s’endort
L’éternité nous distrait

Pourquoi ce chapeau de feuillage ?
Le crépuscule rêve
Un fantôme féminin se lève
Elle est pâle et lasse

Je reprendrai mon chemin solitaire
L’herbe en fleur sent bon
Une langueur neuve
Nous habille pour l’été

CGU 11

Rien n’est Tout devient
L’esprit se détruit
Au contact du temps qu’il conçoit
Qu’il essaie de concevoir

Ma pauvre âme se croit immortelle
Alors qu’elle n’existe même pas
Au delà du tombeau rien n’est dû
En deçà non plus

A travers les feuilles je regarde l’horizon
Je ressens le parfum des fruits mûrs
Ma pitié est ardente pour ta peine inconnue
L’heure est farouche pour ton secret

Tu suspends trop ton corps
A mes bras assoupis
Que ne regardions-nous l’agonie de l’astre
Se couchant sagement ?

CGU 10

La mer forcenée redouble d’assauts
En contrebas du château
Qui n’est pas à nous
Hélas !

L’heure est indécise
Tu frissonnes d’horreur devant le ciel haineux
Les mouettes sont stridentes
Je me demande pourquoi

Tes pleurs brûlent tes yeux
Je m’accroche debout
A l’avant du vaisseau de granit
Devant les chevaux aux crinières de sel

J’aurais tant voulu être universel
Je ne suis qu’un particulier
Un quidam un homme quelconque
J’aimerais me reposer

CGU 9

Taciturne le front baissé tu tisonnes
Mais la lueur du feu est mourante
Le givre étincelle de passion vierge
Je ne savais pas que les roses fussent tristes

L’automne cache ses soucis
Comme un aïeul qu’on va quitter
Le bruit est furtif d’une bête
Qui fuit dans la forêt prochaine

Les champs s’étendent au loin silencieux
Vous qui pleurez ne pleurez plus
Nous vous menons dans nos avenues
Sous la protection des astres en feu

Avec lenteur je lisse tes cheveux
Je détourne mes yeux pleins de larmes
Tu m’évoques un enfant
Qui rit aux anges

CGU 8

Accoudée au balcon
Tu fleuris les vieilles pierres
La blonde lumière est heureuse
Comme toi plantureuse

Tu marches d’un pas sûr sur la route où je vais
Les bras levés tu ressembles un temps
A un temple
Un insecte querelleur bourdonne
Ivre d’un miel divin son âme pleure enfermée

Ma source est pleine de feuilles mortes
Le parfum de l’air mouillé est vert
L’univers semble minuscule
Le vent secoue un arbre chargé de pluie

Nos mains nos voix sans doute nos âmes
Unissent nos hasards
La lueur du feu est mourante
Par malheur il se fait tard