Hommage à Marceline

Marceline Desbordes-Valmore, première moitié du XIX° siècle, a célébré la révolte des canuts :

Entendez-vous tout un peuple qui crie ?
Froid est le linceul d’une ville
Je vous apportais quelques roses
Envolées dans le vent
Le ciel un temps en a rougi
Nous n’en garderons pas le souvenir
Nous oublions bien
Les massacrés sans armes

Hommage à Joubert

Joseph Joubert ( vers 1800 ) :

La poésie est un art qui évoque tous les autres, qui éveille tous les sens
La poésie vient de l’âme et non de l’esprit qui pourtant la prépare
La poésie n’a ni père, ni mère
Il y a des vers minéraux, d’autres sont comme végétaux, il en est d’animaux, mais les meilleurs appartiennent aux trois règnes
La poésie ne marche pas, elle bondit comme la musique
La poésie se construit avec peu de choses
Le poète est décorateur dans les détails et architecte pour l’ensemble
En poésie tous les mots sont beaux
La poésie transforme les mots de son feu ou de son haleine

Hommage à Clément Marot

Clément Marot, début XVI° siècle :

Je ne suis plus ce que j’étais
Mon joli printemps
Mon bel été
Ont sauté par la fenêtre
L’amour a été mon maître
Je l’ai servi au dessus des dieux
Si je pouvais renaître
Je le servirais mille fois mieux

Classiques

Les classiques ont l’inestimable qualité d’avoir résisté aux siècles sur leur seul mérite. Quand on les étudie, on découvre la raison de cette longévité que je nommerais imagination et raison, tout ce qui aide à penser… Il y a là un merveilleux patrimoine, certes éternel, mais qui ouvre aussi à des époques disparues. N’oublions pas que ces génies ont été des jeunes gens.
A dix-huit ans je lisais « Athalie » de Racine sur la plage. Me découvrant, un copain a éclaté d’un extraordinaire rire frais. Je ne peux pas lui donner raison. Il ne convient pas de momifier les classiques. Il faut les sortir de l’école. Le premier des classiques, qu’on ne cesse d’interpréter, de vivifier, est Shakespeare. Mais il est vrai que certains classiques vieillissent mal.
Notre époque est très riche. Mais beaucoup de ses trésors sont éphémères. Leur prestige disparait en quelques années, parfois en quelques mois. Cependant notre époque crée des classiques modernes. Le cinéma de Kubrick, les spectacles de Michael Jackson en font partie. Si je les appelle classiques, c’est que je pense que ces oeuvres ont des qualités analogues à celles que j’attribue aux classiques recensés comme tels. Profondeur, subtilité, créativité … Il faut savoir les découvrir.
C’est grâce à la connaissance des classiques que l’on peut créer du nouveau, des nouveautés authentiques, appelées peut-être à durer. Certes durer n’est pas nécessaire, l’important est d’exister, de vivre pleinement le moment présent. Il vaut mieux qu’il soit plein, pas trop débile. Le public aussi doit avoir du talent.
Pour créer en Chine il fallait respecter la tradition. Il ne sert à rien de vouloir être original à tout prix. Dans la querelle française des Anciens et des Modernes de la fin du XVII° siècle j’ai pris le parti des Anciens à l’image de La Fontaine et des grands auteurs de l’époque. J’ai peut-être tort, mais je n’en suis pas sûr. Aimer les « classiques » ne veut pas dire négliger les « modernes ». Il convient de marcher sur ses deux jambes. Dans le même temps où je découvrais Descartes, je lisais Sartre.
Le passé est la clef de l’avenir.

Le rêve

J’ai fait cette nuit un rêve merveilleux dans lequel je découvrais une idée sublime pour mon blog. Je me suis réveillé, l’idée a disparu. Depuis je suis à la recherche de mon rêve. Je ne le retrouve pas. Quelqu’un l’a-il rencontré ?

Espoir

Pas d’espoir sans désespoir. L’espoir est le désespoir de l’instant présent. Il faut de tout pour faire un monde. Le rire a peur. Le pire est peut-être la déprim’ du bonheur, la dépression engendrée par le bonheur lui-même. Les contraires s’attirent. N’en fais pas une loi.
Cons, nous sommes tous cons. L’univers est là où tu es. J’aimerais être à ta place. Hélas elle est déjà prise. Je rentre chez moi avec dignité. L’univers est là aussi. Il est splendide, cet univers.
Chez moi comme chez toi, le déterminisme est implacable. Lui seul est source de liberté. Le déterminisme est le contraire du fatalisme. Le fatalisme est paresseux, passif, pessimiste, surimpose un destin aux lois naturelles déjà difficiles.
Sois bon public, Bon Dieu ! Amuse toi d’un rien. Sinon, de quoi t’amuseras- tu ?
Tu réfléchis ? Tu t’égares. La méditation est au delà de la pensée. Il faut bien, pourtant, que tu penses, malheureux ! Pense au moins pour l’action. Il faut bien que tu agisses, pauvre de toi. Dans l’espèce humaine ne pas agir est une forme d’action. Tu manges, tu dors, tu défèques. Il y a plus, beaucoup plus : tu es pris dans le mouvement universel, dans le grand tournoiement qui te lance dans les étoiles ou dans la boue. N’oublie jamais que tu es mortel. N’oublie pas non plus que ce que tu peux attendre de mieux, c’est de devenir un sympathique petit vieux.
Tu te crois tolérant ? Ne vois-tu pas que ta fameuse tolérance est le plus souvent négative, c’est-à-dire que tu te tais, tu laisses faire sans exprimer ton désaccord de fond ? Ou encore que tu refuses d’entrer dans la logique autre, bougrement différente, qui t’est proposée ?
Le dialogue socratique, où chaque personne dit le fond de sa pensée, accepte a priori le bien-fondé de la pensée de l’autre, est un idéal magnifique. Malheureusement je ne l’ai jamais rencontré. Sans doute y-a-t-il là de ma faute et, sinon de ma faute, du moins de mon fait. Je te ressemble comme un frère, pauvre con !
Quoi ? Qu’est-ce que tu dis ? Bon, d’accord, je veux bien te croire, il y a plus con que toi !
N.B. : Il est loisible de se reporter à l’article « L’Espoir » du 22/9/2013.

Doute

Dès mes dix-sept ans j’ai placé mon amorce de pensée sous le signe du doute raisonnable, rationnel, scientifique. J’ai persévéré par la suite. Cf. mon article du 9/4/2013: « En avant doute ». De nombreuses difficultés sont tout à fait normalement apparues. Je les ai résumées dans l’exergue de mon premier livre, « Pour l’Histoire »( 1971 ) : « Dubito, ergo ( non ) sum ». « Je doute, dons je suis. Je doute, donc je ne suis pas ».
Le doute est donc pour moi au coeur de la pensée puisqu’il remplace le « cogito » cartésien, le « cogito, ergo sum ».
Le problème est que, s’il s’exagère, le doute entrave l’action. Or l’important, c’est d’agir. Certes avec discernement. Celui-ci peut être intuitif, traditionnel, relever du sens commun, et non pas de la raison discursive. La raison dominante, de type scientifique, doit l’emporter en définitive.
Le problème est grandement compliqué par le droit à l’imagination. Celui-ci est fondamental pour notre connaissance. Car toute opération humaine de savoir commence par l’imagination. L’être humain rêve le réel avant de le penser, de le raisonner et de le transformer en réalité. Dans cette opération le doute est second.
Le doute n’en est pas moins fondamental, au moins a posteriori. Lui seul garantit la vérification, la véracité de l’expérience.

Sensibilités animales

Descartes, entrainé par son idéologie du tout rationnel, ne voyait dans les animaux que des machines. Malebranche l’a malheureusement suivi dans cette voie. Par contre Pascal s’est élevé avec véhémence en faveur de la sensibilité des animaux. En 2013 en France le législateur n’a toujours pas tranché. Il suffit de vivre avec un petit animal pour lui deviner, non seulement de la sensibilité, mais aussi de la personnalité.
Les animaux doivent être particulièrement protégés quand il s’agit de les tuer. Au moins que leur mort se produise dans la dignité. Il est par exemple hautement anormal que, pour faire des économies, on n’étourdisse pas les volailles avant de leur trancher la gorge. L’avantage économique et gastronomique est que nous mangions des animaux en pleine forme et non des bêtes stressées, voire terrifiées.
Il y a aussi un intérêt philosophique à se remémorer l’unité du monde vivant.

Bêtes monstrueuses

Les lents océans s’étendent
Indifférents sur les bords malheureux
Libérés de la mort
Pour sombrer dans l’ennui
Enormes les voix chantent la malédiction
Arrachée à la gorge des bêtes monstrueuses
Nées dans les coeurs malades qu’elles dévorent
Afin que leur vie soit définitivement inutile

Souvenirs

Au ciel rose est apparue
Deux fois ravie
Ma mémoire ravissante ravisseuse
Je l’ai saisie à bras le corps
Je l’ai ouverte avec les dents
Elle contenait quelques décors
Trois oripeaux un météore
Un tapis une paire de souliers neufs
Un vieux vélo
Une boussole montrant le nord
Et faisant aussi office de loupe
Un courant d’air
De la poussière
Un manche à balai
Et même un morceau de beurre rance
C’est tout ce qu’elle contenait
Ah ! J’oubliais elle contenait aussi
Mon désespoir tout moche
Résidu des espoirs
Qui parurent si proches