Le poète et la grâce

Tu l’as touché à l’aube

D’une seconde vie

Son destin à l’instant

A viré de bord

Il t’a reçu lumière

Dans le cœur 

Et senti un feu

Attenant au corps

Désormais il sait

Que loin de toi

Ses mots suivraient

Des chemins rocheux

Pour décrire des statues

Aux lèvres froides

Et aux yeux creux

Chaque fois que tu es prise

Dans les filets de la nuit

Ou dans le gel du temps

Il te libère avant

Que ses mots ne se vident

Et que ne soient dépeuplées

Toutes ses syllabes

Dans l’inquiétude

De ton absence

Il laisse la porte ouverte

Inépuisable il te guette

Le front contre la vitre

De l’immuable

Il te vit

Passante aérienne

Il te veut

Haute et non hautaine

Maria Zaki (Poème publié dans l’anthologie LA GRÂCE Printemps des Poètes 2024, éd. Le Scribe- l’Harmattan, juin 2024)

Des nuages voguent

Au-dessus des falaises

Que les flots déchaînés

Viennent percuter

Des nuages voguent

Toutes voiles dehors

Ils abritent

Des créatures étranges

Dont on devine

Les yeux fureteurs

Et parfois de jolis corps

Certaines sautent du lit

Au moindre souffle du vent

Et d’autres s’étirent

Comme des chats

Qui se réveillent

Doucement

Salut à vous

Curieux nuages !

Votre passage

Met un peu de folie

Dans notre raison

Maria Zaki (Poème inédit, 2024)

L’océan le soir

Le contempler

Les yeux emplis d’étoiles

Avant de nous coucher

Dans son giron

Bercés par sa respiration

Nous réveiller au matin

Par sa voix qui chante

Haut et fort

Le retour à la vie

Et boire du regard

Les reflets du jour

Qui scintillent sur ses tapis

D’or et de satin 

Maria Zaki (Poème inédit, 2024)

De grâce, cessez vos guerres !

De grâce, cessez vos guerres !

Aveugles et sourds

Vous semez la terreur

Malheureux vous êtes

Insensés vous faites

Les pires erreurs

De grâce, cessez vos guerres !

Plus vous cherchez

La victoire et la durée

Plus votre trace est éphémère

Comme celle que laisse

Un vaisseau fendant les mers

Force et pouvoir

Fortune et gloire

Toutes les choses de la terre

Vous diront adieu

Mais vous n’entendez rien

Savez-vous au moins

D’où vient votre mal ?

Avez-vous oublié

Votre part de bien ?

Cessez votre haine

Et vos infinies querelles

Laissez-nous de l’espoir

Et croire un instant

Que l’humanité est belle

Maria Zaki (Poème publié dans l’anthologie LA GRÂCE Printemps des Poètes 2024, éd. Le Scribe- l’Harmattan, juin 2024)

C’est une chose étrange / It’s a strange thing

Tu es voué à un avenir

Rempli de surprises

Mais rien ne m’autorise

À être plus assaillie

De doutes que jadis

À tes eaux vives

Qui ignorent souvent

Le calme et le repos

À ton ciel

D’où de terribles éclairs

Parfois jaillissent

Que puis-je adresser ?

C’est une chose étrange

Que ton trépignement

Au sein de la patience

Tu prends de l’âge

Et je reviens

Inéluctablement

De mes anciennes

Évidences

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You’re destined for a future

Filled with surprises

But I’m not allowed

To be any more seized

With doubt than before

To your whitewater

Unfamiliar with

Calm or rest

To your sky

Sometimes surging

With terrifying bolts

What can I say?

It’s a strange thing

Your pacing

In the midst of patience

You grow older

And inescapably I

Come back

From my former

Certainties

Maria Zaki (Poème extrait du nouveau recueil bilingue « A mon fils » « To my son » traduction de Matthew Brauer, L’Harmattan, 2023)

Oiseaux migrateurs

La mer vêtue

De sa robe printanière

À nul autre pareille

Brille d’un reflet de miroir

De toute beauté

Des oiseaux migrateurs

Ayant répondu

À l’invitation du ciel

Calme et radieux

Venus de leurs

Lointaines contrées

Fendent l’air

Sans s’arrêter

Leur passage

À tire-d’aile

Entre écume et ciel

Fait pleurer d’émoi

Le pêcheur pensif

Celui qui les voit

Survoler la mer

Et voudrait être des leurs

Maria Zaki (Poème inédit, 2024)

Un port averti

Un port averti

Jamais ne s’illusionne

En s’attachant

Aux bateaux qui le regagnent

Ni à ceux qui l’abandonnent

Sous ses yeux

Certains s’embrassent

Pour se dire bonjour

D’autres s’enlacent

Pour se dire adieu

Que de traces et d’échos

Partis au fil de l’eau !

Que de songes lointains !

Que d’absence !

Jour et nuit

Il demeure

Fidèle à son poste

Mais face à l’océan

Au mystère immanent

Il déteste son ignorance

Maria Zaki (Poème inédit, 2024)

Bouffée d’air marin

Descendre lentement

De la falaise vers la mer

Sans penser avec frayeur

À l’écoulement de la vie

Ni à l’éphémère

Dans l’immensité

De la nature océane

Ne retenir que les reflets

D’or et d’argent

Qui viennent recouvrir

Les papillons noirs

De ses élucubrations

Et le corps tendu

Vers l’horizon

Sentir une bouffée

D’air marin

Pur et frais

Emplir ses poumons

Maria Zaki (Poème inédit, 2024)

Fidèle à toi-même / True to yourself

Je te souhaite d’être

Fidèle à toi-même

Même si cela

Ne va pas de soi

Fidèle à toi-même

Au sens strict

Essentiel

Loin du culte

De la personnalité

Mais dans la diversion des jours

Et leur prétendue diversité

Nul n’échappe à l’impression

De la dispersion de soi

Ne reste que la nécessité

Tangible d’œuvrer

Dans l’atelier collectif

Des peines et des joies

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I wish you will be

True to yourself

Even if it isn’t

Self-evident

True to your self

In the strictest

Most essential sense

Far from the cult

Of personality

But behind the screen

Of supposed daily variety

No self escapes the

Sense of scattering

There remains only

The tangible need to labor

On the common floor

Of sorrows and joys

Maria Zaki (Poème extrait du nouveau recueil bilingue « A mon fils » « To my son » traduction de Matthew Brauer, Ed. L’Harmattan, Paru le 26 octobre 2023)

À mesure de ta maturité / As you age

À mesure de ta maturité

Mon fils

Tu comprendras

Que ce qui nous manque

Détermine notre créativité

Que dans notre façon

D’appréhender la privation

La navigation s’opère entre

La mer des idées

Et le port de la réalité

Il est possible que le passé

Dont nous nous sommes

Habilement détachés

Nous visite parfois

Nous l’embarquerons

Alors

Vers des contrées

Qu’il ignore

Et dont nous sommes

Des artisans adroits

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As you age

My son

You will understand

What we lack

Determines what we create

The way we

Know hardship

Navigating between

The sea of ideas

And the port of reality

It may be that the past

However deftly we have

Disentangled ourselves from it

Sometimes visits us

We will ship it off

Then

To lands

Unknown to it

Of which we

Are the able artisans

Maria Zaki (Poème extrait du nouveau recueil bilingue « A mon fils » « To my son » traduction de Matthew Brauer, Ed. L’Harmattan, Paru le 26 octobre 2023)