Sur le concept de l’aimance

J’ai adhéré au concept de l’aimance, comme à un legs précieux de mon mentor Abdelkébir Khatibi ; un don et une trace à la fois. Je la considère  comme une langue singulière, une notion inventive et une démarche exigeante ayant pour but de guider les personnes dans le jeu complexe et délicat des attirances humaines, sans renier leur altérité. Dans le mot « aimance », il y a la notion d’alliance mais aussi celles de la mouvance et du renouvellement qui permettent de transformer l’amitié ou l’amour en un art de vivre la rencontre.

Dans l’aimance, on ne se repose pas sur ses acquis, on continue à prendre soin de la relation d’amitié et à se remettre en question car l’aimance se réalise dans la dynamique et le renouvellement.

L’aimance repose sur l’affection sans confusion, l’écoute de l’Autre, la sollicitude en gardant une distance appropriée et la loyauté, tout en respectant la singularité et la différence de l’Autre.

L’aimance permet de transformer l’attraction affective, le désir et la charge passionnelle que « le fait amoureux » engendre, en un champ matériel ou immatériel, où l’on libère sa force créative, sachant que « le manque à être » ne peut être comblé que par le passage vers le champ de l’art et de la navigation symbolique. Dès lors, on s’inscrit dans la volonté de penser la rencontre afin de supporter l’inéluctable écart entre le désirant et l’objet de son désir.

Maria Zaki

Qu’est-ce cet oiseau ?

Elle cherche un interprète

Au revers de l’hiver

Et fait naître une saison

Inédite puis s’y perd


Qu’est-ce cet oiseau

De l’intelligence

Relationnelle

Qui vole librement

Dans l’intemporel

De son cœur ?


Amoureuse de son mystère

Elle prend soin du champ

Et de la roseraie

Sans pour autant

Oublier le désert

Maria Zaki (Extrait de “Le chant de l’aimance”, 2018)


Jusqu’à l’invisible

A la lueur d’une bougie

Qui fleurit dans le noir

Le poète convie

Les absents de ses jours

Au jeu de la survie


L’invite est sincère

Et l’illusion

Jamais ne s’évanouit


L’affiliation spirituelle

Veille sur l’inachevé

Dans l’accompli


C’est un pari

Lent et discret

Qui se poursuit

Jusqu’à l’invisible

Maria Zaki (Extrait de “Le chant de l’aimance”, 2018)

Pleine de vie

Tu fermes les yeux

Et laisses venir

A toi tous les vents

De la mémoire


Entre ceux qui

Surgissent des racines

Et ceux qui vers le haut

S’obstinent

Se dresse un espoir


Une silhouette

Inexplorée

Mais pleine de vie

S’y reflète

En aide-mémoire


Tu te demandes

De quoi

De quand

De qui

Elle est faite


Est-ce

Un souvenir tenace ?

Une pensée fugace ?

Ou une forme que tu as

Toi-même dessinée ?


Tantôt sage

Tantôt pro-vocatrice

Elle réitère

Ton goût de vivre

Et ton envie de rompre

Les digues des solitudes

Maria Zaki (Extrait de « Le chant de l’aimance », 2018)

Irréfutable

C’est le moment de lire

Le tatouage de la mémoire

Comme on lit

Les lignes de la main

Ce qu’on s’avoue

A peine

Nous bouleverse


Le signe caché

Qui manifestement

Coule dans nos veines

Réclame l’art

Dans la pensée

Et de l’infini

L’ivresse


D’aucuns

D’ici et d’ailleurs

Nous ont cru victimes

D’autres nous ont pris

Pour des coupables


Mais l’ordre spatial

Du symbolique

Revient sans cesse

Irréfutable

Maria Zaki (Extrait de « Le chant de l’aimance », 2018).

Toile en gestation

En idées et en actes

Se dévoilent peu à peu

La toile en gestation


Les mots cursifs

Ouvrent le chemin

Aux traits envoutés

Du signe


Savoir et hasard

Se déploient

Dans des dimensions

Voisines


Et les couleurs

De leur étendard

Donnent vie à l’inexploré

Dans les possibles

De l’Homme

Et l’ouvert de l’Art

Maria Zaki (Extrait de « Le chant de l’aimance », 2018).

A plein chant

Que fait l’oiseau

De son désir pensant

En attendant l’arbre ?


Le cœur à découvert

Il porte l’espoir

De la rencontre

Entre ses ailes

Dans l’orbe du ressenti


Et prend le vent

Dès l’aube en invoquant

A plein chant

De mystérieuses litanies


De loin leur clé

Nous est inaccessible

Mais de près

Nous comprenons

Que ce que nous prenons

Pour une complainte

Est en fait

Un dessein prescrit

Maria Zaki (Extrait du nouveau recueil de poèmes « Le chant de l’aimance », Préface de Hassan Wahbi, éd. L’Harmattan, 2018).

Dans le leurre de l’oubli

Dans le leurre de l’oubli

Des échos

Des parfums

Des impressions

Reviennent avec

Plus d’obsession


Des fragments

De vie ou de mort

Se profilent

Ici et ailleurs

Dans l’espace en nous

Aménagé

Pour le présent


Le balancier

Des sauvages régions

Revient toujours


Rien d’intentionnel

Ne coupe

Le fil responsable

D’un tel mouvement

Maria Zaki (Extrait de « Et un ciel dans un pétale de rose », 2013).

Imperturbable

Quand les oiseaux

Paisibles planent

Comme des nuages blancs

Dans un ciel de printemps

Et qu’ils se posent

Sur ses arbres radieux

Et quand l’hiver

Règne en maître

Incontesté

Quand les oiseaux

Ont migré

Vers d’autres cieux

La forêt demeure

Imperturbable

Elle a ses secrets

Pour déchiffrer

Les signes portés

Par chaque saison

Et prolonger le regard

Pour percevoir

Le cycle entier

Et se fonder

Sa propre vision

Maria Zaki (Inédit, 2017).

L’heure de la floraison

Quand le temps

Et l’espace

Dans un même souffle

Profèrent

L’heure de la floraison

Tu n’en doutes pas


Lors du réciproque aveu

Ton esprit recouvre

Ses meilleurs atours

Dans une alliance

Sans détour


Puis de saison en saison

De siècle en siècle

Tu conserves les traces

De ton aimance

Qui n’existe pas

En tant que telle


Quand ton âme

Mûrira-t-elle

Comme un fruit

Que le destin

Portera en offrande

Aux lèvres de l’univers ?

Maria Zaki (Extrait du recueil « Le chant de l’aimance » à paraître en 2018).