L’année près de finir

Se reposer du labeur

Récitant l’alphabet

Du quotidien


Sans trop ânonner

Et sans que jamais rien

Ne ressemble à ces heures

Vides qu’on égrène


Oublier le temps

Qui ruisselle

Sur le chemin


Ne retenir du ciel

Que le souffle des anges

Que nous recueillons

Dans le creux de nos mains


Se dire

Que le bruit de la foule

N’est plus

Qu’un battement lointain


Que l’angoisse s’éteint

Et n’a plus d’importance


Marcher sans hâte

Dans un jardin

Flamboyant de silence


Puis lever le voile

Sur l’inconsistance

De rêves incertains


Contempler

Ecouter

Humer

Toucher

Goûter

Se laisser totalement

Porter par ses sens

Dans de tous petits plaisirs

 

S’accrocher aux lumières

Qui jamais ne scintillent

Que dans l’intimité


Et cueillir les derniers

Désirs de l’année

Près de finir

Maria Zaki et Jacques Herman (Inédit, 2013).


Ah !

Ah ! On n’arrose pas

Les fleurs et les fruits

De la même manière

Nous dit la rivière

Nourrie de nos rires

Et de nos pleurs


Chaque espèce a ses goûts

C’est un peu comme nous

Qui ne réagissons pas

De la même manière

Selon le jour et l’heure


Puis un vent de désir

Un vent fou

Commence à souffler


Mais il faut veiller

Que brûlant ou glacial

Sur son passage

Il n’emporte tout


J’aimerais pouvoir

Mentir au ciel novice

Nous dit-il

Mais vos yeux agrandis

Annoncent déjà

L’averse prochaine


La pluie toujours dissout

Les rancœurs et les peines

Et fait que dans les cœurs

C’est l’amour qui survit

Maria Zaki et Jacques Herman (Inédit, 2013).

Le ciel bleu en soi

Le soleil

Tente en vain

De réchauffer l’air

Qui s’enrhume une écharpe

Nouée autour du cou


La terre

A les lèvres

Gercées par le froid

Il n’est plus un mot

Qui n’est dit pour le coup


Tout est blancheur

Givre

Craquèlement

Seuls ici se faufilent

Des arpèges du vent


Loin est le goût

Velouté

De la chaleur d’été

Les mouettes du port

Viennent de nous quitter


Ne reste

Des champs dorés

Que le ciel bleu en soi

Au-dessus des cheminées

Et du sommet des toits

Maria Zaki et Jacques Herman (Inédit, 2013).

Dans la forêt

À la fin du jour

Les arbres aux bras

Tressés de lumière

Sont joueurs


Impertinents

Ils s’amusent avec les sens

Des promeneurs


Partout des empreintes claires

Et des traces sombres

Se suivent et se touchent


Quand un vol d’oiseaux

Se lève

Un bouquet d’ombres

Se couche


Des silhouettes

Suspendues au regard

S’enroulent autour

Des troncs et des branches


Elles s’approchent

Puis s’éloignent

À l’angle invisible

D’une rencontre imprévue


Un mouvement

Un bruit

Puis un écho fugitif

Guidant les esprits

Animés par l’inconnu

Maria Zaki (Inédit, 2013).

Comme un pèlerin

Il quitte

La ville surpeuplée

Ses grands boulevards

Et ses lumières éclatantes


Il quitte

La campagne dépeuplée

Et son néant

Obstruant le regard


Comme un pèlerin

Animé par la marche

Envouté par le chemin


Comme un habitant

D’une autre planète

En suspens


Si vous le croisez

De grâce

Ne le bousculez pas


Vous le voyez

Mais lui

Ne vous voit pas

Maria Zaki (Inédit, 2013).

Dialogue

Elle lui dit :

Que cherches-tu

En moi ?

Un lieu de passage

Entre l’intemporel

Et le temporel

Ne doit-il pas

Être dans les cieux ?


Il dit :

Ce que je cherche

N’est pas dans la matière

Ce que je vois

Se voit avec le cœur

Avant les yeux


Elle dit :

Je peux

Donc vivre en toi

Poussière à l’ombre

D’un petit brin d’herbe

Sans plus jamais

M’attrister ?


Il dit :

L’Amour est l’une

Des quatre sphères

Où se génèrent

Les ordres de vérité

Maria Zaki (Inédit, 2013).

La parole aimable (الكلمة الطيبة)

Ô fontaine de mots tendres

Qui se posent

Malgré la distance

Dans le creux de l’oreille

Par le désir habitée


Bouquet de fleurs

Jaillissant de lèvres

Imprégnées de lumière

Qui suppose

Une conscience de la beauté


La parole aimable

S’intègre

Dans la splendeur

De l’univers

Avec ou sans rime


Source de paix

Quand elle est sincère

Menant parfois

De la terre jusqu’à

L’Assise sublime

Maria Zaki (Inédit, 2013).

Finalité

Pardonner constamment

Au monde

Son inconstance

Et exister

Entre êtres d’amour

Sans fausse existence


Revenir du savoir

Dont la plénitude

N’est qu’insignifiance

Et revenir de l’ignorance

Par la vision

Et par la conscience


Narguer la vie

Par la comparaison

Du fini avec l’infini

Et narguer la mort

En faisant grand cas

Du peu que le monde

Nous dispense

Maria Zaki (Inédit, 2013).

Un nuage vaniteux

Un nuage vaniteux

Se sépare des autres

Dans le ciel noir

Il croit tout peupler


Depuis qu’il demanda

La lune en son plein

Et crut l’avoir obtenue

Il s’emplit de lui-même


Aucun discernement

Aucun signe d’humilité

Que le destin

Récompense en retour


Bientôt

Sa beauté suffisante

Sa beauté suprême

Tombera

En gouttes infimes


Il jettera un dernier cri

Mais le ciel fera le sourd

Et les étoiles joueront

Les endormies

Maria Zaki (Inédit, 2013).

Il y a des jours

Il y a des jours

Où l’alchimie opère

Sur nos expériences

Fragmentées et éphémères


Le miracle

Se conjugue avec

Toutes les possibilités

De l’être

Les portes de l’univers

S’ouvrent

En coup de vent


On peut aller

De soi-même

Vers l’autre

Ou se cramponner

Aux pierres

Maria Zaki (Inédit, 2013).